La culture pop nippone se mondialise

Et le monde redécouvrit la City Pop japonaise

Culture

Kurimoto Hitoshi [Profil]

Le genre City Pop, dont l’importance fut énorme pour pousser au premier plan l’image urbaine et moderne de la musique japonaise, est né sous une forte influence de la musique occidentale, puis s’est développé de façon indépendante au Japon. Après avoir été à la mode dans les années 1980, la City Pop connaît depuis quelque temps une nouvelle évaluation dans le monde entier. Je me propose d’étudier le phénomène, de son apparition à nos jours.

Le monde se tourne vers la City Pop

Cette redécouverte du genre City Pop ne tardera pas à s’étendre à l’étranger. Depuis le début des années 2010, les collectionneurs invétérés de raretés japonaises de City Pop se multiplièrent à l’étranger, non seulement via les plateformes d’enchères sur Internet, mais également physiquement : c’est ainsi qu’on commença à voir des fans étrangers arriver à Tokyo à la recherche de vinyles. Personne ne vit non plus un tel engouement après une émission de télévision qui présenta un acheteur étranger à la recherche de Sunshower, le disque de Ônuki Taeko. Le genre est également de plus en plus téléchargé via YouTube et SoundCloud. Par exemple, le tube « Plastic Love » de Takeuchi Mariya a dépassé les 20 millions de vues depuis sa mise en ligne sur YouTube en juillet 2017.

À gauche : Sunshower de Ônuki Taeko (1977). À droite : l’album Variety, contenant le chef-d'œuvre « Plastic Love » de Takeuchi Mariya (1984)

C’est ainsi que se propagea la popularité mondiale de la City Pop, des DJ à la recherche de sampling jusqu’aux musiciens. Des créateurs de sons américains venant de l’univers des DJ, comme Toro y Moi, en sont l’exemple parfait. L’auteur-compositeur-interprète brésilien Ed Motta possède une vaste collection de vinyles japonais. Ainsi, il reprit la chanson « Windy Lady » de Yamashita Tatsurô lors d’un concert au Japon, et déclara au cours d’une interview l’influence prépondérante qu’avait eu sur lui le genre City Pop. De même pour les Indonésiens Ikkubaru et les Thaïlandais de Polycat, qui ont récemment faits leurs débuts au Japon, intéressant phénomène de contre-export.

Certes, la génération qui connut la toute première émergence de la City Pop peut avoir une impression négative de ce renouveau, qui leur rappelle le rêve de la période de la bulle économique. Mais pour les plus jeunes, qui découvrent ce son, ce mix de différentes influences possède une fraîcheur unique. La réévaluation de la City Pop est également intéressante par l’audience hors des frontières japonaises qu’il apporte à ce mouvement musical. L’époque où la pop japonaise avait une image ringarde est bien finie ! La City Pop s’associe aujourd’hui à deux mots : « nouveau » et « cool ».

(Photo de titre : pochettes des disques emblématiques des années 1970-80)

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musique Showa pop

Kurimoto HitoshiArticles de l'auteur

 Journaliste musical. Né à Osaka en 1970. Commence à écrire ses premières critiques, alors qu’il est employé dans une maison de disques. Voyage en Amérique du sud à partir de 2005. À son retour au Japon deux ans plus tard, il collabore aux rubriques musiques ou voyages de divers magazines musicaux ou généralistes, ou assure la programmation et la sélection musicale pour des émissions de radio, performances et conférences, organisateur de concerts, planificateur de CD, etc. Auteur de plusieurs livres, dont « Carnets de musique argentine » (2003, éd. DU books) et « Carnets de voyage : Buenos Aires, objets et culture » (2008, Mainichi Communications). Réside actuellement à Okinawa.

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