Pourquoi tant de nationalités différentes dans l’équipe nationale japonaise de rugby ?

Sport Événement

Ôtomo Nobuhiko [Profil]

L’équipe du Japon de rugby se compose de joueurs venus des quatre coins du monde. Chacun d’eux défend le drapeau du pays du Soleil Levant pour des raisons qui lui sont propres, mais tous ont en commun la capacité de jouer au rugby à la japonaise. La proportion importante de ceux qui sont nés à l’étranger est le reflet de la diversité croissante de l’Archipel. Le 20 septembre dernier, les « Brave Blossoms » (« Les fleurs courageuses ») ont signé un bon début en Coupe du monde de rugby 2019, en battant la Russie 30 à 10.

Un choix très difficile pour Michael Leitch

Michael Leitch assume pour sa part le rôle de colonne vertébrale de l’équipe japonaise. Il est de nationalité néo-zélandaise avec des racines écossaises du côté de son père et des origines fidjiennes par sa mère qui a émigré en Nouvelle-Zélande. À l’âge de 15 ans, il a décidé d’aller au Japon. Voici comment il explique les choses. « Quand j’étais en Nouvelle-Zélande, j’ai eu l’occasion de  pratiquer avec des joueurs japonais venus étudier le rugby sur place. J’ai été surpris de voir à quel point ils étaient doués et c’est ce qui m’a donné envie d’aller pratiquer ce sport au Japon. »

À l’époque, Michel Leitch était un gringalet dont le gabarit et les moyens physiques n’avaient rien à voir avec les mensurations impressionnantes habituelles des rugbymen néo-zélandais. Il a donc été d’autant plus séduit lorsqu’il a rencontré des joueurs japonais de son âge « incroyablement bons » en dépit de leur petite taille. Et s’il a choisi l’Archipel, ce n’est absolument pas parce que c’est un « pays où le niveau du rugby est faible ».

Grâce à un ami d’enfance japonais, le jeune garçon a réussi à s’inscrire au lycée Yamanote de Sapporo. Pour améliorer sa puissance physique, il s’est soumis à un entrainement intensif et à un régime alimentaire conséquent. Sa famille d’accueil tenait un restaurant de sushi si bien qu’il ne manquait jamais de poisson frais. À cela venaient s’ajouter les multiples tartines de pain beurrées qu’il engouffrait chaque soir avant d’aller se coucher. À force de s’entrainer inlassablement sur des terrains dépourvus de gazon – une chose impensable en Nouvelle-Zélande –, Michael Leitch s’est blessé à de multiples reprises, mais il a aussi acquis la force physique, les compétences techniques et l’esprit combatif qui l’ont rendu célèbre.

Michael Leitch du temps où il était étudiant à l’Université Tôkai de Tokyo. On a du mal à le reconnaître tant il était longiligne par rapport à aujourd’hui. Mais cela n’a pas empêché le jeune joueur d’être sélectionné pour défendre les couleurs du Japon dès 2008, à l’âge de 20 ans.  (Photo : Ôtomo Nobuhiko)
Michael Leitch du temps où il était étudiant à l’Université Tôkai de Tokyo. On a du mal à le reconnaître tant il était longiligne par rapport à aujourd’hui. Mais cela n’a pas empêché le jeune joueur d’être sélectionné pour défendre les couleurs du Japon dès 2008, à l’âge de 20 ans.

À un moment donné, Michael Leitch s’est trouvé confronté à un choix difficile, celui du pays qu’il représenterait lors des matches internationaux. Il avait trois possibilités : la Nouvelle-Zélande, son pays natal, les îles Fidji, la patrie de sa mère, et le Japon, où il avait choisi de vivre.

« J’étais indécis parce que je ne me sentais pas totalement néo-zélandais ou fidjien. Au Japon, les gens me regardaient comme un étranger mais je savais que si je retournais dans mon pays natal, je serais considéré de la même manière. Je ne me sentais pleinement intégré nulle part. »

Face à un choix aussi cornélien, Michael Leitch a fini par opter pour le Japon parce que c’est l’endroit où il avait pu se former et devenir ce qu’il était.

Suite > Une capacité à s’adapter au « rugby japonais »

Tags

événement étranger sport rugby

Ôtomo NobuhikoArticles de l'auteur

Journaliste sportif. Né en 1962 à Kesennuma, dans la préfecture de Miyagi. Diplômé de l’Université Waseda. Travaille en tant que reporter spécialiste du rugby pour le journal Chûnichi Sports de Tokyo tout en écrivant des articles pour d’autres périodiques, notamment Sports Graphic Number et Rugby Magazine. Auteur de nombreux ouvrages sur le rugby dont « Le Rêve de Kamaishi » (Kamaishi no yume) et « Un Esprit immuable » (Fudô no tamashii).

Autres articles de ce dossier