L’envol de Takanashi Sara, la championne mondiale de saut à ski
Sport- English
- 日本語
- 简体字
- 繁體字
- Français
- Español
- العربية
- Русский
En obtenant la médaille de bronze de saut à ski sur tremplin normal lors des Championnats du monde de ski nordique à Oberstdorf, en Allemagne, le 25 février 2021, Takanashi Sara prenait sa revanche sur la compétition précédente en 2019, où elle avait terminé sixième.
La jeune femme de 24 ans visait néanmoins la médaille d’or. Insatisfaite par ses propres résultats, elle déclarait alors qu’il n’y avait pas de mots justes pour décrire ses sentiments.
Une part de sa déception était due à sa conviction profonde d’avoir travaillé plus dur que quiconque.
Recommencer à zéro malgré une médaille de bronze
Lors des ses seconds Jeux olympiques à PyeongChang en 2018, quand Takanashi Sara avait gagné la médaille de bronze, sa frustration de ne pas avoir réussi à atteindre le milieu du podium était bien palpable. Depuis, elle s’est dévouée à devenir la meilleure sauteuse à ski du monde. Entièrement focalisée sur la première place, elle souhaitait « recommencer son apprentissage à zéro », retournant à la case départ afin de repenser sa façon de sauter.
Takanashi montre un sérieux hors norme. La façon dont elle secoue la tête après chaque saut, et la tension qui se voit constamment sur son visage, comme plongée corps et âme dans son univers, est le témoignage manifeste d’une concentration sans faille, que ce soit en championnat ou durant l’entraînement.
« Je veux que chaque saut compte », disait-elle pour décrire son approche. Mais ses propres sauts ne sont pas les seuls à compter : Takanashi Sara observe attentivement les sauts des autres athlètes lors des entraînements.
« Pour être la meilleure, je souhaite apprendre d’eux et m’approprier toutes leurs techniques », déclarait-elle.
Le désir d’excellence de Takanashi ne se limite d’ailleurs pas aux compétitions sportives, mais s’étend également aux études. Après le collège, la jeune femme a étudié à la Grace Mountain International School d’Asahikawa, à Hokkaidô. Grace Mountain n’étant pas sous licence du ministère de l’Éducation, Takanashi avait besoin d’obtenir un diplôme équivalent à celui du lycée pour pouvoir poursuivre des études supérieures au Japon. Elle a réussi les examens d’obtention de ce diplôme quatre mois seulement après avoir commencé les cours à Grace Mountain, une rapidité tout à fait extraordinaire malgré ses absences régulières des cours en raison des compétitions, parfois internationales.
« Je prenais le premier train à 5 heures 30, je révisais mes cours pendant le trajet, et au total, j’étudiais près de 11 heures par jour. Même lorsque j’étais en compétition, je trouvais toujours un moment pour réviser entre les entraînements. »
L’importance de se développer aussi en dehors de la sphère sportive
En octobre 2020, elle a commencé ses études de troisième cycle en médecine sociale à l’Université de Hirosaki. Bien que ce cursus soit focalisé sur la médecine du sport, Takanashi dit vouloir concentrer ses recherches autour des performances sur les pentes de ski.
On se souvient également de sa réaction après l’obtention de la quatrième place aux Jeux de Sochi en 2014. En considérant ses erreurs, elle s’est rendue compte qu’elle avait un problème de croissance personnelle. C’est-à-dire qu’en ayant grandi dans une « bulle sportive », elle manquait de certaines aptitudes et capacités lui permettant d’intéragir correctement avec les autres. Le fait d’entendre des médaillés lui parler de développement personnel a entraîné une véritable prise de conscience sur ce sujet.
Pour développer ses capacités de socialisation, Takanashi a ajouté à son quotidien des activités plus « ordinaires », des choses dont elle n’avait pas l’habitude, telles qu’aller seule au restaurant, prendre le train, faire davantage attention à ses vêtements et à son apparence générale... Bien que pour la plupart des gens, qualifier ses activités de « développement personnel » puisse sembler très exagéré, Takanashi pensait fermement que ces petits changements pouvaient donner de bons résultats sur les pentes. Pour elle, chaque aspect de la vie quotidienne est une opportunité de s’améliorer.
Ainsi, avoir échoué à obtenir la première place après de nombreux d’efforts tant au niveau sportif qu’au niveau de la vie privée, il est normal de se sentir frustré... Cependant, les observateurs ont commencé à voir la jeune athlète sous un angle différent. Elle a remporté trois victoires aux Championnats du monde de cette saison et a battu le record du monde du nombre de victoires en indiviudel en saut à ski, hommes et femmes confondus, recevant les encouragements des plus grands médias de sport européens, tels qu’Eurosport.
Ses 60 victoires sont le témoignage que, depuis sa première place à un évènement majeur en 2012, Takanashi Sara est au sommet de sa forme depuis près de dix ans. Les hauts lieux du saut à ski tels que la Slovénie et l’Autriche étudient et copient sa posture lors de la phase d’élan ainsi que son timing de décollage, qui sont optimisés pour la forme du corps et la musculature des femmes.
Actuellement encore, et bien que son sport soit secoué par le départ à la retraite de ses rivales, Takanashi continue la compétition au niveau mondial et est respectée internationalement en tant que pionnière du saut à ski.
Réussir enfin à apprécier ses propres capacités
Quand on lui demande pourquoi son assiduité n’a pas encore été récompensée par la médaille d’or olympique, Takanashi répond : « S’il existe un dieu du saut à ski, alors il essaye de me dire de redoubler d’efforts. »
Après toutes ces années d’entraînement et de développement personnel, Takahashi se montre toujours aussi intransigeante, pensant constamment qu’elle ne se donne pas assez, qu’elle doit travailler encore plus dur pour atteindre son objectif. Après sa compétition groupée pour les sauts à ski sur tremplin large le 3 mars 2021, Takanashi a réussi à obtenir la médaille d’argent en équipe lors du dernier évènement des Championnats du monde de ski nordique à Oberstdorf. Bien qu’il ne s’agisse pas encore de l’or qu’elle souhaite atteindre, ce jour-là, son expression a changé.
« Depuis les Jeux de PyeongChang, j’ai essayé de trouver ma propre manière de sauter en procédant par tatônnements. Aujourd’hui, j’ai l’impression de l’avoir enfin trouvée. J’ai réussi à apprécier mon propre potentiel et à conclure ce tournoi par un bon saut. »
Takanashi n’a pas l’intention de s’arrêter maintenant, bien au contraire. Ses yeux sont résolument tournés vers les Jeux olympiques de Pékin de 2022.
Takanashi Sara
Née à Hokkaidô en 1996, Takanashi Sara commence les compétitions de saut à ski dès l’âge de huit ans. Elle gagne la coupe continentale de saut à ski en 2011 à l’âge de 15 ans, devenant la plus jeune championne reconnue par la Fédération internationale de ski. Durant la saison 2012/2013, Takanashi était la plus jeune gagnante de la Coupe du monde de ski de la FIS, hommes et femmes confondus. Takanashi était également positionnée à la quatrième place de l’épreuve individuelle sur tremplin normal lors des Jeux de Sochi en 2014 et a remporté la médaille de bronze lors des Jeux olympiques de PyeongChang en 2018. Depuis le 17 mars 2021, elle possède le record mondial du nombre de victoires (60) de saut à ski en Coupe du monde.
(Photo de titre : Takanashi Sara remporte sa 60e victoire, le 19 février 2021, aux Championnats du monde de saut à ski, à Rasnov, en Roumanie. AFP/Jiji)