Les milles et une merveilles de Kyoto

Kyoto, la ville impériale millénaire : à travers une histoire riche et mouvementée

Histoire

Hashizume Shinya [Profil]

Kyoto a été la capitale du Japon pendant plus de mille ans. Elle a su s’enrichir de traditions architecturales, artistiques et religieuses tout en surmontant les épidémies, les désastres naturels et les guerres. Voici le regard d’un historien japonais sur quelques-uns des évènements qui ont donné forme à la ville au fil d’un millénaire, jusqu’à la seconde moitié du XIXe siècle.

Les traditions culturelles

Les racines des traditions culturelles de Kyoto remontent aux rituels des nobles de la cour et des samouraïs, ainsi que les coutumes du peuple, démontrant une ampleur, une variété, et un niveau de sophistication exceptionnels.

L’anéantissement répété des quartiers du centre dû aux incendies fait que la fleur de la créativité culturelle se trouvait souvent plus en périphérie de la ville. Ce sont les villas d’aristocrates, les bâtiments indépendants des palais, et les temples bouddhiques, parsemés aux confins de la ville, qui représentent la gloire des époques passées, non seulement au niveau de leur architecture, jardins, sculptures religieuses, portes coulissantes et peintures murales, mais aussi pour les arts comme la cérémonie du thé et l’art floral.

Uzamasa, le siège d’un clan venu du continent asiatique dans l’antiquité, est connu pour le temple de Kôryû-ji et sa célèbre statue du Boddhisattva Miroku. À Sagano se trouve le Daikaku-ji qui a été le palais de l’empereur Saga. Okazaki regroupe des propriétés culturelles, ayant été dans le passé le site de plusieurs temples construits par l’empereur Shirakawa (1053-1129), y compris le Hosshô-ji.

À Uji, le pavillon du phénix du temple Byôdô-in symbolise la façon dont le Japon a transformé des antécédents chinois en sa propre culture. Tout comme l’élégant Amida-dô de Hôkai-ji, il démontre la ferveur des croyances des aristocrates de l’époque Heian (794-1185) qui croyaient que le monde était entré dans l’ère dégénérée du mappô, ou « la fin de la Loi ».

Le pavillon du phénix de Byôdô-in, à Uji, est un exemple classique d’un temple dédié au bouddha Amida. Photo de 2006 (Jiji)
Le pavillon du phénix de Byôdô-in, à Uji, est un exemple classique d’un temple dédié au bouddha Amida. Photo de 2006 (Jiji)

Pendant l’époque de Muromachi (1333-1568), le shogun Ashikaga chercha à fusionner l’esthétique des samouraïs et celle de la cour, créant ce qu’on appelle la culture de Kitayama. Le pavillon d’or du temple Kinkaku-ji (Rokuon-ji de son nom officiel) regroupe l’architecture traditionnelle shinden-zukuri et le nouveau style Zen (Chan) importé de Chine.

Le pavillon d’or (Kinkaku-ji), à Kyoto. Le shogun Ashikaga Yoshimitsu acheta la villa au clan Saionji, exprimant sa volonté qu’il soit converti en temple après sa mort. Photo de 2014 (Jiji)
Le pavillon d’or (Kinkaku-ji), à Kyoto. Le shogun Ashikaga Yoshimitsu acheta la villa au clan Saionji, exprimant sa volonté qu’il soit converti en temple après sa mort. Photo de 2014 (Jiji)

Par contre, le temple de Ginkaku-ji (Jishô-ji de son nom officiel) symbolise la culture de Higashiyama qui a prospéré sous le shogun Ashikaga. Situé dans un jardin du style kaiyû, avec un étang au milieu, c’est le prototype du style shoin-zukuri qui deviendra la norme pour les bâtiments et pièces traditionnels. L’architecture typique sukiya se trouve aussi dans beaucoup de bâtiments autour de Kyoto comme, par exemple, le temple Manshu-in, la villa impériale de Katsura, et la villa impériale de Shûgaku-in.

Le pavillon d’argent (Ginkaku-ji), à Kyoto, devient un temple après la mort du shogun Ashikaga Yoshimasa, Photo de 1998 (Jiji)
Le pavillon d’argent (Ginkaku-ji), à Kyoto, devient un temple après la mort du shogun Ashikaga Yoshimasa, Photo de 1998 (Jiji)

Après la construction de la forteresse de Hideyoshi et l’amélioration des quartiers résidentiels, les habitants de Kyoto appelaient la partie qui datait de Heian-kyô rakuchû, et les champs et collines aux alentours rakugai. Ces noms venaient d’une abréviation de la prononciation japonaise de Luoyang (rakuyô), un synonyme pour la capitale, et voulaient dire « à l’intérieur de la ville » et « à l’extérieur de la ville ». Ensemble, rakuchû rakugai faisait référence à toute la vaste zone, allant des rues des familles marchandes aux champs vallonnés.

Au fil des générations, Kyoto a construit une culture japonaise à partir d’éléments venant de l’étranger. Elle a mélangé puis raffiné, de façon à créer de nouveaux styles qui sont devenus des traditions emblématiques.

(Photo de titre : une vue à vol d’oiseau de la ville de Kyoto et ses environs telle qu’elle apparaissait durant l’époque de Muramachi [1333-1568]. Aflo)

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Hashizume ShinyaArticles de l'auteur

Professeur à l’Université préfectorale d’Osaka, professeur et directeur de l’Institut stratégique pour l’industrie du tourisme. Né en 1960 à Osaka. Il étudie l’architecture à la faculté d’ingénierie de l’Université de Kyoto, où il obtient aussi son master. Docteur en ingénierie et spécialiste de l’histoire de l’architecture et de l’urbanisme. Il est également conseiller spécial auprès de la préfecture d’Osaka et de la ville d’Osaka. Il est l’auteur de nombreux ouvrages sur sa ville natale.

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