Légende des ovnis au Japon : l’apparition d’un vaisseau et d’une femme mystérieuse au XIXe siècle

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Au Japon, déjà 140 ans environ avant que n’apparaissent les témoignages sur les ovnis aux États-Unis, un étrange récit relaté dans plusieurs documents du XIXe siècle raconte l’apparition réelle d’un objet volant en forme de disque qui se serait échoué sur l’Archipel en 1803, avec à son bord une femme aux cheveux rouges et parlant un langage inconnu. Nous avons demandé des précisions à Tanaka Kazuo, qui s’est longtemps plongé sur cette histoire intitulée utsuro-bune.

Tanaka Kazuo TANAKA Kazuo

Professeur émérite de l’Université de Gifu. Né en 1947. Spécialisé en ingénierie optique de l’information. En plus de sa spécialité, il a enseigné la « pensée sceptique » en sciences humaines. En 2009, il a publié sous le pseudonyme de Kamon Shôichi « Le mystère de l’Utsuro-bune de l'époque d’Edo » (Edo Utsurobune mystery, éd. Rakkousha). Puis, en 2019, il publie un mémoire de recherche en anglais : The Mystery of Utsuro-bune. Tout en faisant connaître l’intérêt de ce corpus à l'étranger, il présente chaque année les avancées de ses recherches dans des conférences grand public à l’Université de Gifu.

Vaisseau en forme de disque et caractères mystérieux

Le folkloriste Yanagita Kunio était d’avis que la légende de l’utsuro-bune n’avait aucun fondement réel. « Pourtant, le récit de l’utsuro-bune de Hitachi est clairement différent des autres histoires de vaisseaux étrangers naufragés sur les côtes japonaises, déclare M. Tanaka.

« D’abord, la date de 1803 est précisée. Le plus étrange, ce sont les dessins d’un vaisseau en forme de disque qui accompagnent tous les récits. J’ai l’impression que cela est basé sur un événement réel. Le problème, évidemment, c’est que le pays était pratiquement fermé à l’époque, et à supposer qu’un navire étranger se soit échoué et que des étrangers aient mis le pied sur le sol japonais, cela ne pouvait pas passer inaperçu. Les autorités locales auraient nécessairement procédé à une enquête et nous devrions en avoir une trace. Par exemple, en 1824, des marins anglais se sont échoués sur la plage de Ôtsuhama (ville de Kita-Ibaraki), ce qui conduisit l’année suivante à un décret d’expulsion de tout navire étranger. Il n’est pas impossible que le rivage de Kashima-nada ait également fait l’objet d’une surveillance pendant un certain temps, ce qui aurait pu être relié à la légende de l’utsuro-bune qui existait déjà. » 

Les vêtements de la femme de l’utsuro-bune sont différents selon les documents, comme sont différents la forme et la taille du vaisseau en forme de disque lui-même. Par exemple dans « Recueil de récits de navires à la dérive » (Hyôryûki-shû), il mesure 1 jô 1 shaku (soit environ 3,3 mètres) de haut pour 3 ken (environ 5,4 mètres) de large ; il est en bois de rose et en fer, et possède une fenêtre de verre ou de cristal.

« Il n’est pas établi que ce Hyôryûki-shu soit un document officiel. Seuls deux tomes subsistent, et mis à part l’utsuro-bune, presque tous les événements qui y sont rapportés sont authentiques. Mais à tout le moins, on peut se dire que le rédacteur de ce texte considère l’accostage de l’utsuro-bune comme une réalité », explique M. Tanaka.

Les mystères autour de l’utsuro-bune n’ont pas fini de livrer leurs secrets. En particulier, que signifient les mystérieux signent qui apparaissent dans le vaisseau ?

« On a dit qu’il s’agirait de signes de frise appelés ranji-waku, comme ceux qui forment des frises autour des estampes... Effectivement, il est possible que ce ne soit que des signes décoratifs. Et évidemment, la possibilité qu’il s’agisse d’une écriture extra-terrestre n’est pas totalement nulle non plus », dit M. Tanaka en riant.

« Dans l’avenir, nous trouverons peut-être de nouveaux documents concernant l’utsuro-bune et nous ferons de nouvelles découvertes. C’est l’intérêt particulier de cette légende que de permettre diverses hypothèses. Il est tout de même extraordinaire de penser que 140 ans avant la légende des ovnis, il existait une histoire au Japon susceptible de faire autant travailler l’imagination ! Cela renforce le sentiment de la richesse et de l’intérêt de la culture japonaise. »

Un extrait de « Recueil de récits de navires à la dérive » (Anonyme). Le vaisseau mystérieux échoue en un lieu dit plage de Harasha-ga-hama, dans le pays de Hitachi. Il transporte une jeune femme de de grande beauté et de belle prestance âgée d’environ 18-20 ans, pâle de visage, aux cheveux et sourcils rouges. Personne ne comprend son langage, elle vient d’un pays inconnu. Elle tient dans ses bras un coffret de bois blanc qui semble précieux. Elle évite d’attirer les gens. Des signes inconnus sont dessinés à l’intérieur de son vaisseau.
Un extrait de « Recueil de récits de navires à la dérive » (Anonyme). Le vaisseau mystérieux échoue sur la plage de Harasha-ga-hama, dans le pays de Hitachi. Il transporte une jeune femme de de grande beauté et de belle prestance âgée d’environ 18-20 ans, pâle de visage, aux cheveux et sourcils rouges. Personne ne comprend son langage, elle vient d’un pays inconnu. Elle tient dans ses bras un coffret de bois blanc qui semble précieux. Elle évite d’attirer les gens. Des signes inconnus sont dessinés à l’intérieur de son vaisseau.

(Texte et interview de Tanaka Kazuo par Itakura Kimie, de Nippon.com. Photo de titre : extrait d’une partie de de « Recueil de récits de navires à la dérive ». Collection Iwase, ville de Nishio)

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