Vivre à Fukushima — un an après le séisme

Le charme immuable d’Aizu

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Aizu-Wakamatsu, l’une des premières destinations touristiques de la préfecture de Fukushima. Sur fond de désaffection des touristes depuis la catastrophe du 11 mars 2011, une auberge traditionnelle résiste aux vents contraires et attire plus de monde que jamais. Découvrons ensemble ce qui fait l’attrait de cet établissement qui mise sur la « permanence ».

Les geishas de Higashiyama s’engagent pour la reconstruction

La « permanence », loin d’être le seul apanage de Mukaitaki, est un mot-clé qui pourrait s’appliquer au tourisme d’Aizu dans son ensemble. A Higashiyama-Onsen, on trouve toujours des geishas, alors qu’elles ont disparu de presque toutes les autres villes thermales, et nombre d’entre elles sont des jeunes femmes dans leur vingtaine. Après avoir appris leur art de geishas plus âgées, elles continuent à transmettre cette tradition qui remonte à l’ère Meiji.

Mikiko et Tsukino, geishas de Higashiyama, chantent « Les pruniers sont-ils fleuris ? »

Chanteuse et joueuse de shamisen réputée, Mikiko est une geisha expérimentée, très écoutée par ses jeunes collègues. Elle nous parle du charme des geishas de Higashiyama.

« Aizu est proche de Niigata, porte d’entrée de la culture de Kyoto sur la côte de la mer du Japon, et les arts d’agrément traditionnels sont appréciés depuis longtemps ici. Par rapport à la belle époque où nous étions plus d’une centaine, les choses ont bien changé, mais par ces temps de crise, je crois qu’il n’existe aucune autre ville thermale où on trouve autant de jeunes geishas. Après la catastrophe, par pudeur, nous n’avons pas travaillé pendant un temps, mais les entrepreneurs locaux n’ont pas hésité à faire appel à nos services, en disant "c’est précisément maintenant qu’il faut agir pour la reconstruction." Je pense que nous allons pouvoir continuer à transmettre la tradition des geishas de Higashiyama. »

Avec l’image des « maisons de thé » (maisons de geisha) de Kyoto en tête, on a tendance à penser que ce divertissement n’est pas accessible au commun des mortels, mais, à Higashiyama-Onsen, une geisha demande 14 175 yens pour un divertissement de 90 minutes. Il suffit de demander à votre auberge de prendre rendez-vous avec l’une d’entre elles. Précisions de Mikiko : « Il nous arrive de nous produire devant des familles ou des groupes de femmes. Avec les étrangers qui ne parlent pas japonais, nous communiquons par signes et par gestes, c’est très amusant. Depuis la catastrophe, les étrangers ne viennent plus, c’est dommage. Nous attendons votre visite ! »

Tsukino, elle, a 22 ans. Originaire de Kitakata, ville voisine d’Aizu-Wakamatsu, elle exerce la profession de geisha depuis quatre ans. « Depuis mon enfance, j’aime les choses traditionnelles japonaises, mais c’est au lycée que j’ai commencé à envisager ce métier. Je suis heureuse de pouvoir porter de beaux kimonos et une perruque à la japonaise, mais je dois sans cesse apprendre de nouvelles choses. »

L’esprit d’Aizu : toujours se conduire de façon juste, même dans l’adversité

La « permanence » qui fait le charme d’Aizu est aussi celle des personnes. Les « dix commandements » étudiés à l’époque d’Edo par les enfants d’ici en constituent un bon exemple. Ces règles de vie – respecter les personnes âgées, ne pas mentir, etc. – s’accompagnent d’un dernier précepte : « Ce qui est mal est mal. »

Le château de Tsuruga, symbole d’Aizu (à gauche) et les tombes du groupe des samouraïs Byakkotai

Le mot de la fin revient à M. Hirata, le patron de l’auberge Mukaitaki :

« L’esprit d’Aizu, c’est de vouloir continuer à agir de façon juste, même quand on sait qu’on va perdre. "Ce qui est mal est mal" est un précepte qui s’applique non pas aux autres, mais à soi. Si cet esprit se perdait, Aizu aussi disparaîtrait. Afin d’éviter cela, nous allons continuer à prendre soin de notre belle ville d’Aizu. »

(Photos : Uzawa Akihiko)


Mukaitaki en hiver.


Mukaitaki aux premiers jours de l’été.


Le hall d’entrée, riche de 140 années d’histoire.


                   Hirata Machiko, la patronne de l’auberge.


Le jardin, orné en hiver de « bougies pour admirer la neige ». Les supports en bambou sont tous de fabrication artisanale.


                   Les employés s’occupent des bougies. Même par grand froid, ils maintiennent                           leur tour de ronde dans le jardin pour vérifier qu’aucune ne s’est éteinte.


Le jardin aux premiers jours de l’été. 


                   Le couloir soigneusement ciré.


Les escaliers luisants de propreté.


Le « bain du renard », le plus ancien de l’auberge.


Le vaste « bain des singes ».


Les spécialités de l’auberge : la daurade mijotée et le saké Bishukakô (« Alcools fins et cuisine raffinée »)

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