Fukuoka, ville portuaire historique du sud-ouest du Japon : des temps anciens jusqu’au XXIème siècle

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Du fait de sa position géographique au nord de l’île de Kyûshû, juste en face du continent eurasiatique, la ville de Fukuoka s’est développée au fil des siècles en jouant un rôle de première importance dans les échanges diplomatiques et commerciaux entre le Japon et le reste du monde. À l’heure actuelle, elle est la métropole régionale la plus active de l’Archipel, avec le taux de création d’entreprises le plus élevé du pays. Voici son histoire.

Et Fukuoka devint une grande ville moderne

Après avoir obtenu officiellement le statut de ville, Fukuoka s’est trouvée en rivalité avec les autres grandes agglomérations de Kyûshû et il lui a fallu du temps avant de devenir la zone urbaine la plus étendue de l’île. En effet, quand le Japon a entrepris de se moderniser activement après la Restauration de Meiji (1868), la plus grande agglomération de Kyûshû était Nagasaki, placée jusque-là sous l’autorité directe du shogun en tant que seul et unique point de contact de l’Archipel avec le monde extérieur. Par ailleurs en termes de démographie, Fukuoka était moins peuplée que Kagoshima qui a joué un rôle majeur dans la Restauration de Meiji au même titre que Kumamoto, dont le château était occupé par le puissant clan des Hosokawa. Dans le nord de l’île, la ville de Yahata avait pris les devants en matière d’industrialisation avec ses aciéries modernes gérées par l’État (une première au Japon). Et le port de Moji était très prospère du fait qu’il abritait le terminus de la première ligne de chemin de fer de la région. Autant d’exemples de réussite en matière de modernisation dans l’histoire de Kyûshû.

En 1910, Fukuoka a eu pour la première fois l’occasion de se développer en tant que grande ville grâce à l’Exposition conjointe des huit préfectures de Kyûshû-Okinawa. Cette manifestation qui a été inaugurée le 11 mars et a pris fin le 9 mai avait pour objectif la promotion du commerce et de l’industrie de la région. Fukuoka en a profité pour se doter d’infrastructures de transport, à commencer par le tramway. La même année, elle a eu la chance de se voir attribuer l’Université impériale de Kyûshû, ce qui en a fait le centre culturel et scientifique de l’île. Enfin au cours des années 1920 et 1930, elle s’est métamorphosée en une agglomération axée sur la consommation et elle est devenue la ville la plus peuplée de l’île Kyûshû.

« Les lieux touristiques de Hakata vus à vol d’oiseau » (Hakata kankô chôkan zu) de Yoshida Hatsuzaburô (1884-1955), un artiste et cartographe japonais de grand renom. Cette œuvre lui a été commandée en 1936 par la Chambre de commerce de Hakata, à l’occasion d’une exposition sur la construction du port de Hakata. (© Musée de la ville de Fukuoka)
« Les lieux touristiques de Hakata vus à vol d’oiseau » (Hakata kankô chôkan zu) de Yoshida Hatsusaburô (1884-1955), un artiste et cartographe japonais de grand renom. Cette œuvre lui a été commandée en 1936 par la Chambre de commerce de Hakata, à l’occasion d’une exposition sur la construction du port de Hakata. (© Musée de la ville de Fukuoka)

Mais après la fin de la Seconde Guerre mondiale, Fukuoka n’avait toujours pas réalisé son rêve de devenir une ville industrielle aussi dynamique que celles du nord de Kyûshû. Il a lui fallu attendre jusqu’à la seconde moitié des années 1960 pour y parvenir. C’est alors qu’elle a adopté une stratégie de planification urbaine avec un « centre de contrôle » et qu’elle a axé son développement sur les industries du secteur tertiaire. L’informatisation qui a débuté dans les années 1980 et la mondialisation ont aussi joué un rôle déterminant à cet égard. Enfin, le passage d’une société de consommation de biens à une société de consommation de services et d’expériences a encore contribué à faire de Fukuoka la terre d’élection des start-ups en relation avec les pays d’Asie.

Une volonté de réécrire son propre passé

L’histoire de la plaine relativement compacte de Fukuoka est étonnante. Car c’est là que la technique de la culture irriguée du riz venue du continent a été mise en œuvre pour la première fois dans l’Archipel et qu’il y a eu une concentration de population suffisante pour donner lieu à l’apparition du petit royaume de Na. Et c’est aussi un lieu dont les habitants ont toujours eu tendance à vivre dans un espace urbain. Au point qu’on a l’impression que la ville n’a pas cessé de réécrire son propre passé.

Le développement actuel de Fukuoka s’inscrit dans le cadre de cette démarche de réécriture de l’histoire. Mais cela ne veut pas dire pour autant que la ville cherche à effacer son passé, bien au contraire. Pour preuve, les multiples campagnes lancées sur place par les archéologues. Les quelque 300 fouilles réalisées sur les sites de Hie/Naka, dans l’arrondissement de Hakata, ont permis de se faire une idée plus précise du royaume de Na. Et les recherches archéologiques menées en 1987 dans le cadre de la rénovation du stade baseball Heiwadai ont abouti à la découverte de vestiges du Kôrokan, un édifice que l’on ne connaissait pour l’essentiel jusque-là que par des sources écrites anciennes. Depuis, l’endroit a été classé site historique national.

Les fouilles archéologiques effectuées dans l’avenue Taihakun, au centre de la ville de Fukuoka, à proximité de la gare de Hakata, ont mis en évidence des strates successifs qui vont du début de l’époque moderne (1573-1867) jusqu’au Moyen Age (1185-1573). (© Centre archéologique de la ville de Fukuoka)
Les fouilles archéologiques effectuées dans l’avenue Taihaku, au centre de la ville de Fukuoka, à proximité de la gare de Hakata, ont mis en évidence des strates successifs qui vont du début de l’époque moderne (1573-1867) jusqu’au Moyen-Âge (1185-1573). (© Centre archéologique de la ville de Fukuoka)

Les fouilles du site de Hakata ont commencé en 1977, dans le cadre de la construction du métro de Fukuoka, et elles se poursuivent encore à l’heure actuelle. Elles ont abouti à la mise au jour de ruines, de grandes quantités de porcelaine importée ainsi que d’autres objets qui ont montré en détails à quoi ressemblait le port de commerce international de Hakata décrit dans les textes anciens. Plus de 300 000 pièces ont ainsi été exhumées et en 2017, 2 138 d’entre elles ont été classées bien culturel national important. Le passé de la ville de Fukuoka est à la hauteur de son présent. Elle en est parfaitement consciente et c’est ce qui explique son remarquable dynamisme et son étonnante réussite.

(Photo de titre : vue aérienne de la ville de Fukuoka. Les grands immeubles que l’on voit au premier plan se trouvent sur des terrains qui ont été gagnés sur la mer avant l’Exposition Asie-Pacifique (Yokatopia) de 1989. © Ville de Fukuoka)

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