Quand gourmandise rime avec plaisir
Les prunes salées « umeboshi » peuvent-elles être appréciées hors du Japon ?
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Les umeboshi, loin d’avoir la cote à l’étranger
La province Kii (l’actuelle préfecture de Wakayama) est depuis toujours le lieu de production par excellence de l’umeboshi. C’est de là notamment que proviennent les nanko-ume, une variété de prunes de première classe.
La société Shôkibai, dont la siège se trouve dans la ville de Wakayama, propose des umeboshi de grande qualité en emballage individuel et rencontre un franc succès notamment lors des périodes d’échanges de cadeaux.
Afin de faire apprécier les umeboshi à l’étranger, Suzuki Takafumi, le responsable des ventes de Shôkibai, avait participé à un salon gastronomique en Turquie. Malheureusement bien loin de ses espérances, de nombreux visiteurs avaient recraché les umeboshi, prétextant que c’était immangeable. Un vrai choc pour M. Suzuki.
Mais M. Suzuki ne se laisse pas abattre. Il envisage encore à l’heure actuelle de faire apprécier les umeboshi en dehors du Japon car il est convaincu que leur saveur, bien sûr, mais également leurs bienfaits pour la santé seront aussi reconnus à l’étranger.
« Autrefois, les étrangers n’aimaient pas le wasabi ou le gari (gingembre mariné). Mais grâce au succès des sushis dans le monde entier, ils sont maintenant appréciés aux quatre coins de la planète. En accommodant les umeboshi et les plats et recettes utilisant ces prunes salées, elles trouveront très facilement leur place sur les marchés à l’étranger. La popularité au-delà des frontières de l’Archipel de la cuisine japonaise, ou washoku, s’explique notamment par ses bienfaits pour la santé. Si les nombreuses vertus des umeboshi se font également connaître à l’étranger, ce sera à n’en pas douter le début d’une longue histoire à succès. »
Quand acidité rime avec santé
Au Japon, les umeboshi, ont depuis longtemps fait leurs preuves en tant qu’alliés de la santé : elles vous redonnent des forces quand nous n’en avons plus, peuvent se conserver longtemps ou encore aider à se prémunir contre le rhume, etc. À l’époque Heian (794-1185), les umeboshi étaient utilisées en tant que médicaments, puis à l’époque Sengoku (l’époque des Provinces combattantes, fin du XVe s.-fin XVIe s.), mélangées à de la poudre de riz et à des cristaux de sucre pour faire des umeboshigan, vivres de réserve pour les guerriers.
Cependant, même encore à l’heure actuelle, peu connaissent les diverses propriétés de cet aliment. C’est pourquoi, à Minabe-machi, où les cultivateurs de prunes sont nombreux, on ne ménage pas ses efforts pour faire connaître les umeboshi. Dans la mairie de la ville, la « section ume » s’occupe d’organiser des événements dans le but de faire connaître les mille et un attraits des prunes. Un manga décrivant les vertus bienfaitrices de ces fruits salés est même publié par la mairie.
Les umeboshi doivent leur acidité à l’acide citrique qu’elles contiennent. Une prune, si petite qu’elle soit, contient 2 à 3 fois plus d’acide citrique qu’un citron.
L’acide citrique a pour propriété de fluidifier le sang, de renforcer le système immunitaire et ainsi de permettre au corps d’être moins sujet aux rhumes ou à la grippe. L’acide citrique est également connu pour réduire les méfaits de la bactérie pylori pouvant être notamment à l’origine de gastrites, d’ulcères ou de cancers de l’estomac. Il est également efficace pour récupérer des forces lors des épisodes de fatigue. En effet, en activant le métabolisme énergétique, il décompose l’acide lactique responsable de cette fatigue et provoque son évacuation.
Pourquoi les umeboshi sont-ils si salés ?
Si les umeboshi permettent de conserver d’autres aliments, c’est grâce à l’acide benzoïque qu’elles contiennent. Grâce à ses propriétés antibactériennes et bactériostatiques, il empêche la prolifération des moisissures. Et c’est pour cela que l’on trouve un umeboshi posé sur le riz contenu dans les boîtes-repas (bentô) à consommer pour la journée, ou encore à l’intérieur d’une boulette de riz onigiri.
