Quand gourmandise rime avec plaisir
La délicate douceur du sucre japonais « wasanbon »
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Depuis que la cuisine japonaise traditionnelle, ou washoku, a été ajoutée à la liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’Unesco en 2013, les friandises japonaises, rassemblées sous l’appellation de wagashi, ont fait l’objet d’un intérêt accru. Ces gâteaux typiquement japonais, qui accompagnent à merveille le thé vert, sont populaires depuis l’époque d’Edo (1603-1868), non seulement pour leur saveur mais également pour la beauté de leur apparence.
Le sucre wasanbon a joué un rôle important dans le développement des wagashi et a longtemps été confectionné dans les préfectures de Tokushima et de Kagawa, dans l’est de Shikoku. Durant l’époque d’Edo, lorsque le sucre blanc que l’on utilise d’ordinaire de nos jours était difficile à obtenir, c’est la douceur discrète du wasanbon et son arôme léger qui donnaient aux wagashi leur saveur délicate. Ses grains d’or pâle ont une grande finesse et fondent en bouche.
La partie sanbon du nom, qui signifie littéralement « trois plateaux », fait référence aux trois étapes de pétrissage à l’eau sur des plateaux pendant le procédé de raffinage usuel qui donne au sucre sa haute qualité. Comme dans les mots wagashi et washoku, la partie wa signifie Japon. Pour la petite histoire, avant que le wasanbon ne fasse son apparition, l’aliment le plus sucré du Japon était, semble-t-il, le kaki.
Une spécialité locale
Un habitant de Tokushima a amené la canne sucre dite chikutô – à partir de laquelle le wasanbon est réalisé – de la préfecture de Miyazaki à Kyûshû jusqu’à Shikoku, il y a plus de deux siècles. Le sucre devient alors une spécialité locale mais, après la fin de la Seconde Guerre mondiale, le sucre raffiné à bas prix commence à être importé. Le manque de grandes superficies disponibles pour la culture de la canne et la complexité du processus de raffinage entravent la compétitivité des fabricants de wasanbon et la production décline très rapidement en résultat. Mais, même dans ces conditions, le sucre produit nationalement continue à être utilisé pour les wagashi et les techniques traditionnelles de raffinage du wasanbon sont encore employées de nos jours.
Les variétés de sucre provenant des préfectures de Tokushima et de Kagawa sont appelées respectivement Awa wasanbon et Sanuki wasanbon, d’après l’ancien nom des provinces de cette région. Ces deux types de sucre sont de précieuses ressources locales, essentielles pour la confection des gâteaux japonais haut de gamme comme les gâteaux secs nommés rakugan. Presque la totalité du sucre produit est fournie à de célèbres pâtisseries de wagashi de longue tradition.
La visite d’une raffinerie de sucre
J’ai visité la raffinerie de sucre Hattori à Awa, préfecture de Tokushima, qui utilise encore les méthodes traditionnelles pour chacune des étapes du procédé de production, de la culture de la canne à sucre jusqu’au traitement du wasanbon. Devant la raffinerie, s’étendent de vastes champs de canne à sucre chikutô où la plante est cultivée biologiquement et récoltée manuellement. Sa culture va du printemps à l’automne, alors que le raffinage a lieu à l’intérieur des installations pendant l’hiver.
La saveur du wasanbon s’apprécie le mieux dans les gâteaux secs réalisés simplement en pressant le sucre dans un moule. Les gâteaux en vente sur le marché contiennent d’autres ingrédients pour consolider le sucre et éviter qu’il ne se désintègre pendant le transport. La seule possibilité de déguster des gâteaux entièrement réalisés avec du sucre wasanbon est donc de les faire vous-même. J’ai essayé de faire mes propres gâteaux 100% wasanbon à la raffinerie, en compagnie d’une famille venue d’Hiroshima qui voulait que ses enfants fassent l’expérience de la culture japonaise traditionnelle.
Pour réaliser les gâteaux, nous avons tout d’abord mis du wasanbon dans un bol ; sa texture douce et sèche était plaisante au toucher. Nous l’avons aspergé d’eau avec un vaporisateur pour agglomérer le sucre. Nous avons ensuite procédé au mélange pour que l’eau enduise uniformément tous les grains, puis au tamisage pour séparer de nouveau les grains.
Comme un jeu avec de la pâte à modeler
L’étape suivante consistait à donner forme au sucre en utilisant un moule en bois. Les cavités délicatement gravées du moule sont si jolies qu’elles semblent appartenir à un monde magique.
Nous avons mis le wasanbon dans le moule et l’avons pressé de nos doigts et de nos paumes. C’était comme un jeu avec de la pâte à modeler et les enfants étaient tout joyeux de pousser le sucre dans les moules avec leurs petites mains. Après beaucoup d’efforts, le temps est venu de retirer le sucre en frappant sur le moule en bois et en le retournant, doucement et avec précaution. Les gâteaux qui en sortent sont finement dessinés, simples et élégants.
Lorsque j’ai mis le gâteau sur ma langue, j’ai aspiré profondément et j’ai pu sentir l’arôme subtil du sucre wasanbon. Au fur et à mesure que la friandise fondait, sa douceur délicate s’est répandue dans ma bouche. Devant mes paupières, les jeunes tiges de canne à sucre des champs de chikutô se balançaient nonchalamment dans le vent.
(Texte de Yoshimoto Naoko. Photos : Nakano Haruo. Remerciement à la raffinerie de sucre Hattori)
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