
Hôi An au Vietnam, des paysages urbains préservés grâce à des liens forts avec le Japon
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Le « Pont japonais », symbole de liens centenaires entre deux pays
La ville de Hôi An se trouve au sud de Da Nang, la cinquième ville la plus importante du pays. Située à une trentaine de kilomètres, Hôi An abrite un pont communément appelé le « Pont japonais ». Le célèbre édifice, avec son magnifique toit et ses décorations à l’entrée, figure sur le billet de 20 000 dongs et est classé patrimoine mondial de l’humanité depuis 1999. Son nom officiel ; Cau Lai Vien, le « pont pour les gens qui viennent de loin ».
Cau Lai Vien, le « Pont japonais », est un symbole de la vieille ville de Hôi An, classée au patrimoine mondial. Depuis sa restauration, il attire de nombreux touristes (© Tomoda Hiromichi).
Les travaux ont duré un an et demi. Achevé en 2024, le pont nouvellement restauré a été inauguré à l’occasion d’une cérémonie, qui coïncidait avec le festival japonais de Hôi An. Ce dernier a lieu chaque année au mois d’août et vient de célébrer son vingtième anniversaire. Considéré par beaucoup comme un symbole des relations entre le Japon et le Vietnam, le Pont japonais a retrouvé toute sa superbe et est redevenu une attraction majeure de la ville.
Les travaux de rénovation ont été menés avec la coopération d’experts du gouvernement japonais, de l’Agence japonaise pour les affaires culturelles et de l’Agence japonaise de coopération internationale (JICA). J’ai été envoyé au Vietnam par la JICA en août 2022 pour fournir des conseils d’expert sur les travaux, une année charnière dans notre coopération pour la préservation des paysages urbains.
L’intérieur du « Pont japonais » et sa structure en bois (© Tomoda Hiromichi)
Réassemblage des piliers et des poutres réparés sur le « Pont japonais » (© JICA)
Les sections du toit du pont arborent des peintures décoratives complexes qui ont également dû être rénovées. (© JICA)
De l’histoire du quartier japonais et du commerce avec le Vietnam
Le pont a vu le jour en 1593, financé par des marchands japonais. Il aurait été reconstruit dans sa forme actuelle en 1817.
La ville de Hôi An a prospéré pendant l’époque dite des Grandes découvertes, aux XVIe et XVIIe siècles, en tant que port de transit, attirant des navires de commerce chinois, portugais et hollandais. Après que la dynastie chinoise des Ming (1368-1644) a imposé une interdiction sur le commerce maritime avec le Japon, de riches marchands japonais ont commencé à pratiquer le commerce indépendant avec des « navires à sceau rouge », autorisés par le shogunat du clan Tokugawa. Peu à peu s’est ainsi développée une véritable communauté de commerçants japonais sur le côté est du Pont japonais. Le quartier japonais (Japantown) a subsisté jusqu’au milieu du XVIIe siècle, lorsque le shogunat au pouvoir a mis en place sa propre politique d’isolement national.
L’aide du Japon à la préservation des paysages urbains
Alors qu’il poursuit sa croissance économique, le Vietnam devient de moins en moins dépendant de l’aide publique au développement (APD). Dans le domaine de la préservation culturelle, par exemple, il ne dépend plus de l’aide unilatérale du Japon. Selon les médias, les travaux de restauration du pont ont coûté au total 20,2 milliards de dongs, financés en grande partie par des agences de la province de Quang Nam et de la ville de Hôi An. L’aide privée japonaise ne représente qu’une part infime. Japonais et Vietnamiens ont échangé des opinions d’égal à égal.
Pour Hôi An, les plus de 30 ans de collaboration avec le Japon ont une importance particulière. La ville a fait appel à l’expertise de l’Archipel, riche d’une grande expérience en matière de préservation des structures en bois, notamment les temples. Le bois est abondamment utilisé dans la construction de nombreux bâtiments de son quartier historique.
Au début des années 1990, de nombreuses structures résidentielles, publiques et religieuses du vieux quartier de la ville ont été considérées comme vétustes et menaçant de s’effondrer, représentant donc un danger. Mais première chose à faire, et pas des moindres : faire comprendre à la population locale l’importance de l’entretien et de la préservation.
Hôi An en 1997, avec l’entrée du Pont japonais visible à l’arrière-plan (© Tomoda Hiromichi)
À partir de 1993, une équipe japonaise composée de professeurs, notamment de l’Université de femmes de Shôwa, et d’autres experts a eu pour mission d’apporter un soutien technique à la préservation du paysage urbain, sous l’égide de l’Agence japonaise pour les affaires culturelles. L’équipe, que je dirigeais à l’époque, a fourni une expertise, des informations et une formation techniques, selon un processus en cinq étapes.
Tout d’abord, l’équipe a mené une étude sur le contexte historique, la structure des bâtiments et leur utilisation par les résidents. Ensuite, il a fallu obtenir un consensus pour l’acceptation de la coopération japonaise en matière de préservation du patrimoine culturel. Par la suite, des discussions ont eu lieu avec les propriétaires et le gouvernement concernant la préservation des bâtiments historiques. Des mécanismes ont été créés pour faciliter les dons et l’allocation de subventions japonaises aux organisations de résidents vietnamiens. Enfin, dernière étape : des spécialistes japonais ont été invités à partager leur expertise. Le pays lui-même s’est par ailleurs efforcé d’obtenir l’inscription de la région au patrimoine mondial de l’Unesco.
La conservation des matériaux d’origine a demandé des efforts considérables, notamment par le partage des techniques japonaises avec les Vietnamiens qui travaillaient sur le projet. L’une d’entre elles est le kintsugi (réparation des fissures à l’aide de laque urushi et de poudre d’or). Des membres de l’équipe vietnamienne ont également été invités au Japon au Japon pour étudier diverses techniques à l’université.
Le centre de Hôi An en 1995. À cette époque, le tourisme n’y était pas encore aussi développé. (© Tomoda Hiromichi).