Quand gourmandise rime avec plaisir

« Wagyû », le bœuf japonais renommé dans le monde entier

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La cuisine japonaise fait l’objet d’un engouement à l’échelle de la planète. Le wagyû, le célèbre bœuf marbré de blanc très persillé de l’Archipel, n’y a pas échappé. Il est réputé dans le monde entier pour sa saveur, son fondant et sa tendreté incomparables.

Le cas particulier du wagyû américain

Comme on l’a vu dans les lignes précédentes, le premier pays à importer du bétail sur pied japonais de type wagyû a été non pas l’Australie, mais les États-Unis. En 1976, l’Université du Colorado a réussi à obtenir du Japon quatre taureaux wagyû – deux à robe noire et deux à robe rouge – à des fins de recherches.

Les éleveurs américains ont croisés les quatre bovins avec des vaches locales. Les croisements répétés de wagyû de pure souche et de vaches métissées leur ont permis d’obtenir des animaux ayant plus de 93,5 % de sang wagyû. Entre 1976 et 1998, les éleveurs de l’Archipel ont envoyé 247 têtes de « bœuf japonais » et 13 000 doses de sperme de wagyû congelé aux États-Unis. Mais à partir de 1999, le Japon a mis fin à ces exportations pour protéger le patrimoine génétique de cette race bovine.

Quand ils ont commencé à importer du matériel génétique du Japon, les Américains envisageaient d’exporter le bœuf wagyû « made in USA » au Japon. Mais cette viande n’a eu aucun succès dans l’Archipel. Les éleveurs des États-Unis ont alors renoncé à leur premier projet et ils se sont tournés vers le marché américain. Depuis lors, ils s’efforcent d’encourager leurs compatriotes à consommer ce bœuf de haute qualité.

D’après l’Association américaine du Wagyu dont le siège se trouve dans l’Idaho, l’essentiel des producteurs de wagyû des États-Unis se trouvent au Texas, en Californie, dans l’Orégon, le Missouri et dans l’État de Washington. Le cheptel de bovins wagyû américain se composerait de 3 à 5 mille têtes de « pur-sang », de 5 à 10 mille têtes de « pure race » et de 40 000 têtes ayant jusqu’à 93,5 % de sang wagyû et pour la plupart issues d’un métissage avec la race bovine Angus. À la date du 1er janvier 2014, le département de l’Agriculture américain a évalué le cheptel bovin du pays, toutes races confondues, à 88 millions de têtes, ce qui veut dire que le wagyû ne constitue qu’une part infime, même pas 0,1 %, de ce total.

Les races bovines les plus représentées aux États-Unis sont la Hereford à robe rouge et blanche et l’Angus à robe noire qui est réputée pour sa viande fondante avec une alternance régulière de graisse blanche et de muscles rouges. Le wagyû « made in USA » s’est fait une place aux États-Unis parce que sa viande est plus tendre et plus marbrée que celle de l’Angus et que les Américains manifestent un intérêt de plus en plus marqué pour la cuisine japonaise.

Mais l’authenticité du wagyû vendu sur le marché américain pose problème. En effet, les restaurants des États-Unis n’hésitent pas à proposer de la viande qualifiée de wagyû ou de « bœuf de Kobe » provenant d’animaux ayant tout juste 50 % de sang wagyû. Une telle pratique serait impensable au Japon et en Australie où les normes de qualité sont beaucoup plus rigoureuses.

Le wagyû chinois, un concurrent sérieux

Les Chinois se sont eux aussi lancés dans l’élevage de bœufs de type wagyû. Dalian Xuelong Industry Group, le plus gros fournisseur étranger de l’Archipel en paille de riz – un ingrédient qui fait partie de l’alimentation des « bœufs japonais » – a eu l’idée d’élever des wagyû en Chine à la suite de ses échanges avec l’industrie bovine nippone.

Dalian Xuelong Industry Group a inséminé des « vaches jaunes » (huángniú) de Fuzhou avec du sperme de wagyû importé d’Australie et il a ainsi obtenu une variété métisse qu’il a baptisée xuelong, c’est-à-dire « dragon de neige ». Sa filiale Snow Dragon Beef Co. Ltd a un cheptel de quelque 30 000 têtes de bovins wagyû xuelong qu’elle élève à Dalian, dans la province du Liaoning et à Yantai, dans la province du Shandong. Elle applique la méthode japonaise qui consiste à dorloter les bœufs en les installant dans des étables confortables où ils ont droit à de la musique d’ambiance, des massages et une alimentation constituée de maïs, de céréales et bien entendu, de paille de riz. Les animaux bénéficient de ce traitement privilégié pendant 22 mois après quoi, ils sont abattus.

En 2005, Dalian Xuelong Industry Group s’est associé avec le négociant japonais Kanematsu et l’entreprise nippone spécialisée dans le traitement de la viande Kamichiku pour renforcer sa position dans le secteur du wagyû. Dalian Kanematsu Xuelong Food, l’entreprise conjointe qui en a résulté, dispose d’une usine qui bénéficie à la fois de l’expertise de Kamichiku en matière de transformation de la viande et des compétences de Kanematsu en ce qui concerne la distribution et le marketing.

« Quand on coupe leur viande, on est émerveillé par ses marbrures blanches », avoue Uemura Kôichirô. « Les Chinois ont réussi à faire du bœuf qui a obtenu la note 4 dans notre système d’évaluation de 1 à 5. Je pense que le wagyû xuelong est un véritable défi pour les éleveurs japonais. »

Pour l’instant, la demande intérieure chinoise en matière de wagyû est telle que les producteurs japonais ne sont pas vraiment menacés. Snow Dragon Beef Co. Ltd et les autres éleveurs chinois sont bien trop occupés par le marché intérieur de la Chine. Mais le jour où ils commenceront à s’intéresser au Japon, les producteurs de l’Archipel seront vraiment en danger.

Suite > La vogue de la viande rouge : une réelle menace pour le wagyû

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