
Les toilettes à la japonaise vont bientôt disparaître...
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L’histoire des toilettes japonaises traditionnelles
Les toilettes se divisent grossièrement en deux catégories : les toilettes « assises » et les toilettes « accroupies ». Les régions à dominante chrétienne, en particulier l’Europe et l’Amérique, sont essentiellement centrés sur une culture des toilettes « assises ». Celles-ci sont appelées au Japon « toilettes de style occidental ».
En Asie, comme en Afrique et au Moyen-Orient, les toilettes « accroupies » sont traditionnellement les plus nombreuses. Dans le passé, c’était également le cas au Japon, et d’ailleurs, c’est encore au nom de « toilettes japonaises » ou « toilettes traditionnelles » qu’elles sont associées. L’une des principales caractéristiques de ces « toilettes japonaises » est qu’elles sont munies à l’une de leurs extrémités d’une sorte de capot relevé prévenant toute éclaboussure. Ce capot porte le nom euphémique de kinkakushi, littéralement « la planque aux bijoux ». D’après le fabricant TOTO, leader des toilettes sur le marché japonais, c’est en 1977 que les ventes de toilettes de type occidental ont dépassé celles des toilettes de type japonais.
Quand il est question de toilettes japonaises traditionnelles, je ne peux m’empêcher de penser immédiatement à celles de l’hôtel Gajoen Tokyo (anciennement l’hôtel Meguro Gajoen), surnommé le « palais des dragons de l’ère Shôwa ». Il existe dans cet établissement une aile spéciale dite « l’escalier des cent marches », qui n’est ouverte que pour certains événements privés, essentiellement des mariages, spécialité de l’hôtel depuis un siècle. Les toilettes attenantes sont immenses puisqu’elles font 7,4 m2, et munies d’un vase « à la japonaise ». Si j’en crois un récit d’une employée de l’hôtel, elles sont destinées à l’usage de la mariée, dans sa robe à grande traine… accompagnée de la demoiselle de compagnie chargée de soulever la robe. Voilà des toilettes dignes de l’illustre atmosphère du lieu !
Les toilettes japonaises du Gajoen (non publiques). La saillie demi-sphérique au bout de la cuvette est appelée kinkakushi, ou « la planque aux bijoux ».
Le modèle original de la toilette japonaise accroupie est une sorte de boîte portable, appelée hibako. Ce modèle a commencé à se répandre dès l’époque de Heian (794-1185). Vers l’arrière se trouve une sorte de portique en forme de torii, destiné à maintenir suspendu le bas de la tunique ou de la chasuble de kimono pour éviter de la salir. C’est cet accessoire appelé à l'origine kinukake (porte-vêtements) qui évoluera en kinkakushi à l’époque moderne.
Maritomo, l’auteur de l’article, devant la boîte portable hibako, qui était à l’origine utilisée par les nobles. Un serviteur pouvait récupérer la boîte en dessous pour la débarrasser du contenu.
Dans la seconde moitié de l’ère Meiji (fin XIXe, début XXe siècle), la mode des hibako en céramique blanche décorées de motifs bleus s’est répandue. La photo ci-dessous montre bien comment le portant à kimono a évolué en kinkakushi. Le kimono laissant peu à peu la place aux vêtements occidentaux, le portant arrière est devenu inutile. Celui-ci a donc opéré une métamorphose en demi-disque et, passant de l’arrière à l’avant, a pris la fonction de paravent, à la fois afin de cacher les parties intimes mais aussi pour protéger des éventuelles éclaboussures.
L’attention portée aux motifs ornementaux est également un signe de l’évolution vers toujours plus de sophistication, ce qui conduira aux toilettes actuelles. Certaines de ces latrines en céramique fabriquées au tout début du XXe siècle sont encore en usage aujourd’hui.
Toilettes décorées. Avec la céramique, le portant arrière est devenu plat, puis s’est arrondi (au fond) et a changé de place, passant de l’arrière vers l’avant.