Les grandes figures historiques du Japon

Noguchi Hideyo, le bactériologiste japonais de renommée mondiale, et son musée dédié

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Le chercheur en bactériologie Noguchi Hideyo a surmonté les difficultés de la pauvreté et son sévère handicap à la main afin de devenir un savant à la carrière internationale, réussissant entre autres à isoler la bactérie responsable de la syphilis. Sa maison d’enfance dans la ville d’Inawashiro, au nord-est du Japon, est maintenant un musée dédié à sa vie et ses accomplissements. Son célèbre visage figurant sur les billets de 1 000 yens depuis 2004 sera remplacé en juillet de cette année par l’un de ses bienfaiteurs, Kitasato Shibasaburô.

D’un hameau perdu à une renommée mondiale

Noguchi Hideyo (1876-1928) est né dans une famille défavorisée vivant dans un hameau agricole appelé Sanjôgata, qui est aujourd’hui devenue la ville d’Inawashiro, sur la rive nord du lac homonyme. Il est sorti de la pauvreté — et a surpassé son handicap imposé par sa brûlure très sévère à la main gauche qu’il s’est faite en tombant dans le foyer de la maison lorsqu’il était enfant— puis a démontré un talent certain pour la médecine ainsi que la recherche bactériologique. Cette aptitude lui a ouvert les portes d’une brillante carrière à l’international, loin des rives de sa ville natale, lui permettant de faire des recherches à New York, en Europe, en Amérique du Sud ou encore en Afrique afin d’élucider les causes des maladies telles que la syphilis ou la fièvre jaune. Il a été considéré à trois reprise pour le prix Nobel avant que la maladie ne l’emporte soudainement à Accra, au Ghana.

Noguchi repose au cimetière « New York Woodlawn Cemetery » mais il est aussi commémoré de par le monde comme par exemple au Ghana dans le « Noguchi Memorial Institute for Medical Research ». Et il est bien sûr à l’honneur à Inawashiro, où la maison qui l’a vu grandir subsiste encore aujourd’hui, son toit de chaume étant protégé des éléments par la structure du « Musée commémoratif Hideyo Noguchi Memorial Museum ».

Le musée se situe en bordure de la route nationale 49. La structure à droite abrite la ferme où Noguchi a vu le jour en 1876.
Le musée se situe en bordure de la route nationale 49. La structure à droite abrite la ferme où Noguchi a vu le jour en 1876.

La maison des Noguchi protégée des intempéries par le toit du musée et le mont Bandai en arrière-plan culminant à 1 816 mètres.
La maison des Noguchi protégée des intempéries par le toit du musée et le mont Bandai en arrière-plan culminant à 1 816 mètres.

La visite du musée commence tout d’abord par la maison elle-même. Ici, le petit Noguchi Seisaku (son nom de naissance) voit le jour. À 18 mois il se brûle la main et le bas du bras en tombant dans les cendres incandescentes de la cheminée familiale. C’est un drame pour quelqu’un qui est destiné à travailler dans les champs. Sa mère le pousse alors à s’éduquer.

Autre point fort de la pièce principale : le message laissé par le jeune Seisaku lors de son départ pour Tokyo : Kokorozashi o ezareba futatabi konochi o fumazu « Je ne remettrai pas un pied ici tant que je n’aurais pas accompli mon but ».

Le foyer qui décidera de la destinée du jeune Noguchi.
Le foyer qui décidera de la destinée du jeune Noguchi.

Le pilier sur la gauche, indiqué par la découpe en forme d’homme, porte encore les stigmates du couteau de Noguchi.
Le pilier sur la gauche, indiqué par la découpe en forme d’homme, porte encore les stigmates du couteau de Noguchi.

Après avoir subi une chirurgie, il s’intéresse à la science

Dans la partie principale du musée, vous passerez dans des pièces présentant des expositions permanentes telles que « Hideyo’s Life and Times », « The real Hideyo » et « The Doctor’s Laboratory ». Chaque partie dévoile de précieuses photos et matériaux ainsi que les trésors du scientifique, mettant sa vie en lumière.

Les personnes qu’il rencontre tout au long de sa vie ont également un rôle décisif, il n’aurait pas pu aller aussi loin sans leur soutien.

