La modernité de l’esthétique traditionnelle

« Washi », le papier japonais qui dure mille ans

Culture

Le 27 novembre 2014, l’Unesco a inscrit le papier japonais, le washi, sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité en tant que « savoir-faire du papier artisanal japonais ». Les techniques de fabrication du papier sont arrivées de Chine au Japon aux alentours du VIIe siècle. L’histoire du washi a donc commencé il y a au moins 1 300 ans. Les caractéristiques climatiques et géographiques ont ensuite contribué à l’apparition d’une grande variété de types de papier fabriqués à la main dans différentes régions de l’Archipel.

Le washi de la province d’Echizen : un papier qui dure mille ans

En dépit de ces changements dramatiques, certains types de washi ont survécu jusqu’à nos jours. C’est le cas du torinoko fabriqué dans l’ancienne province d’Echizen qui correspond à la partie nord de l’actuelle préfecture de Fukui. Le torinoko a la réputation d’avoir une durée de vie de mille ans. Une telle affirmation peut paraître à première vue surprenante, le papier étant a priori un matériau fragile qui se désintègre une fois mouillé et s’enflamme facilement pour peu qu’on le laisse à proximité d’une source de chaleur. Comment pourrait-il durer pendant un millénaire ?

Selon un passage du Wakan sansai zue (Encyclopédie illustrée des trois niveaux des matériaux de l’univers, en Chine et au Japon) de 1712, le torinoko « se prête vraiment à l’écriture car il est bien lisse, résistant, et il a une durée de vie très longue. Au point qu’on pourrait l’appeler le roi des papiers ».

Le torinoko doit son toucher moelleux au ganpi, la plante à partir de laquelle il est élaboré. Autrefois, il était très apprécié pour sa robustesse par les familles de l’aristocratie et les guerriers. Le mot torinoko (littéralement « enfant oiseau ») ferait référence à sa couleur délicate, coquille d’œuf. Il est resté le même depuis les temps anciens au même titre que les méthodes auxquelles il correspond.

Le quartier d’Ôtaki dans la ville d’Imadate (préfecture de Fukui) est spécialisé depuis des siècles dans la fabrication du papier d’Echizen. Les ateliers sont installés au bord d’une rivière aux eaux cristallines, dans une vallée de montagne. L’un d’eux, dirigé par Iwama Heizaburô, fabrique non seulement du torinoko mais aussi d’autres types de washi élaborés avec des plantes comme le kôzo ou le mitsumata.

Après avoir travaillé des années ensemble, ces deux ouvrières soulèvent une immense feuille de papier sans difficulté et avec des mouvements parfaitement synchronisés. Chaque feuille est séparée des autres par une bande de tissu de façon à pouvoir la détacher plus facilement une fois sèche. L’atelier est équipé d’une grue permettant de soulever le cadre très pesant utilisé pour les feuilles de grand format.

Pendant l’époque d’Edo (1603-1868), les ateliers d’Imadate ont produit du papier de haute qualité pour les shôgun Tokugawa et leur famille. Le washi d’Imadate a aussi servi à la fabrication des billets de banque émis par les autorités de l’époque Meiji (1868-1912) et par la suite, pour les coupures de 100 yens restées en circulation jusque dans les années 1940.

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