
Les grandes figures historiques du Japon
Noguchi Hideyo, le bactériologiste japonais de renommée mondiale, et son musée dédié
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Il isole la bactérie responsable de la syphilis
Le mouvement de sa main étant toujours limité, Noguchi Seisaku préfère alors se concentrer sur les recherches plutôt que sur la pratique. En 1898 il occupe un poste dans l’Institut de Kitasato, un centre de recherche sur les maladies infectieuses, dirigé par Kitasato Shibasaburô.
L’année suivante il décide de changer de nom. Il est dit que Noguchi est choqué par la lecture de « Portrait d’un étudiant contemporain » (Tôsei shosei katagi) par Tsubouchi Shôyô. Il s’inquiète d’avoir été le modèle utilisé pour le héros du livre : un étudiant en médecine venant de la campagne et menant une vie débridée, nommé Nonoguchi Seisaku. Kobayashi, son ancien professeur, va lui proposer Hideyo, qu’il s’attribuera à partir de 1899.
Une lettre de Tsubouchi Shôyô adressée à Kobayashi Sakae à la mort de Noguchi, il y explique que son livre a été écrit quand Noguchi n’avait que 9 ans et que, de ce fait, il n’avait aucun lien avec ses déboires dans la capitale plus tard dans sa vie.
En 1899, il aura la chance de rencontrer le bactériologiste américain Simon Flexner alors en voyage au Japon. Professeur en pathologies à l’université Johns Hopkins (et plus tard dans la même année, à l’université de Pennsylvanie), Flexner voulait visiter l’Institut Kitasato. Grâce à ses capacités linguistiques, c’est Noguchi qui est désigné pour lui faire la visite. À la fin de l’année suivante, Noguchi suivra Flexner en Amérique avec juste une lettre de recommandation de Kisato en poche, et il réussira à obtenir une place en tant qu’assistant de Flexner.
Celui-ci le met au travail en lui faisant effectuer des recherches sur du venin de serpent. Noguchi se lance alors corps et âme dans cette tâche, dormant peu, mais voyant ses efforts récompensés quand il reçoit une invitation afin de faire des recherches à l’institut Staten Serum, à Copenhague. En 1904 quand Flexner est désigné à la direction de l’institut Rockefeller pour la recherche médicale à New York, il invite Noguchi à rejoindre l’équipe de recherche. Ce dernier accepte et se distingue en isolant en 1913 un échantillon du tréponème pâle (Treponema pallidium spirochete), la bactérie causant la syphilis (découverte huit ans plus tôt par les Allemands Fritz Schaudinn et Erich Hoffmann). Son énergie et son dévouement lui valent le surnom de « Human dynamo » par ses collègues de l’institut Rockfeller.
En 1914, l’année ou il devint un membre à temps plein de cet institut, il est également considéré pour le prix Nobel de la médecine. Sa carrière établie, il juge alors le moment opportun pour retourner pour la première fois au Japon depuis 15 ans.
Expositions relatant ses accomplissements aux États-Unis et au Danemark.
« A day in the life of Dr. Noguchi » retrace les activités de laboratoire lors de ses années à l’institut Rockefeller.
Chercher un remède contre la fièvre jaune et en mourir
Noguchi décide peu de temps après de se concentrer sur sa prochaine cible : la fièvre jaune. Ses recherchent aboutissent à l’annonce, en Équateur, en 1918, de l’identification de l’agent pathogène de cette terrible maladie comme étant la bactérie Leptospira Icteroides. Le « Vaccin Noguchi » suit alors très rapidement, et il est acclamé pour cette découverte.
Le scientifique continue ainsi son travail en Amérique Latine en allant entre autres au Mexique ou encore au Pérou. Il voit néanmoins ses thèses rediscutées lorsque des rumeurs provenant d’Afrique disaient que son vaccin n’était pas efficace contre la fièvre jaune là-bas.
Le travail de Noguchi a été acclamé en Amérique du Sud, il a même été nommé Colonel honoraire en Équateur.
