Le taux d’autosuffisance alimentaire à son niveau le plus bas, une crise pour le Japon

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La faiblesse du taux d’autosuffisance alimentaire du Japon est un problème non résolu depuis longtemps. Il n’a cessé de baisser pour atteindre pendant l’exercice 2020 son niveau le plus faible depuis qu’il est calculé. Un spécialiste tire la sonnette d’alarme dans un contexte où une détérioration des récoltes, en raison du changement climatique, et une stagnation des échanges, en lien avec l’invasion russe en Ukraine, sont à craindre.

L’agriculture japonaise est la plus protégée au monde : c’est faux

Aujourd’hui, toute la nation doit réfléchir à la situation. Il faut que le commerce de détail cesse de rechercher les prix plus bas auprès des producteurs, et les consommateurs de penser que ce qu’ils veulent avant tout sont des prix bas. Sans agriculteurs, il n’y aura plus rien à manger. Renforçons les réseaux entre les producteurs et les consommateurs, sortons de l’attitude « moi d’abord, maintenant, le moins cher », et établissons une économie circulaire durable avec une aide publique.

On a persuadé la nation que l’agriculture japonaise est la plus protégée au monde, mais c’est l’opposé qui est vrai. Aux États-Unis, les agriculteurs confrontés à une baisse de leur revenus suite à la crise sanitaire ont reçu des aides directes d’un montant total de 3 300 milliards de yens, et le gouvernement leur a acheté pour 330 milliards de yens de denrées alimentaires qu’il a ensuite redistribuées aux plus démunis. Au Japon, les montants dépensés à ces fins sont quasiment inexistants.

Avant la mise en place de ces mesures de soutien d’urgence existaient déjà aux États-Unis, au Canada et dans l’Union européenne des dispositifs d’aide alimentaire aux plus démunis au niveau national et international, dans lesquels les gouvernements achètent des céréales et des produits laitiers à un prix minimum garanti. Cela non plus n’existe pas au Japon. Et dans ces pays, les subventions destinées à compenser les coûts de production des agriculteurs leur sont payées directement.

En d’autres termes, les agriculteurs japonais qui persévèrent malgré ce qui est en réalité la protection la plus insuffisante au monde sont des « unités d’élite ». Eux qui réussissent cependant à se classer dixième au monde en terme de productivité peuvent être fiers. Je voudrais que cela leur donne confiance en eux-mêmes dans leur détermination à protéger la nation.

Un pays qui ne contrôle pas son alimentation perd son indépendance

Soutenir au niveau national les industries qui protègent la vie, l’environnement, les régions, le territoire et les frontières est une évidence en Europe et aux États-Unis. Le Japon seul ne le comprend pas. Le gouvernement devrait dépenser ce qu’il faut pour créer un filet de sécurité et être capable de prendre les mesures permettant de surmonter des situations imprévues.

Prenons un exemple : la crise sanitaire a affecté le secteur de la restauration dont la consommation de riz a diminué. Cela a entraîné une chute du prix du riz, tombé cette année à 9 300 yens, alors qu’il était l’an passé de 12 100 yens. Il suffirait de 350 milliards de yens pour compenser les 7 millions de tonnes correspondant à cette baisse. C’est vital pour la nation. Rendre gratuite la cantine dans les écoles élémentaires et les collèges dans tout le pays ne coûterait qu’autour de 500 milliards de yens. Cela protègerait l’avenir des enfants. Les denrées alimentaires sont assurément nécessaires à la défense nationale. Le Japon ne paie-t-il pas aux États-Unis 6 600 milliards de yens pour l’achat de 147 chasseurs F35 ?

Ce que demande la nation, ce n’est pas d’offrir aux entreprises japonaises et américaines son intérêt national sans aucune limite, mais d’élaborer un ensemble de mesures globales et une vision qui assurent une alimentation stable, pour protéger sa vie, son environnement, ses régions, son territoire.

(Photo de titre : Pixta)

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