L’univers de Shinkai Makoto, réalisateur de « Your name »

Culture Cinéma

En 2016, Kimi no na wa (Your Name) aura été le film d'animation qui a remporté le plus grand succès au Japon. Shinkai Makoto, le réalisateur, attire actuellement tous les regards, aussi bien au Japon qu’à l’étranger. Nous l’avons rencontré pour lui demander de nous parler de sa conception du cinéma d’animation. Your name est disponible sur Netflix depuis le 1er juin 2020.

Shinkai Makoto SHINKAI Makoto

Né dans la préfecture de Nagano en 1973. Débute en 2002 avec un premier court métrage auto-produit, Hoshi no koe. Son premier long métrage, La Tour au-delà des nuages, sort en 2004 et remporte le Prix du film d’animation, au 59e Concours de cinéma Mainichi. Ses autres films engrangent également de nombreux autres prix au Japon et à l’étranger. Le Prix du meilleur film d’animation au festival du cinéma Asie-Pacifique pour le moyen métrage 5 centimètres par seconde (2007) et le Grand Prix Lancia Platina en Italie, le Singe d’or du Festival international de cinéma en Chine pour Voyage vers Agartha (2011). En 2012, il reçoit le Prix d’appréciation du bureau de stratégie du secrétariat du gouvernement pour « les Japonais qui portent haut la voix du Japon à l’étranger ». L’année suivante, The Garden of Words obtient le Grand Prix du long métrage au festival de cinéma d’animation au festival de Stuttgart. Your Name. (2016), distribué dans 92 pays, a d’ores et déjà reçu le Prix du meilleur film d’animation au festival de Sitges en Espagne et le Prix du meilleur film d’animation de l’Association des critiques de films de Los Angeles.

Londres, un tournant de ma vie

—Vous avez fait vos études supérieures à la faculté de Lettres de l’Université Chûô à Tokyo. Puis, vous avez trouvé du travail dans une société de jeux vidéo, mais à quel moment avez-vous décidé de devenir réalisateur de films d’animation ?

SHINKAI   J’avais choisi de faire des études de Lettres uniquement pour me donner du temps. Pendant mes années d'étudiant, j’ai réfléchi à ce que je voulais faire plus tard, et comme je ne trouvais rien, pendant un moment j'étais assez angoissé.

Je me suis présenté au concours d’embauche de plusieurs compagnies un peu au hasard, et j’ai finalement été engagé par la société Nihon Falcom, un éditeur de jeux vidéo. Depuis mon enfance, j’aimais dessiner et imaginer des histoires, le jeu vidéo semblait un domaine créatif intéressant.

Tout en poursuivant mon travail dans cette société, j’ai été de plus en plus attiré par l’idée de créer mes propres histoires avec mes propres images. Au bout de cinq ans, j’ai démissionné de mon emploi et j’ai auto-produit Hoshi no koe, qui m’a apporté une grande satisfaction. Des gens sont venus voir mon film, cela m’a convaincu que je pouvais vivre avec ce travail.

En revanche, avec mes deux films suivants, un long métrage La Tour au-delà des nuages, et un moyen-métrage 5 centimètres par seconde, je me suis demandé si vraiment ce travail était fait pour moi. À cette époque, j’ai eu une proposition de la Fondation du Japon pour diriger un atelier de production d’animation numérique au Moyen-Orient, et j’ai accepté. Puis, je me suis dis que tant qu'à partir au Moyen-Orient, autant en profiter pour vivre un certain temps à l'étranger, et après l’atelier, je me suis inscrit dans un institut de langue à Londres. J’avais 35 ans. Au début, je comptais y rester six mois, mais en fin de compte, j’y suis resté un an et demi.

Shinkai Makoto

—Cette première expérience à l'étranger a-t-elle été un tournant dans votre vie ?

SHINKAI   Pendant mon séjour, j'ai rencontré de nombreuses personnes qui connaissaient mon travail. Même dans cette école de langue et il m’est même arrivé de me faire reconnaître dans un café. Un jour, j’étais allé chez le coiffeur, et le coiffeur me dit : « Je vous reconnais, j’ai un DVD de votre film ! » Et tous ces gens m’expliquaient combien ils aimaient ce que j’avais fait. J’avais déjà eu l’occasion de parler avec des fans dans des festivals de films, mais là, c'était la première fois que je sentais d’aussi près des gens dans ma vie quotidienne qui avaient vu et étaient attentifs à mon travail.

Mais j'étais un étranger, sans travail, je n'étais pas marié, j’ai pris conscience du fait que je n'étais rien du tout. J'étais totalement libre, et en même temps, je ne sentais aucun sol ferme sous mes pieds et ça, c'était angoissant. Je me suis dit qu’il me fallait absolument quelque chose à quoi m’accrocher, et au même moment, j’ai trouvé les contours d’une histoire que je voulais vraiment écrire. J’ai donc écrit le scénario de mon film suivant à Londres, et quand je l’ai terminé, je suis rentré au Japon. C’est devenu Voyage vers Agartha. C’est à ce moment-là que je me suis décidé de devenir réalisateur de films d’animation pour de bon, je pense.

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