
Les différents courants de l'animation japonaise
Les tout premiers dessins animés japonais : un trésor à voir absolument
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Le 22 février 2017, le National Film Center (NFC) – l’équivalent de la Cinémathèque française – du Musée national d’art moderne de Tokyo a créé un site web pour commémorer le centième anniversaire de l’animation japonaise. Ce site appelé « Japanese Animated Film Classics » met à la disposition d’un large public 64 courts métrages réalisés entre 1917 et 1941, et souvent dotés de sous-titres en anglais. Les internautes peuvent effectuer des recherches sur ces films d’animation en consultant les rubriques où ils sont classés par catégorie et par date, ainsi que la liste des réalisateurs.
Des découvertes miraculeuses
Le film d’animation le plus ancien mis en ligne par le centre national du film date de 1917. Il a pour titre Namakura-gatana/The Dull Sword (Le sabre émoussé) et a été réalisé par Kôchi Junichi (1886-1970). C’est aussi le plus vieux dessin animé japonais qui ait été conservé. L’industrie encore naissante du film d’animation a été très durement touchée par le grand tremblement de terre qui a dévasté la région du Kantô (comprenant Tokyo) en 1923. Une grande partie des tout premiers dessins animés ont été détruits à cette occasion. Namakura-gatana a été retrouvé en 2007 sur un marché aux antiquités par un historien du cinéma d’Osaka. Et en 2014, il a fait l’objet d’un métrage additionnel.
Le film dure quatre minutes. On y voit un samurai grimaçant acheter un nouveau sabre et se mettre en devoir de tester son efficacité. Cette œuvre se signale par une amusante irrévérence vis-à-vis des héros japonais du temps jadis. En effet, les pièges tendus par le guerrier à des passants innocents n’aboutissent jamais au résultat escompté. Si l’animation proprement dite reste souvent rudimentaire, les effets d’ombres de la dernière séquence sont particulièrement remarquables.
Namakura-gatana (The Dull Sword) de Kôchi Junichi, 1917. Version longue, restaurée numériquement (avec l’aimable autorisation du National Film Center)
Outre Namakura-gatana, le site du NFC propose un second dessin animé antérieur à 1924. Il s’agit d’Urashima Tarô réalisé en 1918 par un animateur dont on ne connaît pas le nom. Ce film qui ne dure qu’une minute a été retrouvé sur un marché en même temps que Namakura-gatana. Il évoque l’histoire du héros d’un des grands classiques des légendes japonaises, souvent comparée à celle de Rip Van Winkle racontée par l’écrivain américain Washington Irving (1765-1859).
Norakuro, le chien-soldat
Le site Japanese Animated Film Classics contient par ailleurs 23 films de Murata Yasuji (1896-1966), l’animateur le plus représenté avec plus d’un tiers de l’ensemble des œuvres mises en ligne. Parmi eux figurent trois dessins animés consacrés à Norakuro, un chien errant noir et blanc qui devient soldat dans une armée de chiens. À l’origine, ce personnage est une création du mangaka Tagawa Suihô (1899-1989) qui a eu un énorme succès dans les années 1930, quand le Japon était en guerre avec la Chine. Au fil du temps, cette série comique a fini par se transformer en un véritable outil de propagande.
Norakuro gochô (Corporal Norakuro) de Murata Yasuji, 1934 (avec l’aimable autorisation du National Film Center)
Le changement est particulièrement évident quand on compare les trois dessins animés en question. Dans les deux premiers, sortis dans les salles de l’Archipel en 1933, le chien-soldat est maladroit au point d’en être comique. Mais dans le troisième – Norakuro gochô/Corporal Norakuro (Le caporal Norakuro) projeté sur les écrans en 1934 –, Norakuro fait preuve d’un tempérament nettement plus héroïque, où il déjoue un plan de l’ennemi. Murata Yasuji est également l’auteur de films nettement moins engagés du point de vue politique, comme Dôbutsu orinpikku taikai (Les Jeux olympiques des animaux), qui date de 1928.