
Les différents courants de l'animation japonaise
« Evangelion », ou la consécration mondiale d’un chef-d’œuvre
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Une œuvre construite autour des aspirations de l’être humain.
Mais ce qui est extrêmement mystérieux concernant Evangelion, c’est que durant toutes ces années, plus on essaie de l’analyser en profondeur, d’en fournir une description concrète, plus on comprend qu’il peut y avoir de multiples interprétations du contenu. Il est impossible de partager les mêmes points de vue ! On peut dire qu’il existe autant d’explications d’Evangelion que de spectateurs de la série… Et si vous écoutiez celui de votre interlocuteur, vous aurez l’impression de ne pas avoir vu le même film ! Cela donne une idée de la complexité et de la richesse des éléments de cette œuvre.
En particulier, nous pouvons dire que le récit et l’agencement de l’œuvre servent de « miroir » pour le spectateur, en reflétant son âme, ses désirs profonds. Ce reflet peut ainsi prendre une forme différente selon la personne. Cet effet miroir apparaît notamment de façon aiguë chez les deux héroïnes qui pilotent l’EVA. D’un côté Ayanami Rei, une figure silencieuse, rationnelle, au cœur limpide, que la blancheur de son body-suit représente. De l’autre côté, la passion vive et l’action, le mouvement, symbolisés par la couleur rouge de la combinaison d’Asuka. La façon dont un spectateur porte son intérêt envers ces deux personnages opposés permet au final de lire dans son cœur…
C’est sans doute ce qui explique l’envie de tous les spectateurs de parler d’Evangelion autour d’eux, et qu’il suffit de lancer le sujet pour que la discussion ne s’épuise jamais. Grâce à la structure de l’œuvre, chacun peut vraiment avoir l’impression qu’Evangelion est réellement un anime conçu pour soi. Inutile alors d’ajouter que cela augmente fabuleusement le niveau de satisfaction et d’appréciation de la série… Le titre est donc devenu un outil de communication et d’interaction entre les spectateurs dont je ne vois personnellement aucun autre exemple.
L’univers multicouche d’Evangelion
Une personne qui voit les images d’Evangelion pour la première fois est sans aucun doute immédiatement surpris par la quantité extraordinaire d’informations, ainsi que la puissance radicale du graphisme et de l’expression des émotions. Je ne parle pas du simple degré de détail des images. Evangelion joue de façon frontale sur le contraste entre une « pléthore d’informations » et un « défaut d’informations ». Et c’est sur ce second point que l’imagination des spectateurs est mise grandement à contribution.
Une autre caractéristique d’Evangelion tient à la structure multicouche de sa narration. Qui parle ? De quel point de vue ? Les points de vue narratifs se développent parallèlement de façon plurielle. Il y a le point de vue des garçons et des filles qui pilotent les machines, le point de vue de leurs supérieurs directs ou de ceux encore au-dessus, etc… Or, le spectateur s’aperçoit assez rapidement d’un décalage entre les informations qu’il obtient en fonction des différents personnages. L’univers d’Evangelion lui apparaît comme à travers les mailles d’un filet, et il se trouve immergé dans une fiction qui médiatise son désir d’utiliser son imagination. C’est bien cette participation de l’observateur au monde d’Evangelion par l’imaginaire, comme devant un prisme ou un kaléidoscope, qui rassemble encore de nouveaux fans, 25 ans après sa première sortie.
Tout cela est le produit de divers éléments mis en œuvre avec une seule priorité : la satisfaction du spectateur. Aussi bien les personnages que les machines, jusqu’au logo de l’organisation NERV, tout possède un niveau très sophistiqué de design, contribuant à faire naître une vraie « marque Evangelion ». Grâce à ce subtil effet psychologique, les gens reconnaissent spontanément l’univers d’Evangelion par la seule combinaison de couleurs, sans aucun dessin explicite de personnage. C’est ainsi que sont apparus par exemple des trains à grande vitesse Shinkansen aux couleurs d’Evangelion. Il ne s’agit donc plus d’une simple consommation du contenu, mais d’une véritable utilisation publique de très haut niveau que seul une œuvre telle qu’Evangelion peut permettre.
La diffusion mondiale de la série originale est donc une excellente occasion de mesurer la puissance de cette œuvre à une échelle globale, sur un environnement vierge. Nous pourrons alors juger également l’impact réel de l’animation japonaise. D’autre part, la sortie du quatrième volet de la tétralogie des longs métrages Evangelion en salle, Shin Evangelion, est annoncée pour 2020. En vue du terme annoncé de cette œuvre, cet événement est donc le moment idéal pour commencer à se retourner sur le passé et le chemin parcouru. Nul doute qu’Evangelion nous apportera de nouvelles découvertes, aussi bien par son rapport à l’époque actuelle que par ce que l’œuvre nous dit des nouveaux spectateurs, leur âge comme leur motivation et leur point de vue. L’expérience Evangelion est pleine de surprise et de plaisir. Alors, attendons-nous au meilleur !
(Bannière : Ayanami Rei et Ikari Shinji d’Evangelion © khara/Project Eva.)