L’équipe japonaise de rugby a conquis les cœurs du monde entier

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William Horsley [Profil]

Les prouesses inattendues du Japon lors de la Coupe du monde de rugby l’ont mené jusqu’aux quarts de finale, où il s’est incliné devant l’Afrique du Sud, mais les Brave Blossoms – et le pays hôte dans son ensemble – ont encore beaucoup de chemin à faire. Un journaliste britannique chevronné dresse ici l’état des lieux du rugby japonais.

Un nouveau chapitre d’une longue histoire

Née en 1987, la Coupe du monde de rugby a déjà enfanté tout un panthéon d’idoles, tel l’Anglais Jonny Wilkinson, entré d’emblée dans la légende pour l’essai, marqué à la dernière minute contre l’Australie, qui a permis à son équipe de remporter la finale en 2003, ou Jonah Lomu, le géant de 119 kilos et 1,96 mètres, ailier de l’équipe néo-zélandaise, qui a marqué un nombre record de 15 essais au cours de deux coupes du monde dans les années 1990. Aujourd’hui, ce sont Michael Leitch, Matsushima Kôtarô, Fukuoka Kenki et leurs coéquipiers qui ont fait leur entrée au tableau d’honneur de ceux qui ont écrit l’histoire mondiale du rugby.

Ce n’est que tout récemment qu’un historien anglais, Mike Galbraith, a découvert des preuves attestant que le rugby se pratiquait à Yokohama dès les années 1860, à l’initiative d’un contingent de soldats britanniques expédié sur place pour protéger le consulat établi dans la ville portuaire après qu’un samurai eut dégainé son sabre et tué un marchand anglais répondant au nom de Charles Richardson.

Richardson, dit-on, avait commis l’erreur de ne pas céder respectueusement le passage à un daimyô (seigneur féodal) en voyage. L’histoire nous apprend que le Foot Ball Club (Club de rugby) de Yokohama a été fondé en 1866, ce qui en fait l’un des plus anciens clubs de rugby du monde.

Une plaque commémorative célébrant le « lieu de naissance du rugby » au Japon a été posée à Yokohama le 5 septembre 2019. (Jiji).
Une plaque commémorative célébrant le « lieu de naissance du rugby » au Japon a été posée à Yokohama le 5 septembre 2019. (Jiji).

Il est donc tout naturel que la finale de la Coupe du monde se joue au stade de Yokohama, tout près du lieu où le rugby est né au Japon dans les dernières années du shogunat Tokugawa, juste avant que la Restauration de Meiji donne le coup d’envoi à la modernisation rapide du pays. Et la meilleure suite qui pourrait être donnée à la prouesse que les Brave Blossoms ont accomplie dans ce tournoi, en devenant les premiers nouveaux venus à parvenir en quarts de finale, serait que les nations appartenant au Niveau Un du rugby trouvent une solution pour intégrer le Japon dans le calendrier des compétitions internationales de haut niveau. Cela offrirait aux joueurs talentueux de ce pays la meilleure opportunité d’accomplir des prouesses encore plus spectaculaires dans les futurs championnats du monde.

Le Japon a un joli palmarès en termes d’accueil d’événements sportifs internationaux, depuis les Jeux olympiques de Tokyo en 1964 jusqu’à l’actuelle Coupe du monde de rugby, en passant par la Coupe du monde de football, qu’il a accueillie en collaboration avec la Corée en 2002. La Coupe du monde 2019 de rugby a renforcé la confiance en soi du Japon à un moment où les tensions avec ses voisins sont un sujet de préoccupation. Et le succès fabuleux d’une équipe multiethnique portant des maillots où était écrit « Nippon » représente un pas en avant important – un progrès d’un genre différent.

Mais quel cadeau le Japon a-t-il fait au monde cet automne ? Une expérience joyeuse, tempérée par le regret partagé dû aux pertes humaines provoquées par une catastrophe naturelle, et une coupe du monde de rugby qui restera dans les mémoires non seulement pour ses grands matchs mais aussi pour l’extraordinaire esprit d’équipe dont ont fait preuve tant l’équipe nationale que la population du Japon.

(Photo de titre : des fans venus du monde entier se rassemblent devant la gare de Kamaishi le 24 septembre, la veille du match de la Coupe du monde de rugby 2019 opposant les îles Fidji à l’Uruguay. Jiji Press)

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William HorsleyArticles de l'auteur

Journaliste, consultant international et directeur du Centre pour la liberté des médias de l’Université de Sheffield, Royaume-Uni. Titulaire d’un diplôme d’études japonaises de l’Université d’Oxford. Chef du bureau de la BBC au Japon de 1983 à 1990, avant de devenir correspondant de la BBC en Allemagne et correspondant pour les affaires mondiales. Coauteur (avec Roger Buckley) de « Le Japon, nouvelle superpuissance » (Nippon, New Superpower). Auteur du Guide de sécurité des journalistes publié par l’OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe). Président pour le Royaume-Uni de l’Association des journalistes européens. Contributeur de la BBC, d’Al Jazeera, de CNN et du quotidien japonais Mainichi Shimbun. Il vit à Londres et se rend souvent au Japon.

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