Quand gourmandise rime avec plaisir

L’anguille, un délice qui n’a pas de prix

Culture Vie quotidienne

Le prix des civelles, les alevins utilisés pour l’élevage des anguilles, est devenu trop élevé pour sortir la filière de la restauration liée à ce poisson du long marasme dans lequel elle est plongée. Roswell Hosoki est l’auteur d’une série manga consacrée à ce thème unique : dans « U », le personnage principal parcourt le pays pour pouvoir assouvir sa passion gastronomique pour ce poisson. L’auteur nous parle de la culture alimentaire qui existe autour de l’anguille et des difficultés actuelles des restaurants spécialisés dans ce met.

L’anguille ne s’apprécie pas seulement l’été

Pour Roswell Hosoki : Il existe des recettes à l’anguille dans le monde entier, mais il n’y en a aucune meilleure que grillée à la kabayaki ! »

Le Japon représente environ 70% de la consommation mondiale d’anguille. Actuellement, les pays producteurs d’anguilles d’élevage sont le Japon, la Corée du Sud et la Chine et Taiwan. Ces quatre pays ont signé en mai 2014 un accord pour réduire de 20% leur production d’anguille. Celui-ci est entré en vigueur en novembre de cette année. Au Japon en particulier, les éleveurs sont désormais tenus de déclarer les quantités d’anguilles produites.

Comme l’explique Roswell Hosoki, « une approche internationale de la protection des ressources est absolument nécessaire. Même si cela est difficile économiquement, chacun de nous devrait aller plusieurs fois par an manger de l’anguille, cela est nécessaire pour améliorer la protection des ressources et soutenir l’industrie de l’anguille. » 

Actuellement, les premiers jours de la canicule est la seule période où l’anguille a droit aux honneurs des conversations. Mais c’est une erreur de croire que l’anguille est un plat d’été uniquement. Toute l’industrie fait des efforts pour la promotion. Car l’anguille d’élevage est disponible toute l’année, et l’anguille sauvage est meilleure tout l’automne, jusqu’à l’hiver.

L’anguille au cœur

Alors pourquoi ne pas aller quelques fois par an manger une anguille dans un vrai restaurant spécialisé dans ce poisson ? Nous avons demandé à Roswell Hosoki une idée pour apprécier encore plus pleinement la culture de l’anguille :

« L’anguille se mange très chaude, dès qu’elle est prête, sans attendre. Et donc, inversement, il faut attendre qu’elle soit prête, entre le moment où vous passez commande et le moment où elle vous est servie. C’est peut-être le moment d’en profiter pour commander un bon saké ! Avec un petit amuse-gueule… Un certain nombre de restaurants travaillent leur offre dans ce sens. Et après un petit hors-d’œuvre et un bon pichet de saké, votre palais est fin prêt pour déguster un unajû ! »

D’ailleurs, un prestigieux syndicat professionnel de saké japonais, qui regroupe des brasseurs, des distributeurs et des détaillants, sélectionne chaque année les trois meilleurs sakés qui forment l’association idéale avec un plat d’anguille. Roswell Hosoki fait partie du jury. Depuis neuf années consécutives, c’est le saké Nishinoseki, produit dans la préfecture d’Oita, qui remporte la dégustation à l’aveugle.

Roswell Hosoki attend également chaque année avec impatience le 26 octobre, jour du Dai Hôze matsuri, festival traditionnel spécialement dédié à l’anguille célébré dans le sanctuaire Mishima JInja à Kyôto. Ce petit sanctuaire de shintô, mais riche d’une histoire qui remonte à l’époque de Heian, vénère l’anguille comme un messager des divinités Kami. Après un rite shintô pour les âmes des anguilles qui sont passées par son estomac au cours de l’année, c’est un plaisir insigne de déguster une anguille kabayaki croustillante dans la tradition du Kansai. « Impossible de trouver le même goût à Tokyo ! » affirme Roswell Hosoki.

(Photo de titre : Kato Takemi)

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