Le parcours de Merna Airoud, la première femme médecin arabe au Japon

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Au printemps 2022, Merna Airoud est devenue la première femme arabe à obtenir son diplôme d’État japonais de docteur en médecine, et la deuxième Arabe dans ce cas, après l’ophtalmologue égyptien Osama Ibrahim. Comme Merna a-t-elle pu accomplir un tel exploit, elle qui ne parlait pas un mot de japonais avant d’arriver sur l’Archipel ?

Merna Airoud Merna Airoud

Née en 1990 à Alep en Syrie, elle étudie à la faculté de médecine de l’Université d’Alep, dont elle sort majeure de sa promotion. Elle obtient son diplôme d’État syrien de docteur en médecine en 2014. L’année suivante, elle suit son mari quand il vient étudier au Japon. Elle se met à l’étude de la langue japonaise dont elle ne parlait pas un mot, et obtient quatre ans plus tard le niveau 1 du JLPT. En février 2022, elle est devenue la première femme arabe à réussir l’examen qui conditionne l’accès au diplôme d’État japonais de docteur en médecine. Aujourd’hui, elle travaille dans un hôpital de la préfecture de Kanagawa.

Une fois le N1 obtenu, un chemin ardu jusqu’à la qualification de médecin

Si Merna réussit le niveau N1 en 2019, elle n’est pas au bout de ses peines. Elle prend rendez-vous au ministère de la Santé afin d’obtenir officiellement le droit de passer l’examen d’État, mais il lui faut beaucoup de temps avant qu’on lui concède un entretien. Les deux premières fois, elle ne reçoit pas cette reconnaissance parce que son dossier n’est pas complet. Ce n’est qu’à la troisième tentative qu’elle parvient à présenter l’ensemble de son dossier.

Dans l’intervalle, elle apprend une information qui la perturbe. Si sa certification syrienne est jugée insuffisante au moment de l’examen de la documentation, il lui faudrait refaire trois ans d’études en faculté de médecine et réussir plusieurs examens. Heureusement pour elle, les documents qu’elle fournit conduisent les évaluateurs à déterminer que le diplôme dont elle est titulaire est du même niveau qu’un diplôme d’État japonais.

Le certificat de réussite à l'examen d'État japonais de licence médicale qu’a obtenu Merna.
Le certificat de réussite à l’examen d’État japonais de licence médicale qu’a obtenu Merna.

Cela signifie ainsi qu’elle a le droit de se présenter au Japanese Language Medical Proficiency Test (Examen de connaissance de la langue japonaise dans le domaine médical). Organisé une fois par an seulement, il est destiné aux personnes titulaires d’un diplôme d’État étranger de docteur en médecine, ainsi qu’à celles qui ont obtenu un diplôme de fin d’études d’une faculté de médecine étrangère. En plus d’un entretien et d’une consultation avec des patients, les candidats doivent aussi rédiger une opinion clinique.

Merna le réussit, et est officiellement reconnue comme ayant une qualification équivalente à celle d’un diplôme d’une université japonaise de médecine. Cela lui permet par conséquent de se présenter en février 2022 à l’examen requis pour obtenir le diplôme d’État de docteur en médecine. La dernière étape est franchie avec succès, bravo à elle !

« Ce succès marquait la fin du long voyage qu’a été mon apprentissage de la langue japonaise, et aussi le départ d’un nouveau périple au Japon, au sein d’un travail que j’aime tant. »

Avec son mari, qui n'a pas ménagé son soutien à Merna.
Avec son mari, qui n’a pas ménagé son soutien à Merna.

De la reconnaissance envers tous

C’est donc six ans après son arrivée au Japon que Merna reçoit le diplôme d’État japonais de docteur en médecine. Pour parcourir ce long chemin, la présence de sa fille était une motivation. Elle est aussi reconnaissante à son mari et à ses parents qui l’ont toujours encouragée.

« Ça n’a pas été simple de cumuler mes études et le rôle de mère et de femme au foyer. Mais mon mari nous a toujours soutenues, ma fille et moi. Lorsque je connaissais des baisses de moral, il me disait qu’il ne m’imaginait que réussir et qu’il priait Allah de récompenser mes efforts. Ma mère priait aussi toujours pour moi. Je suis aussi reconnaissante à mon père dont je suis fière et qui a toujours été pour moi un modèle. »

Sa vie comme médecin clinicienne au Japon vient juste de débuter. Elle devra certainement encore surmonter de nombreuses difficultés, mais c’est avec le sourire qu’elle nous dit : « J’ai voulu faire ce métier en sachant qu’il n’était pas facile, et qu’il exige de ne jamais cesser d’apprendre. Depuis que je suis arrivée au Japon, on m’a tellement dit que ce que je voulais faire était impossible. Mais tout en ayant foi en Allah, je me suis toujours répétée que la seule façon de savoir si on peut ou non faire quelque chose est d’essayer. C’est avec cette conviction que j’ai poursuivi mes efforts. »

Avec sa mère en visite du Japon depuis la Syrie
Avec sa mère en visite du Japon depuis la Syrie

(Photo de titre : Merna Airoud avec sa licence médicale d’État devant le Bureau de la santé publique de la ville de Fujisawa où elle l’a obtenue. Toutes les photos ont été fournies par Merna Airoud.)

(Voir également notre article : Osama Ibrahim, le premier Arabe médecin au Japon)

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