Les grandes figures historiques du Japon

Sakamoto Ryôma, héros mythique de l’histoire du Japon moderne

Culture

Il y a un siècle et demi, Sakamoto Ryôma (1836-1867) a joué un rôle clé dans l’histoire du Japon moderne en négociant une alliance entre les fiefs de Satsuma et de Chôshû en vue de renverser le shôgunat et rendre le pouvoir à l’empereur. Mais il n’a pas eu le temps de voir ses efforts aboutir, ayant été assassiné en 1867, à l’âge de 31 ans. Le 150e anniversaire de la mort de ce héros particulièrement cher au cœur des Japonais a été marqué par toutes sortes de manifestations. Nous vous proposons de découvrir le parcours étonnant d’un homme qui, bien que né dans une famille de guerriers de rang modeste, a eu une influence décisive sur l’instauration d’un État moderne dans l’Archipel.

Le disciple de la personne la plus importante du Japon

En 1862, Sakamoto Ryôma fait la connaissance – par l’intermédiaire du daimyô Matsudaira Yoshinaga (alias Shungaku) – de Katsu Kaishû (1823-1899), un fonctionnaire de haut rang du shogunat qu’il avait dans un premier temps envisagé d’assassiner. Deux ans plus tôt, Katsu Kaishû avait commandé le Kanrin maru, le navire envoyé par le shôgun à San Francisco pour y signer un traité de commerce et d’amitié. Il repère tout de suite les qualités de Sakamoto Ryôma et réussit à le convaincre que le Japon a tout intérêt à chercher à s’instruire auprès des autres pays plutôt que d’afficher une attitude farouchement hostile.

Un an plus tard, le shôgun donne l’autorisation à Katsu Kaishû de créer une école navale à Kobe ainsi qu’une académie privée de jeunes disciples dont la direction a été confiée à Sakamoto Ryôma.

Fac-similé de la première lettre envoyée par Sakamoto Ryôma à sa sœur Otome en 1862, quand il a quitté le fief de Tosa sans autorisation. La flèche rouge en bas à droite indique le début du passage où le jeune guerrier explique qu’il « est devenu le disciple de Katsu Kaishû, la personne la plus importante du Japon ».

Peu après, le fief de Chôshû défie le shôgun en bombardant des navires notamment américains et français dans le détroit de Shimonoseki. Quand il apprend que les bateaux étrangers endommagés à cette occasion sont réparés par le bakufu (le gouvernement japonais) à Edo avant de reprendre la mer pour affronter le fief Chôshû, Sakamoto Ryôma a l’impression que son pays se trouve au bord du gouffre. C’est alors qu’il écrit sa célèbre phrase « Je veux nettoyer le Japon », dans une lettre adressée à sa sœur Otome.

Le shôgun, de plus en plus aux abois, finit par se méfier de Katsu Kaishû à cause de son indépendance d’esprit. En 1864, il lui retire son poste d’ingénieur en chef de la marine et le rappelle à Edo. Et l’année suivante, il ferme l’École navale de Kobe.

Fac-similé de la lettre de Sakamoto Ryôma à sa sœur Otome où il dit « Je veux nettoyer le Japon ». La flèche rouge en haut à droite indique l’emplacement du début de la phrase.

L’alliance entre les fiefs de Satsuma et Chôshû 

Le plus haut fait de Sakamoto Ryôma est la négociation, en 1866, d’une alliance entre les deux puissants fiefs, alors rivaux, de Satsuma (actuelle préfecture de Kagoshima) et de Chôshû.

Ces deux fiefs, qui ont joué un rôle de première importance dans la fin du shogunat (1853-1867), ont au départ des positions opposées. Celui de Satsuma, plus modéré, est favorable à l’ouverture des ports aux étrangers et souhaite unifier le pays dans le cadre d’une alliance entre le bakufu et les fiefs les plus importants. Le fief de Chôshû soutient en revanche les idées très radicales du mouvement sonnô jôi.

Mais l’intransigeance de plus en plus grande du régime shogunal finit par inciter Ôkubo Toshimichi et Saigô Takamori, deux des hommes forts du fief de Satsuma, à changer de camp. Si bien que lorsque le shôgun lance une première expédition punitive contre le fief de Chôshû, en 1865, celui de Satsuma refuse de s’y joindre. Sakamoto Ryôma fait part ensuite de cette décision aux dirigeants de Chôshû, un pas décisif vers un rapprochement entre les deux fiefs.

En 1866, Satsuma et Chôshû scellent une alliance grâce à la médiation de Sakamoto Ryôma, alliance par laquelle ils entendent unifier le pays, quitte à entrer en conflit avec le shôgun et à le renverser. Cet accord a considérablement aggravé la menace qui pesait sur le régime instauré en 1603 par Tokugawa Ieyasu (1544-1616).

L’alliance entre Satsuma et Chôshû est secrète et ne repose que sur une entente verbale entre les deux parties. Mais Kido Takayoshi, un guerrier de Chôshû, transcrit par écrit les six clauses qu’elle comporte et envoie le tout à Sakamoto Ryôma qui confirme son accord à l’encre rouge au dos de ce document.

Fac-similé du document par lequel Sakamoto Ryôma approuve les six clauses de l’alliance entre les fiefs de Satsuma et Chôshû à l’encre rouge, sur l’envers du texte.

Suite > Une conception entièrement nouvelle de l’État japonais

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