Le manga et l'anime deviennent des marques

« Berserk », le chef-d'œuvre inachevé : le précieux héritage de Miura Kentarô

Manga/BD

Miura Kentarô, l’auteur de Berserk, chef-d'œuvre du manga du genre dark fantasy, dont la série s’est vendue à plus de 50 millions d’exemplaires en édition papier et électronique, est décédé subitement le 6 mai 2021. L’impact de sa disparition sur ses nombreux fans, tant au Japon qu’à l’étranger, a généré une effusion mondiale de condoléances et de regrets que Berserk ne soit jamais terminé. Regardons ce qu’il a laissé derrière lui pour le monde du manga.

Miura Kentarô était une figure de proue de la bande dessinée de fantasy japonaise depuis la fin des années 1980. Sa mort prématurée à l’âge de 54 ans fait de Berserk, sur lequel il travaillait depuis près de 30 ans, un « chef-d'œuvre inachevé ».

« Elle était trop grande pour être appelée une épée ». Ainsi commence l’impressionnante narration de Berserk, l’histoire d’un lugubre guerrier qui manie une épée démesurée appelée « La Tueuse de Dragons ». Le nom du protagoniste est Guts. Après avoir été trahi par une personne à qui il s’était voué corps et âme, Guts se retrouve non seulement borgne et manchot, mais aussi avec une malédiction marquée sur son cou qui attire les démons. Il vivra alors toujours tiraillé par un dilemme : entreprendre un voyage de vengeance ou rester auprès de la femme qu’il aime pour la protéger.

Cette histoire épique ne sera jamais achevée, mais la contribution de Miura Kentarô au monde du manga est incommensurable.

Un authentique héros sombre

Tout d’abord, l’une des choses qui a surpris les fans de manga japonais à la fin des années 1980 avec Berserk fut l’apparition d’un véritable héros sombre. Bien sûr, il y avait déjà eu des héros apparemment de type badass ou « méchants » dans les œuvres d’autres mangakas, mais Guts, qui n’hésite pas à se servir d’une fille innocente comme bouclier pour vaincre ses ennemis crée le modèle du « héros sombre ».

Guts, le héros de Berserk © Miura Kentarô    (Studio Gaga/Hakusensha)
Guts, le héros de Berserk © Miura Kentarô (Studio Gaga) /Hakusensha

L’apparition de ce type de héros sombre sde cœur aussi bien que d’apparence, qui ne peuvent en aucun cas se revendiquer comme des « alliés du bien et ennemi du mal pour le triomphe de la Justice », a indéniablement élargi le champ d’expression des mangas qui ont suivi, notamment en termes de caractérisation.

Des protagonistes porteurs d’éléments maléfiques plus ou moins marqués tels qu’Eren Jaeger dans l’Attaque des Titans d’Isayama Hajime ou Itadori Yûji dans Jujutsu kaisen, d’Akutami Gege, n’auraient jamais vu le jour sans la voie ouverte par Miura.

Les histoires d’épées et de sorcellerie sont devenues un genre majeur

Berserk, avec ses personnages sombres, n’est pas seulement un chef-d'œuvre de la dark fantasy, c’est aussi l’un des opus les plus authentiques de l’heroic fantasy japonais.

L’heroic fantasy, ou « histoire d’épées et de sorcellerie« , est aujourd’hui l’un des genres les plus populaires de l’industrie du divertissement au Japon, mais lorsque Berserk est sorti en série pour la première fois, l’heroic fantasy était considérée comme un genre relativement mineur, non seulement en manga, mais aussi dans d’autres genres adjacents comme les anime et les romans.

Dans le monde du jeu vidéo, c’était une autre histoire, dès le milieu des années 1980, les œuvres comportant une grande part d’heroic fantasy, telles que The Legend of Zelda, Dragon Quest et Final Fantasy ont connu une énorme popularité, la série Castlevania en particulier devenant un phénomène culturel national. Il n’est pas du tout impossible que Miura ait été l’un des premiers dessinateurs de manga à percevoir la tendance de l’époque. En effet, dans les années 1990, l’univers du jeu vidéo était, en quelque sorte, le moteur de l’industrie japonaise du divertissement.

Couverture du dernier tome de Berserk (numéro 40) paru en français aux éditions Glénat (photo de Nippon.com)
Couverture du dernier tome de Berserk (numéro 40) paru en français aux éditions Glénat (photo de Nippon.com)

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