Qu'est-ce que le « community design » ?

Société Vie quotidienne

Yamazaki Ryô est community designer (concepteur de modèles communautaires). Avec Studio-L, l’entreprise qu’il a créée, il s’efforce d’aider des villes et des petites communautés locales à survivre et à retrouver leur dynamisme en dépit du déclin démographique qui frappe le Japon. Les modèles communautaires innovants qu’il a conçus pourront également s’appliquer aux grandes villes quand elles connaîtront des problèmes similaires, et ce non seulement au Japon mais aussi dans le reste du monde.

Yamazaki Ryô YAMAZAKI Ryo

Né en 1973. Directeur du cabinet d’architecture urbaine Studio-L qu’il a fondé en 2005. Professeur à l’Université d’art et de design de Kyoto où il dirige le département de l’aménagement de l’espace. En tant que concepteur de modèles communautaires, Yamazaki Ryô a participé à de nombreux projets, ce qui implique l’organisation d’ateliers destinés aux citoyens soucieux de résoudre les problèmes de leur communauté et l’élaboration de plans d’urbanisme en accord avec la population locale. Il a aussi effectué des travaux d’architecture, d’aménagement paysager et de gestion des parcs en fonction des habitants des environs. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages dont Community Design (Design pour une communauté) et Machi no kôfukuron (Comment vivre heureux en ville).

Comment vivre heureux dans un endroit dépeuplé ?

——Oui, mais vivre dans un endroit dépeuplé, est-ce que ça n’est pas un peu trop difficile ?

YAMAZAKI  Le processus de dépeuplement se fait en plusieurs étapes. Quand on ferme une école primaire dans le cadre d’un regroupement scolaire, par exemple, la station service locale disparaît en général dans les trois à cinq années qui suivent. Et cinq ans plus tard, c’est le tour du bureau de poste. Après quoi la population, qui diminuait déjà lentement, a de grandes chances de connaître un brusque déclin.

Dans certaines communautés, les habitants, bien que n’ayant plus de bureau de poste, continuent à mener une vie active et satisfaisante. Dans d’autres, au contraire, la population a complètement baissé les bras. La différence entre les deux tient à l’existence ou à l’absence d’un « capital social »(*1) reposant sur les liens qui unissent les membres de la communauté.

Pour une communauté, les règles et les coutumes uniques en leur genre qu’elle a conservées sont une véritable richesse, au même titre que les liens sociaux et le sentiment de confiance qui se sont constitués au fil du temps par le biais des fêtes et des traditions culturelles. Et elles contribuent grandement à son dynamisme. C’est en observant le fonctionnement de ce type de communauté que j’ai compris que les gens peuvent vivre heureux, même dans un contexte difficile.

——Est-ce que c’est l’objectif que se propose de réaliser le community design ?

YAMAZAKI  Le community design implique que l’on aide les habitants d’une communauté donnée à faire face aux problèmes auxquels ils sont confrontés en faisant appel non seulement aux liens sociaux qui les unissent mais aussi à leurs idées sur la façon de s’y prendre pour que l’endroit où ils vivent retrouve son dynamisme. Mon travail ne met pas du tout l’accent sur le côté « hard » (matériel) de la communauté, c’est-à-dire, les instruments et les infrastructures dont elle dispose comme les bâtiments ou les parcs. Il se focalise au contraire sur la gestion des « soft » (logiciels), autrement dit des données liées aux aspects communautaires du problème, entre autres en organisant des ateliers et en tenant compte des réactions de la population.

Dans certains cas, le capital social d’une communauté est un atout alors que dans d’autres il constitue un handicap, notamment quand il y a des conflits entre des familles qui durent depuis des générations. L’intervention d’une personne extérieure s’avère alors très utile pour peu qu’elle contribue à remettre les choses en ordre.

Yamazaki Ryô et Studio-L ont organisé un atelier à Nobeoka, une agglomération de près de 130 000 habitants de la préfecture de Miyazaki, dans l’est de l’île de Kyûshû. Les habitants de la ville ont été conviés à s’exprimer à propos de l’aménagement d’une nouvelle gare ferroviaire et de l’espace public adjacent. (À gauche) Les habitants de Nobeoka donnent leur avis sur des questions concernant leur lieu de vie. (À droite) Yamazaki Ryô présente le modèle communautaire qu’il a conçu en fonction des résultats de l’atelier. (Avec l’aimable autorisation de Studio-L)

(*1) ^ Le « capital social », une des trois formes de capital définies par le sociologue Pierre Bourdieu, est l’ensemble des comportements et des dispositions mentales qui favorisent la coopération au sein d’une société.

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