Le mariage aujourd’hui au Japon

Le « konkatsu » : la chasse au partenaire de mariage, plus importante que la recherche de l’amour au Japon

Société

Satô Shin [Profil]

Le « konkatsu », ou la recherche d’un(e) conjoint(e), est un véritable parcours du combattant au Japon. À une époque où de plus en plus de jeunes japonaises considèrent qu’elles devraient rester au foyer pendant que l’homme travaille, l’avènement des rencontres en ligne stimule les femmes et permet la promotion du mariage, considéré comme un moyen d’augmenter le faible taux de natalité de l’Archipel. L’amour, quant à lui, est loin d’être la priorité.

Un gouvernement japonais qui ne se soucie pas de l’opinion du peuple

Quelles transformations le mariage connaîtra-t-il encore ? Un essayiste japonais avait déclaré : « Utiliser des calendriers en ligne pour montrer publiquement quand leurs partenaires sexuels (c’est-à-dire leurs amants ou leurs conjoints) ne sont pas là, et le recrutement actif de partenaires extra-conjugaux sont monnaie courante dans le monde des sites de rencontres, des applications de correspondance et des clubs de rencontres ». Il a appelé cette tendance émergente « le partage du corps », en s’inspirant du concept de l’économie de partage. À mesure que les tabous sur les négociations prénuptiales et les relations amoureuses extra-conjugales diminue, il envisage que l’institution du mariage change afin que chaque couple puisse librement choisir quels devraient être ses devoirs et ses privilèges dans le cadre du mariage.

Même s’il ne s’agit que d’une vision, il ne fait aucun doute que l’institution du mariage est prise dans une vague de changement. En particulier, sous nos yeux aujourd’hui, se posent les questions des couples qui conservent des noms de famille séparés et des mariages homosexuels. Dans une enquête réalisée par le bureau du Cabinet en 2017, 42,5 % des hommes et des femmes de moins de 60 ans ont répondu que cela ne les dérangerait pas que la loi change afin que les personnes mariées puissent conserver leur nom de famille d’origine si elles le préféraient. En ce qui concerne les mariages homosexuels, un sondage d’opinion publique réalisé en 2019 par la NHK a révélé que 51 % des sondés ont répondu que le mariage homosexuel devrait être reconnu. En particulier, 70 % des hommes et 80 % des femmes de 40 ans et moins ont répondu que le mariage entre hommes et femmes de même sexe devrait être reconnu par l’État.

Contrairement à ce soutien public, les partis au pouvoir aujourd’hui se montrent hostiles à ces avancées, ou les considèrent avec prudence. Il est donc difficile d’espérer un changement dans un proche avenir. Dans cette situation d’impasse, l’un des futurs possibles est que le mariage en tant qu’institution légale perde de sa crédibilité aux yeux du public. Même aujourd’hui, les jeunes comprennent qu’il existe de nombreux couples homosexuels et conjoints de fait qui ne souhaitent pas changer de nom de famille.

Combien de temps l’institution juridique actuelle du Japon peut-elle continuer à avancer tête baissée sans considérer la place que devraient prendre ces personnes ?

De plus en plus de jeunes femmes pensent à rester au foyer

Notons toutefois que les jeunes ont des conceptions différentes en tête lorsqu’ils imaginent ce qu’est un couple. Alors que l’idée que « les maris devraient travailler à l’extérieur et les femmes devraient rester à la maison » est généralement en déclin, cette opinion est en augmentation chez les femmes entre 20 et 29 ans, et ce, depuis environ 20 ans. Un bon nombre de jeunes, tout en adoptant une vision libérale du mariage – y compris les couples de même sexe et les conjoints de fait – recherchent un mode de vie familial plus conservateur pour eux-mêmes.

Le konkatsu pour redynamiser la natalité

Le konkatsu attire l’attention en tant que solution à la stagnation du taux de natalité au Japon, où le nombre d’enfants né de couples non mariés est extrêmement bas et où le taux de nuptialité est donc déterminant pour améliorer la natalité. Selon Yamada Masahiro, le soutien public au mariage est devenu une préoccupation croissante du groupe de recherche gouvernemental sur les questions de natalité depuis l’invention du mot konkatsu.

En 2012, Shirakawa Tôko et d’autres ont proposé le terme ninkatsu (rechercher des tentatives de tomber enceinte), à la suite du shûkatsu et du konkatsu, qui s’est également taillé une reconnaissance sociale considérable par la suite.

Le gouvernement s’est également intéressé au konkatsu et au ninkatsu, et a depuis introduit des mesures de soutien à ces activités dans son programme politique. L’institution légale du mariage peut-elle être maintenue ? Comment traiter les questions du mariage homosexuel et des noms de famille séparés ? Quelle forme la promotion des femmes dans la société prendra-t-elle ? À quoi ressembleront les familles dans le futur ? Pour façonner l’avenir de la société avec un large soutien du public, ces questions doivent être discutées dans l’arène politique et des personnes de tous les horizons doivent participer au débat.

Le konkatsu n’est plus seulement une tendance, c’est une question politique vitale.

(Photo de titre : Pixta)

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Satô ShinArticles de l'auteur

Spécialiste en politique japonaise contemporaine et en histoire politique et diplomatique japonaise. Né en 1988, il a obtenu son diplôme de premier cycle et son doctorat à l’Université de Tokyo. Depuis 2015, il est professeur assistant au Centre de recherche pour les sciences et technologies avancées de l’Université de Tokyo. C’est également l’auteur de « Le réel des années 1960, Suzuki Mosaburô » (Suzuki Mosaburô, 60 nendai no real), et « Introduction à l’histoire de la pensée du mariage japonais » (Nihon konkatsu shisôshi josetsu).

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