Sous le feuillage des arbres géants du Japon
Les arbres géants des îles japonaises
Visiterle Japon
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L’archipel nippon est composé de plus de 6 000 îles, dont certaines possèdent de grands arbres. Les îles Oki (préfecture de Shimane) et l’île de Mikurajima (préfecture de Tokyo) sont connues parmi les amateurs pour son grand nombre d’arbres géants. De plus en plus d’administrations locales voient en eux un moyen de développer l’attractivité de leur île.
Le Jômon sugi de Yakushima, leader incontesté de cette forêt primaire inscrite au patrimoine de l’humanité de l’Unesco, est l’une de ces stars des îles. Découvert en 1966, son âge est évalué à environ 7 200 ans. Sa notoriété s’est rapidement étendue dans tout le pays.
D’autres géants existent ailleurs, aussi bien dans l’île de Tsushima ou de l’archipel des Gotô (préfecture de Nagasaki), lesquelles se trouvent sur la route par laquelle le ginkgo s’est introduit au Japon depuis la péninsule coréenne, que dans les îles de la mer intérieure de Seto, grâce à l’environnement favorable d’un climat doux. Leur éloignement par rapport aux grandes villes est aussi vraisemblablement un facteur favorisant leur vigueur et leur santé. J’en ai sélectionné trois.
Le Jômon sugi (île de Yakushima, préfecture de Kagoshima)
Espèce : cèdre du Japon (Cryptomeria japonica)
Localisation : Miyanoura, Yakushima-chô, Kumage-gun, Kagoshima-ken 891-4205
Circonférence : 16,1 m, hauteur : 30 m, âge : plus de 2 000 ans
Patrimoine naturel du Japon (l’ensemble des cryptomerias de l’île)
Taille ★★★★★
Vigueur ★★★
Forme ★★★
Branchage ★★
Majesté ★★★★★
Cet arbre est sans aucun doute le cèdre le plus célèbre du Japon. Sa popularité a fait un bond en 1993 quand l’île de Yakushima a été enregistrée au patrimoine mondial de l’Unesco.
Il n’est d’ailleurs pas le seul à prétendre au titre de plus gros sugi du Japon. Cependant, ses homologues sont généralement des arbres issus de fusions de plusieurs troncs. Mais le Jômon sugi, lui, se dresse uniquement sur son tronc principal, et dans cette catégorie, il n’a aucun rival à sa taille. Alors, admettons-le une fois pour toute : le plus gros cèdre du Japon, c’est lui !
Si l’image du cèdre du Japon est généralement celle d’un arbre élancé et droit, le Jômon sugi est tout autre. Il n’est pas si haut que cela et son tronc est extrêmement trapu. Ses branches irrégulières sont également caractéristiques de la variété endémique des cèdres de Yakushima (Yaku sugi), dans leur environnement très exposé aux typhons. Les nœuds et irrégularités à la surface de son tronc lui ont certainement permis d’échapper à l’abattage pour en faire du bois de charpente au cours des siècles passés.
À l’époque de sa découverte, son âge avait été estimé à 7 200 ans. Plus tard, la mesure au carbone radioactif avait donné un résultat de 2 170 ans. Quoi qu’il en soit, comme son cœur est creux, il n’est pas possible de connaître son âge de façon précise. Mais il est maintenant admis qu’il n’avait pas moins de 2 000 ans.
Je l’ai vu pour la première fois il y a 26 ans, à une époque où les touristes étaient encore peu nombreux à Yakushima, ce qui m’avait permis de l’observer à ma guise. Il était encore possible d’aller jusqu’à son pied et de toucher son tronc. Mais depuis, la forêt primaire environnante a été éclaircie afin de rendre le Jômon sugi plus visible, ce qui a fragilisé le sédiment à son pied, qui s’éboule progressivement. Le piétinement permanent des visiteurs à sa base a donné lieu à des inquiétudes sur sa vigueur déclinante. À l’époque, l’une des mesures mise en place avait été de faire appel aux touristes eux-mêmes, qui étaient invités à apporter chacun une poignée de terre pour enrichir son pied. Jusqu’à ce qu’enfin, en 1996, une plateforme soit mise en place jusqu’à 10 mètres de l’arbre, avec interdiction de franchir cette limite et de s’approcher du tronc.
Les 10 heures de randonnée aller-retour pour l’atteindre font partie intégrante de ce sentiment d’accomplissement que l’on ressent quand on le découvre enfin. L’impression est réellement intense. Attendez-vous à vous sentir tout petit devant la majesté de ce survivant du temps.
