Donner des couleurs à la gastronomie nippone

Faire découvrir la qualité des couteaux de cuisine japonais au monde entier

Culture Gastronomie

Le couteau de cuisine japonais wabôchô à la lame affûtée, fruit du savoir-faire du coutelier, est un outil indispensable dans la gastronomie japonaise. Avec ses deux boutiques de couteaux de cuisine traditionnels japonais à Osaka et à Tokyo, Bjorn Heiberg, lui-même grand passionné, se propose de faire connaître au monde entier l’attrait de ces ustensiles souvent méconnus.

Dans les pas des sabres japonais

Les régions productrices de couteaux de cuisine japonais sont souvent celles où l’on produisait autrefois des sabres japonais. Pendant les longues années de paix relative de l’époque d’Edo, puis après l’interdiction du port du sabre par l’édit de 1876 pendant l’ère Meiji, la demande en armes a considérablement baissé. C’est à cette époque que de nombreux artisans ont commencé à produire des lames à usage domestique, couteaux de cuisine ou ciseaux par exemple.

Ainsi, les couteaux de cuisine nippons ont hérité de la technique de fabrication des sabres, alliant une précision extrême dans la coupe et une grande résistance. Un acier coupant mais fragile est fixé sur une base souple et résistante aux chocs, et les deux métaux sont forgés et martelés plusieurs fois pour obtenir la lame finale. L’artisan l’affûte alors minutieusement puis fixe le manche préparé séparément : le couteau wabôchô est prêt.

Tout comme les sabres, de nombreux couteaux de cuisine wabôchô sont dotés d’une lame à un seul tranchant. Avec ce type de lame, la pointe tendant à tourner légèrement sur la gauche, les ingrédients coupés se détachent plus facilement de la lame et le travail est plus productif. Pour autant, l’une des choses qui distingue les wabôchô des autres couteaux, c’est leur diversité. Se déclinant quasiment à l’infini, ils peuvent prendre la forme de deba-bôchô utilisés pour lever des filets de poisson, de sashimi-bôchô pour trancher la chair du poisson ou de nakiri-bôchô pour couper les légumes. En effet, l’une des grandes différences entre les couteaux japonais et occidentaux est la variété des tailles et des types, adaptés aux ingrédients à couper.

À Tower Knives Osaka, les clients ont le choix parmi toute une gamme de couteaux wabôchô très différents. Les explications sont également disponibles en anglais.

Fujii Keiichi, l’un des rares artisans ayant le titre officiel de Maître des arts traditionnels au Japon

L’artisan coutelier Fujii Keiichi, lui-même originaire de Sakai, offre des démonstrations de fabrication des wabôchô à Tower Knives Osaka ; il espère faire connaître au monde entier les précieux couteaux de cuisine japonais.

« Il est vrai qu’il y a également de bons couteaux de cuisine ailleurs, en Allemagne par exemple, mais ils sont souvent faits pour couper en grosses rondelles des ingrédients durs tels que des pommes de terre ou des carottes. Ce sont des couteaux adaptés à la cuisine allemande. Bien entendu, ces couteaux ne sont pas adéquats pour le katsuramuki, une technique consistant à peler très finement un radis ou un concombre en entier, de façon à obtenir une longue et fine feuille de légume. L’évolution du wabôchô s’est faite en réponse aux exigences du washoku, qui nécessite des processus très délicats, et a mené à la fabrication de lames ayant chacune leurs caractéristiques propres. Je pense que cette diversité propre aux wabôchô enrichira les gastronomies variées du monde entier. »

Ne pas laisser une culture se perdre

Alors que les exportations de wabôchô ont augmenté ces dernières années, la demande dans l’Archipel, elle, régresse. Les wabôchô fabriqués par des artisans traditionnels sont plus coûteux et les lames sont tellement tranchantes qu’elles sont fragiles et s’émoussent facilement. Les wabôchô doivent donc être aiguisés régulièrement. Les couteaux en acier inoxydable de style occidental sont en comparaison moins chers et plus faciles à entretenir.

« Un couteau de cuisine, vous vous en servez tous les jours », explique Bjorn Heiberg. « Si votre couteau coupe bien, le temps de préparation des aliments est plus court et la cuisine elle-même plus agréable. Aiguiser un wabôchô de temps à autre ne demande ni temps ni efforts. Le problème est qu’un grand nombre de magasins vendent ces couteaux sans expliquer comment bien les entretenir et combien il est important de le faire. Si vous entretenez avec soin un wabôchô, vous pourrez l’utiliser pendant des années. Choisir un couteau bon marché que vous allez jeter juste parce qu’il commence à vieillir équivaut à laisser se perdre une culture inestimable. »

À l’intérieur de la boutique, l’artisan Kobayashi Hiroki, originaire de la ville de Seki dans la préfecture de Gifu, montre comment affûter un wabôchô.

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