Tokyo, une ville en perpétuelle métamorphose

Les mille et un visages de Shinjuku : histoire du quartier le plus animé de Tokyo

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Shinjuku est l’un des quartiers les plus célèbres et les plus vivants de Tokyo, et il fait partie intégrante de l’histoire de la capitale du Japon. Tout a commencé en 1885, quand une petite gare sans grande importance a été construite sur place.

Shinjuku, haut lieu de la contre-culture

Au bout d’un certain temps, la fruiterie de luxe Shinjuku Takano et la boulangerie-café Nakamuraya se sont installées dans des bâtiments modernes. En 1964, l’immeuble qui abritait Kinokuniya a été reconstruit et cette librairie dotée d’un théâtre situé dans le Kinokuniya Hall adjacent, est devenue une référence en la matière au Japon. Au même moment, les pièces de théâtre underground (angura) jouées sous un chapiteau rouge dans l’enceinte toute proche du sanctuaire shintô Hanazono jinja ont eu elles aussi un immense succès.

La sortie est de la gare de Shinjuku dans les années 1950. (Avec l’aimable autorisation du Musée historique de Shinjuku)
La sortie est de la gare de Shinjuku dans les années 1950 (Avec l’aimable autorisation du Musée historique de Shinjuku)

Dans les années 1960, les jeunes et les artistes ont pris l’habitude de se rassembler dans les cafés de Shinjuku où l’on jouait du jazz et de la musique branchée pour discuter d’art et de politique. Le célèbre café Fûgetsudô, fermé en 1973, a entre autres servi de refuge à des déserteurs américains opposés à la guerre du Vietnam qui cherchaient à rejoindre la Suède. L’ambiance était électrique comme en témoigne le producteur de cinéma et de théâtre Kuzui Kinshirô (1925-2014), qui dirigeait le cinéma d’avant-garde Art Theater Shinjuku Bunka où étaient projetés les films de la Guilde japonaise d’art théâtral (ATG). D’après lui, « dans ce quartier, on vivait nuit et jour des histoires bien plus intenses et bouleversantes que n’importe quel film ou pièce de théâtre. » Une remarque qui est peut-être toujours autant d’actualité dans le Shinjuku d’aujourd’hui.

Un quartier en perpétuelle transformation

A l’ouest de la gare de Shinjuku, il y avait l’usine de traitement des eaux usées de Yodobashi qui a longtemps alimenté les habitants de Tokyo en eau potable. Mais elle a fini par être considérée comme un obstacle au développement de cette partie de la ville. Tant et si bien qu’en 1965, elle a été transférée quelque 20 kilomètres plus loin, en direction de l’ouest. Elle a été remplacée par toute une série d’imposants gratte-ciel, notamment celui conçu par le grand architecte Tange Kenzô (1913-2005) pour abriter le siège du gouvernement métropolitain de Tokyo. Plusieurs grands magasins se sont par ailleurs installés du côté de la sortie ouest de la gare et c’est ainsi que Shinjuku est devenu l’un des quartiers commerçants le plus emblématiques de l’Archipel. Par la suite, d’autres gratte-ciel ont fait leur apparition aux alentours de la sortie sud de la gare et du côté sud du Kôshû-Kaidô, l’ancienne route de l’époque d’Edo.

En 1965, l’usine de traitement des eaux usées de Yodobashi, située à proximité de la sortie ouest de la gare de Shinjuku, a été transférée à une vingtaine de kilomètres de là, en direction de l’ouest. (Avec l’aimable autorisation du Musée historique de Shinjuku)
En 1965, l’usine de traitement des eaux usées de Yodobashi, située à proximité de la sortie ouest de la gare de Shinjuku, a été transférée à une vingtaine de kilomètres de là, en direction de l’ouest. (Avec l’aimable autorisation du Musée historique de Shinjuku)

 Une forêt de gratte-ciel a remplacé l’ancienne usine de traitement des eaux usées de Yodobashi, à la sortie ouest de la gare de Shinjuku. (Pixta)
Une forêt de gratte-ciel a remplacé l’ancienne usine de traitement des eaux usées de Yodobashi, à la sortie ouest de la gare de Shinjuku. (Photo : Pixta)

Les choses ont bien changé depuis le temps où la petite gare de Shinjuku a fait son apparition au milieu de nulle part, en 1885. Shinjuku est à présent un quartier débordant d’activité où les gratte-ciel étincelants voisinent avec de minuscules ruelles dignes de l’époque où on s’y livrait à des activités de marché noir. Et ça n’est pas fini. Un nouveau projet de réorganisation de cet espace urbain est déjà à l’œuvre. Au point qu’on pourrait comparer Shinjuku à la Sagrada Familia de Barcelone, dont le chantier semble ne jamais devoir prendre fin. Quoi qu’il en soit, on peut être à peu près certain que ce quartier aux mille et un visages va rester l’une des zones commerciales phare de l’Asie sans jamais perdre pour autant son caractère impertinent et ouvert à tous.

(Photo de titre : l’avenue Shinjuku en 1932. Avec l’aimable autorisation du Musée historique de Shinjuku)

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