Le shinpaku du temple Hôshôin (île de Shôdoshima, préfecture de Kagawa)
Espèce : shinpaku / byakushin / genévrier de Chine (Juniperus chinensis)
Localisation : 412, Kamishô Kitayama, Tonoshô-chô, Shôzu-gun, Kagawa-ken 761-4122
Circonférence : 17,3 m, hauteur : 17,5 m, âge : 1 500 ans
Patrimoine naturel du Japon (l’ensemble des cryptomerias de l’île)
Taille ★★★★★
Vigueur ★★★★★
Forme ★★★★
Branchage ★★★★★
Majesté ★★★★★
L’île de Shôdoshima est la seconde plus grande île de la mer intérieure de Seto après l’île d’Awaji, pour une population d’environ 30 000 habitants. Célèbre pour sa production d’olives, c’est également un endroit qui vaut le détour pour les amateurs d’arbres géants. En particulier pour le genévrier du temple Hôshôin. On y accède à partir de Tonoshô, le port d’entrée de l’île. À 1,5 kilomètre du centre-ville, à main gauche, vous trouverez le Hôshôin.
On peut aisément affirmer qu’il s’agit là du plus grand genévrier de Chine (shinpaku ou byakushin) de tout le Japon. Son tronc est d’une structure si complexe qu’il permet difficilement de juger comment s’est effectuée sa croissance. La face interne des troncs principaux correspond trop exactement à celle du tronc en vis-à-vis pour que cela soit dû au hasard. Ce serait-il donc déchiré sous son propre poids avant de continuer à croître ainsi ? C’est en tout cas la théorie formulée en 2015 par un médecin des arbres.
Son tronc étant multiple, sa circonférence est difficile à évaluer. Mais pour ce qui est de sa circonférence au sol, en amont de la division, elle est déjà de 17,3 mètres. Généralement, les arbres de cette espèce s’affaiblissent quand ils deviennent trop grands, mais celui-ci n’a pas encore achevé sa phase de croissance. De tous les conifères qui poussent au Japon, il est certainement le seul à posséder une canopée de cette taille.
On dit qu’il aurait été planté de la main de l’empereur Ôjin, dont on présume qu’il a pu régner au IVe siècle de l’ère commune. Cela lui ferait un âge de plus de 1 600 ans. Il est l’un des neuf arbres désignés patrimoine naturel du Japon : autant dire que c’est un véritable trésor national. Si je devais citer seulement trois arbres géants dans tout le pays, il en ferait certainement partie.
(Voir également notre article : L’île de Shôdoshima : une entrée dans le monde de l’art et du sacré)
Le grand camphrier de Shishijima (île de Shishijima, préfecture de Kagawa)
Espèce : camphrier (Cinnamomum camphora)
Localisation : 172, Shishijima, Takuma-chô, Mitoyo-shi, Kagawa-ken 769-1109
Circonférence : 11,64 m, hauteur : 28 m, âge : 1 200 ans
Patrimoine naturel du Japon (l’ensemble des cryptomerias de l’île)
Taille ★★★★★
Vigueur ★★★★★
Forme ★★★★★
Branchage ★★★★★
Majesté ★★★★
L’île de Shishijima, 3,8 kilomètres de circonférence, est située à 5,5 kilomètres au nord-ouest du port de Takuma, relevant de la ville de Mitoyo, préfecture de Kagawa. L’île, réputée pour être une excellente zone de pêche, comptait plus de 1 000 habitants à son apogée. Cependant, depuis le miracle industriel, le dépeuplement se fait de plus en plus sévère, et l’île ne compterait plus qu’une grosse dizaine d’habitants. L’île est paisible et peu fréquentée, mais les panneaux indicateurs judicieusement disposés permettent d’atteindre sans encombre le lieu où pousse cet énorme camphrier. À partir du port, après avoir traversé le village, il faut compter 20 minutes de chemin assez raide. Le camphrier possède une forme magnifique, très émouvante, du fait de ses branches basses très étendues, presque au ras du sol, qui semblent accueillir les visiteurs à bras ouverts. Son tronc absolument plein prouve sa vigueur intacte.
La forme étrange de la partie entre la base des racines et la division des premières branches a son explication : un glissement de terrain, il y a très longtemps, a enterré le camphrier, dont les racines, aujourd’hui, se trouvent en fait cinq mètres sous terre. Autrement dit, Il était autrefois encore plus grand que ce qu’il n’est aujourd’hui. J’aurais aimé le voir à cette époque !
Le camphrier et ses alentours sont parfaitement entretenus et son environnement est resté exactement dans son état original. Plus d’une trentaine de bénévoles se relaient pour son entretien et sa préservation. Le panorama de collines pittoresques descendant doucement vers la mer intérieure est magnifique, et il semble que le temps ici se soit arrêté. S’il ne fallait garder à l’esprit l’heure du bateau de retour, on aimerait bien y rester des heures à l’admirer.
(Voir également notre article : Shishijima : une île naturelle merveilleuse perdue dans le temps)
(Texte et photos : Takahashi Hiroshi)