Noguchi assis en deuxième depuis la gauche, pose en 1915 avec les personnages clés de sa vie lors de son unique retour au Japon depuis son départ aux Etats-Unis en 1900. Depuis la gauche on retrouve : Watanabe Kanae, le premier docteur à avoir opéré la main brûlée de Noguchi ; Chiwaki Morinosuke, un dentiste qui fut le mentor et sponsor de Noguchi et Kobayashi Sakae, l’éducateur qui ouvrit la voie de l’éducation pour le jeune garçon d’Aizu. En arrière-plan on aperçoit Ishizuka Saburô, grand ami de Noguchi mais aussi son collègue à l’école dentaire de Takayama où Chiwaki lui offrit un travail.
Noguchi assis en deuxième depuis la gauche, pose en 1915 avec les personnages clés de sa vie lors de son unique retour au Japon depuis son départ aux Etats-Unis en 1900. Depuis la gauche on retrouve : Watanabe Kanae, le premier docteur à avoir opéré la main brûlée de Noguchi ; Chiwaki Morinosuke, un dentiste qui fut le mentor et sponsor de Noguchi et Kobayashi Sakae, l’éducateur qui ouvrit la voie de l’éducation pour le jeune garçon d’Aizu. En arrière-plan on aperçoit Ishizuka Saburô, grand ami de Noguchi mais aussi son collègue à l’école dentaire de Takayama où Chiwaki lui offrit un travail.

Faisant face à un quotdien ardu et à la nécessité de cultiver la terre pour vivre, Noguchi est sauvé très tôt par Kobayashi Sakae, professeur principal de l’école primaire supérieure d’Inawashiro (équivalent au niveau collège). Ce dernier voit en lui des capacités académiques et fait en sorte que Noguchi poursuive ses études dans son école en 1889. Il prend en charge les frais de scolarisation et, aux 16 ans de Noguchi, lève des fonds afin de financer une opération qui redonnera un peu d’usage à sa main abimée.

Le chirurgien en charge, Watanabe Kanae, avait étudié la médecine aux États-Unis. Noguchi, impressionné par la liberté de mouvement que la chirurgie rend à ses doigts, décide de s’engager lui aussi dans cette voie. Il prend un travail de réceptionniste et assistant au sein de la clinique Watanabe Kaiyô, et commence ainsi à apprendre les fondements de la science médicale.

Une exposition détaillant sa vie à Inawashiro et Aizu-Wakamatsu. La photo à gauche, la première jamais prise de lui, nous le montre à droite avec sa main enroulée dans des bandages juste après son opération, accompagné de son ami Yago Yasuhei.
Une exposition détaillant sa vie à Inawashiro et Aizu-Wakamatsu. La photo à gauche, la première jamais prise de lui, nous le montre à droite avec sa main enroulée dans des bandages juste après son opération, accompagné de son ami Yago Yasuhei.

« Les grands hommes ne se font jamais seuls »

Kobayashi prête de l’argent à Noguchi pour voyager à la capitale avec l’objectif de passer des examens d’aptitude médicale. S’il passe avec succès la première partie, ses précieuses économies partent dans un mode de vie de débauché. Il en vient à s’appuyer sur un ami de Watanabe, Chiwaki Morinosuke, qui travaillait comme dentiste à l’université dentaire de Takayama. Avec une chambre à l’internat de l’université et de l’argent pour financer sa préparation à la seconde partie de ses examens, Noguchi se concentre alors sur ses études et réussit finalement, grâce à ce nouveau bienfaiteur, les examens gouvernementaux.

Il existait une habitude dans la vie de Noguchi : il obtenait de l’argent dans un but précis — un voyage à l’étranger pour parfaire ses connaissances médicales par exemple — puis le flambait entièrement, et se rendait mendier à nouveau chez Watanabe ou Chiwaki. Cette approche négligée est loin des élogieux commentaires vantant son côté acharné au travail, dépeint dans beaucoup de biographies, et il est certain qu’il n’aurait pu aller aussi loin sans le soutien inconditionnel de ses bienfaiteurs.

Morita Teppei, conservateur au musée Hideyo Noguchi Memorial Museum, note :

« Les grands hommes tels que Noguchi ne se font jamais seuls. Sa famille était si pauvre que les autres villageois blaguaient et disaient que si Seisaku un jour devenait médecin, le soleil se lèverait probablement à l’ouest. Cependant Noguchi n’était pas quelqu’un qui oubliait ses dettes. Il était toujours plein de gratitude envers l’amour de sa mère, Shika, et pour l’aide qu’il recevait de ses bienfaiteurs. Il les remboursa du mieux qu’il put. »

En effet, quand il retourne au Japon après ses formidables accomplissements aux États-Unis et en Europe, il emmène sa mère, Kobayashi et sa femme pour un voyage dans la région du Kansai. Quand Chiwaki vient le voir en Amérique, il prend grand soin de pourvoir à ses besoins durant un mois entier. « Nous espérons que nos expositions au musée retranscrivent l’importance des connections humaines dans sa vie », dit le M. Morita.

Noguchi gardait religieusement cette lettre de sa mère, Shika, l’exhortant à rentrer au Japon. Convaincu, il y retournera en 1915.
Noguchi gardait religieusement cette lettre de sa mère, Shika, l’exhortant à rentrer au Japon. Convaincu, il y retournera en 1915.

Des photographies montrant l’accueil chaleureux qu’a reçu Noguchi lors de son retour au pays.
Des photographies montrant l’accueil chaleureux qu’a reçu Noguchi lors de son retour au pays.

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