Noguchi se rend en Afrique en 1927, malgré de nombreux avis défavorables. Il n’a jamais attrapé la fièvre jaune en étant enfant et n’a aucune immunité face à la maladie, les risques sont donc très importants. Le printemps suivant son arrivée, il confirme que sa théorie était erronée et se prépare à rentrer à New York pour y poursuivre ses recherches. Il contracte cependant la redoutable fièvre jaune, et meurt à Accra, au Ghana, à l’âge de 51 ans.
Au final, il était clair que le vaccin de Noguchi était efficace contre la bactérie causant la maladie de Weil (Ieptospirosis) qui a des symptômes similaires à la fièvre jaune. Cette dernière n’est pas causée par une bactérie, mais par un virus véhiculé par les moustiques. Or, les microscopes de l’époque de Noguchi n’étaient pas assez puissants pour l’identifier. C’est seulement après sa mort que la virologie a fait une avancée notoire, en particulier avec le microscope électronique. Si la maladie n’avait pas eu raison de lui, il aurait probablement pu, lui aussi, faire de nouvelles découvertes dans cette deuxième partie de l’histoire de la science médicale.
Les funérailles de Noguchi et une réplique de sa pierre tombale
L’histoire de Noguchi Hideyo est celle d’un homme qui est parvenu à devenir l’un des premiers scientifiques japonais à briller à l’international, et ce malgré l’adversité. On peut avoir un aperçu de la profonde curiosité qui l’animait dans son travail dans la partie du musée intitulée « The real Hideyo », qui recrée la maison qu’il partageait avec Mary Dardis, son épouse rencontrée à l’université de New-York. On y découvre des murs décorés de nombreuses peintures et calligraphies réalisées par le scientifique. Le costume et les bottes élégantes exposés témoignent des passions qui l’ont guidées tout au long de sa vie. Il aimait les échecs, la pèche et avait de nombreux passe-temps, preuve d’une curiosité à toute épreuve.
Des peintures réalisées par Noguchi décorant les murs, et sa table d’échecs favorite, figée dans le temps.
Passionné de nouveautés et amateur de beaux habits, il aimait porter d’élégants apparats. Il était également fervent utilisateur de fil dentaire. Sur le mur à gauche on peut apercevoir quelques-unes de ses calligraphies.
Le conservateur Morita Teppei nous en dit plus sur le musée : « Nous avons repensé les expositions en 2015 et avons fait en sorte qu’elles soient plus accessibles pour les écoliers et les visiteurs étrangers. » Le design ingénieux de l’établissement concentre l’attention sur les objets exposés et les explications en anglais sont nombreuses. Le robot Noguchi est particulièrement apprécié des plus jeunes, fournissant des réponses aux questions que les visiteurs peuvent se poser sur la vie du scientifique.
Noguchi, présent sur les billets de 1 000 yens depuis 2004, sera remplacé le 3 juillet 2024 par l’un de ses bienfaiteurs : Kitasato Shibasaburô. Un moyen de garder ces deux grands grandes figures de la science médicale dans l’esprit collectif.
Le robot Noguchi en action, plus vrai que nature
La partie théorique du musée partage des informations basiques à propos des bactéries et de l’histoire de la recherche sur les maladies infectieuses.
Le fameux portrait de Noguchi Hideyo qui deviendra le modèle du billet de 1 000 yens.
Hideyo Noguchi Memorial museum
- Adresse : 81 Mitsuwa Maeda, Inawashiro-machi, Fukushima-ken
- Horaires : tous les jours de 9 h 00 à 17 h 30 (avril à octobre), 9 h 00 à 16 h 30 (novembre à mars). Dernière admission 30 minutes avant la fermeture
- Fermé du 29 décembre au 3 janvier
- Prix : adultes et lycéens 1 200 yens, collégiens et écoliers 550 yens
- Site web officiel (en japonais) : https://www.noguchihideyo.or.jp/
(Reportage, texte et photos de Nippon.com. Photo de titre : un buste de Noguchi, don de l’institut Rockefeller, placé devant la maison du scientifique.)