La saveur acide des umeboshi favorise la sécrétion de la salive, qui elle-même stimule l’appétit et a un effet antibactérien. La salive, tout comme la bave des bébés, est composée de parotine, une hormone efficace contre les effets du vieillissement dont la sécrétion en est alors stimulée. Mais ce n’est pas tout. Riches en polyphénols, elles permettent de lutter contre le diabète, elles empêchent l’augmentation de la pression artérielle et préviennent l’artériosclérose. Enfin, elles favorisent l’absorption du calcium. De récentes études ont par ailleurs démontré que les umeboshi
, une fois chauffés, libèrent de la vanilline, qui limite l’hypertrophie de cellules graisseuses, en faisant un bon allié pour ceux qui suivent un régime.
Seule ombre au tableau, leur forte teneur en sel. Même si la prune salée permet notamment de se prémunir contre les coups de chaleur, il ne faut pas pour autant en abuser.
M. Suzuki nous explique pourquoi cette saveur salée est nécessaire.
« Les prunes salées contiennent 20 % de sel, pas plus pas moins. En dessous de cette teneur, il se développerait une moisissure blanche dans le sel de la prune. Cependant, si on retire le sel de cette prune, et que pour le goût, on y ajoute du miel, du shiso (ou la pérille, plante aromatique) ou du katsuobushi (copeaux de bonite séchée), la prune umeboshi conserve entre 7 % et 17 % de sel. À Taïwan ou en Chine, où la consommation des prunes est répandue, les touristes ont de plus en plus tendance à acheter des prunes au miel pour ramener chez eux. »
Un petit plus qui fait la différence en cuisine
Cette teneur en sel y est pour beaucoup dans le goût. Les umeboshi ont la particularité d’allier à la fois le salé et l’acide. Nombreux sont ceux qui apprécient la saveur acide, mais en y ajoutant du sel, cela donne un goût encore plus intense. Si on ne sait pas cela, on ne peut qu’être surpris en le mettant en bouche. Certains s’amusent à demander à des enfants ou à des étrangers de les goûter pour la première fois, sans se préparer. Mais c’est peut-être justement l’une des raisons pour lesquelles cette expérience acide surprenante leur font développer un sentiment de rejet qui durera longtemps.
Ces dernières années, même au Japon, les umeboshi ont de moins en moins la cote auprès des jeunes. Selon les statistiques de la consommation des ménages publiées par le Bureau du ministère des Affaires intérieures et des Communications, les ventes d’umeboshi entre 2002 et 2016 sont passées de 1050 grammes à 730 par an et par foyer, soit une baisse de 30 %.
Même les Japonais, amateurs d’umeboshi ont été peu nombreux à les apprécier à leur première bouchée. Les habitudes se créent dès le jeune âge en réalité, lorsque les parents mettent des umeboshi dans les bentô de leurs enfants afin de préserver sainement la nourriture, en leur répétant qu’« il faut les manger car c’est bon pour la santé ». Ils finissent alors par les apprécier. Il est possible de le manger seul pour le plaisir, mais à l’origine ils sont faits pour rehausser le goût de plats tels que du riz ou du poisson blanc. Ce sont les umeboshi qui relèvent la saveur du plat.
M. Suzuki nous explique qu’à la foire gastronomique où il s’était rendu en Turquie, à partir du deuxième jour, les dégustations de fromage local avec umeboshi avaient plutôt reçu un bon accueil.
Conscient des réalités du marché, le producteur de kiwami a décidé à partir d’avril 2017 de proposer de nouvelles façons d’apprécier les prunes salées. C’est ainsi que la série « Plum Concierge » a vu le jour. Elle propose des umeboshi en purée avec un goût légèrement fumé, une pâte d’umeboshi à déguster avec de fins copeaux de comté, etc. La purée d’umeboshi peut tout aussi bien s’accorder avec des steaks, des poissons, des salades, tandis que le fromage au goût d’umeboshi sera parfait en tant qu’amuse-gueule avec du vin ou du champagne.
(D’après un texte original en japonais de Suzuki Naoto. Photos : la rédaction de Nippon.com)