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« Sengoku », un manga pour se plonger dans le Japon de la série « Shogun »

Manga/BD

Le manga Sengoku a connu une grande popularité au Japon pour sa représentation réaliste des samouraïs de l’époque des Provinces combattantes, au XVIe siècle. L'œuvre se déroule presque à la même époque que la série Shogun, avec laquelle il est possible d’établir un parallèle.

Le drame de Tadaoki et Gracia

Le Nobunaga historique était un homme qui visait à réunifier le Japon en guerre perpétuelle. Sa personnalité était complexe, peut-être comparable à celle de l’empereur du Saint-Empire romain germanique Frédéric II. Il s’est empressé d’introduire de nouvelles armes telles que les fusils et a encouragé la séparation des soldats et des fermiers. Il excelle également dans la politique économique et a une vision internationale. Il a également fait preuve d’une grande sensibilité artistique et a utilisé le « soft power » du « thé » pour son propre projet d’unification du Japon.

C’était aussi un rationaliste qui n’était pas lié par les superstitions médiévales. Le missionnaire Luis Frois, qui est entré en contact avec lui, a écrit à propos de Nobunaga qu’il « ne croyait pas à l’immortalité de l’âme, ni au jugement après la mort ».

Il n’avait aucune considération pour les autorités traditionnelles, fussent-elles empereurs, généraux et ou les religions, il n’hésitait pas à bannir les généraux qu’il avait autrefois utilisés et réduisait en cendres toutes les forces religieuses qui s’opposaient à lui, y compris l’école à laquelle sa famille était affiliée.

Dans Sengoku, Nobunaga est dépeint comme un personnage d’un grand charisme, mais en même temps comme un « personnage maladroit » incapable d’appréhender les relations humaines avec sensibilité.

L'acteur Kimura Takuya, vêtu comme Oda Nobunaga, répond aux acclamations lors du festival « Gifu Nobunaga » dans la ville de Gifu, le 6 juin 2022. (Jiji Press)
L’acteur Kimura Takuya, vêtu comme Oda Nobunaga, répond aux acclamations lors du festival « Gifu Nobunaga » dans la ville de Gifu, le 6 juin 2022. (Jiji Press)

Le commandant militaire qui s’est rebellé contre Nobunaga était Akechi Mitsuhide ['Akechi Jinsai’ dans la série]. Lui non plus n’était pas un samouraï depuis des générations, mais un général très apprécié pour ses capacités. Il a soudainement attaqué et tué Nobunaga à qui il devait pourtant sa carrière. Pour cette action, Mitsuhide est devenu le rebelle et « régicide » le plus célèbre de l’histoire du Japon.

La fille de Mitsuhide est Hosokawa Tama [Mariko’ dans la série]. Son mari était un seigneur de guerre appelé Hosokawa Tadaoki [Toda Hirokatsu’ dans la série], un soldat compétent et une figure culturelle exceptionnelle, mais leur « destin » bifurque radicalement lorsque le père de Tama tue Nobunaga.

Le droit d’un samouraï de changer de seigneur était reconnu, tout comme la possibilité d’avoir plus d’un seigneur. Il était cependant déshonorant, même à cette époque, de trahir un seigneur avec lequel on avait une relation contractuelle. Et ce que Mitsuhide trahit ici, c’est une grande figure charismatique qui a les capacités d’unifier le Japon. Tadaoki, gendre du traître Mitsuhide, n’a en principe pas d’autre choix que de tuer Tama pour sauver sa vie. Mais il choisit de l’épargner en la retenant prisonnière au fin fond des montagnes.

La complexité psychologique de la position dans laquelle un tel acte le place a néanmoins raison de sa santé mentale, et ses rapports avec la femme qu’il aime se détériorent. Il tue le jardinier qui l’a aperçue et lui montre sa tête. Tama, disent les documents historiques, n’en est aucunement dérangée et poursuit son repas... Ils n’avaient plus aucune relation de couple. Cherche-t-elle à sortir de cette situation ? Tama se convertit au christianisme, se fait baptiser en secret et prend le nom de Gracia. Plus tard, elle est retenue en otage au château d’Osaka, mais, sur ordre de Tadaoki, elle n’est pas autorisée à s’échapper et choisit de se donner la mort.

Le maître d’une ère de batailles continuelles

C’est en définitive le suzerain de Gonbei, Kinoshita Tôkichirô, le futur Toyotomi Hideyoshi, qui a remporté la « guerre de succession » après la mort de Nobunaga et a réalisé l’unification du Japon.

Nobunaga était un génie aux idées originales. Hideyoshi, de son côté, avait le génie de comprendre et de développer les concepts de Nobunaga.

La porte Ôte, sur les ruines du château de Komoro, territoire gouverné par Gonbei en tant que seigneur au tout début de l'époque d'Edo. Ville de Komoro, préfecture de Nagano. (Pixta)
La porte Ôte, sur les ruines du château de Komoro, territoire gouverné par Gonbei en tant que seigneur au tout début de l’époque d’Edo. Ville de Komoro, préfecture de Nagano. (Pixta)

Quel genre de personne était donc Tokugawa Ieyasu (= Toranaga Yoshii) ? Dans le manga Sengoku, le jeune Ieyasu apparaît comme un « joueur » qui ose prendre des risques. Il finit par devenir si habile qu’il bat Hideyoshi dans une bataille en terrain ouvert, mais il considère également le talent de Hideyoshi comme supérieur au sien et fait preuve d’une volonté d’apprendre toujours plus.

Ieyasu n’avait peut-être pas l’originalité de Nobunaga ou de Hideyoshi, mais il avait la capacité d’apprendre et, surtout, la patience de rechercher les opportunités en attendant son heure. Comme le montre Sengoku, il suffit de posséder ces qualités pour être le vainqueur final et devenir « shôgun ».

La production des saisons 2 et 3 de Shogun a déjà été annoncée. Une série d’autant plus passionnante que l’on en connaîtra les bases historiques.

(Photo de titre : Sengoku a été publié en, 15 tomes. Photo de Nippon.com)

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