La modernité de l’esthétique traditionnelle

Le cartable japonais « randoseru » s'exporte

Culture

Des écoliers du primaire arborant fièrement sur leur dos un « randoseru » tout beau tout neuf : voilà une scène printanière typique au Japon. Aussi bien les Japonais que les étrangers se retournent sur le passage de ces enfants espiègles, équipés du cartable à bretelles qui leur fera sans bouger les six années de leur scolarité élémentaire.

S’il y a un élément qui caractérise à lui seul l’écolier japonais, c’est bien son cartable, appelé « randoseru ». La figure de l’écolier qui entre à l’école primaire, son randoseru sur le dos et participe à sa première cérémonie de rentrée est un symbole du printemps (la rentrée scolaire ayant lieu en avril), provoquant un sourire ému chez les passants.

Écoliers de première année avec leur cartable tout neuf.

L’histoire du cartable d’écolier est plus ancienne qu’on ne l’imagine souvent, puisqu’il faut en fait remonter à la fin de l’époque d’Edo, au milieu du XIXe siècle. Quand le shogunat d’Edo introduisit certaines réformes d’organisations militaires, en particulier concernant l’équipement des soldats en particulier, un paquetage à porter sur le dos fut importé des Pays-Bas, où il était appelé « Ransel ». En 1885, l’école primaire du Gakushûin introduisit le système des manuels scolaires à apporter par les élèves eux-mêmes, et les écoliers ont donc commencé à utiliser ces mêmes sacs à dos en guise de cartable, puis le mot a évolué jusqu’à devenir l’actuel « randoseru ».

Une écolière fait son cartable en plaçant les manuels scolaires dans le « randoseru ». (Photo : EKAKI / PIXTA)

La saison commerciale du randoseru commence en août

La rentrée scolaire a lieu en avril, mais le pic des ventes de cartables se situe en août de l’année précédente. La tendance des distributeurs, grands magasins, grandes surfaces, boutiques spécialisées est à présenter leur nouvelle collection de plus en plus tôt, de façon à lancer les ventes dès mai ou juin. Les articles les plus populaires sont parfois épuisés dès l’automne.

« En général, la famille se présente tout d’abord au magasin un jour de congé, trois générations ensemble : l’enfant, les parents et les grands parents, pour essayer. Ensuite les parents et l’enfant reviennent, vers juillet août, pendant les vacances d’o-bon généralement, et passent commande. C’est la pratique la plus commun », raconte Mme Odajima Junko, de Aeon Retail, l’une des principales chaînes de grandes surfaces. « La tendance est aux modèles simple, basique, dans le cœur de la norme. La décision finale appartenant à la mère, le design flatte les goûts de la maman. »

Aeon a ouvert un rayon « cartables » dans 240 magasins. Les prix vont de 30 000 à 150 000 yens, le prix moyen se situant autour de 50 000 yens. 103 modèles, 24 couleurs existent. Les modèles « sur commande », en choisissant soi-même la matière, le design, les motifs, les fermoirs et le fil des coutures sont également populaires, ce qui fait plus d’1,1 million de modèles possibles.

M. Yamashita de Aeon Retail présente les nouveaux modèles.

Ces dernières années, les randoseru de grandes marques de sacs ont le vent en poupe. L’année dernière, la boutique spécialisée Kaban kôbô Yamamoto a vendu en un mois 13 000 randoseru à 60 000 yens pièce, dès juillet. Chez Tsuchiya Kaban seizôsho aussi, ils avaient tout vendu début septembre.

1,06 million d'enfants ont acheté un randoseru en 2015, à un prix moyen de 50 000 yens, selon le ministère de l’Éducation, de la Culture, des Sports et de la Science. Selon la société d’analyse économique Funai Consulting, le marché du randoseru s’élevait à 50 milliards de yens, soit près du double comparativement à 2005 où il était de 27,5 milliards. Et pourtant, il n’y a aucune érosion du prix unitaire, car aussi bien les parents que les quatre grands parents tiennent à participer à cet achat.

La valeur symbolique du randoseru réside dans le fait qu’il représente les premiers pas de l’enfant dans la société. À cette occasion, parents et grands-parents tiennent à marquer le coup et acheter le meilleur pour leur petit-fils ou petite-fille. C’est cette valeur symbolique qui soutient le marché.

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