Les châteaux de montagne au Japon et leurs systèmes de défense

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Nakai Hitoshi [Profil]

Les châteaux de montagne du Japon du XVe et XVIe siècle sont dotés d’un grand nombre de caractéristiques innovantes conçues pour les adapter au mieux à la morphologie locale du terrain. Un spécialiste des châteaux nous parle ici de leur construction et de la façon dont ils étaient défendus.

Murs en pierres et résidences

Au début du XVIe siècle, les châteaux de montagne équipés de murs en pierres ont proliféré depuis les préfectures de Nagano et de Gifu jusqu’au nord de l’île de Kyûshû. En règle générale, seule une partie de l’intérieur des châteaux était dotée de ces ouvrages, dont la hauteur ne dépassait pas quatre mètres. Mais le château de Kannon-ji, construit au milieu du siècle dans la préfecture de Shiga, était entièrement fait de murs en pierres, dont certains avaient plus de cinq mètres de haut. Parmi les pierres utilisées, beaucoup mesuraient plus d’un mètre de long. Des techniques empruntées à l’architecture des temples ont été employées pour la construction des murs.

Haut mur de pierre des ruines du château de Kannon-ji, dans la préfecture de Shiga
Haut mur de pierre des ruines du château de Kannon-ji, dans la préfecture de Shiga

Le seigneur féodal Miyoshi Nagayoshi (1522-1564) a adopté avec enthousiasme les murs de pierre, au point d’en construire entre les crêtes au château d’Akutagawasan et d’en couvrir une grande partie du terrain du château d’Iimori, dans la préfecture d’Osaka.

Mur construit en gros blocs de pierre des ruines du château de Iimori, dans la préfecture d’Osaka
Mur construit en gros blocs de pierre des ruines du château de Iimori, dans la préfecture d’Osaka

Dans les châteaux du seigneur Miyoshi, on pense que les résidences se trouvaient en hauteur plutôt qu’au pied des montagnes. Des fouilles effectuées au château d’Akutagawasan ont mis au jour les fondations en pierre d’une résidence dans l’enceinte principale, à la cime de la montagne. Dans la seconde moitié de la période des Provinces Combattantes, les châteaux de montagne des seigneurs se sont en général écartés de la formule où les guerriers vivaient à l’écart, en dessous du château. Ils se sont convertis à un modèle unifié, où ils vivaient sur la montagne même. Leurs familles, semble-t-il, les accompagnaient. Des vestiges de grands bâtiments ont également été découverts aux châteaux d’Odani et de Kannon-ji, dans la préfecture de Shiga.

Château d’Odani, dans la préfecture de Shiga, où les résidences découvertes lors d’une fouille indiquent que des familles vivaient en cet endroit.
Ici se trouvait le château d’Odani, dans la préfecture de Shiga, où les résidences découvertes lors d’une fouille indiquent que des familles vivaient en cet endroit.

On entend souvent dire qu’il ne reste plus rien à voir dans les châteaus de montagne. Pourtant, les vestiges d’ouvrages défensifs tels que les kuruwa, dorui et horikiri sont bel et bien observables et offrent l’opportunité de se faire une idée de l’atmosphère qui régnait à l’époque des Provinces Combattantes. C’est une expérience palpitante que de se promener dans les ruines et les parcourir du regard pour voir ce qu’auraient vu les défenseurs. Sans doute contemplaient-ils un vaste territoire, ses villages, ses routes, ses rivières, son littoral et même des forteresses ennemies. La vérité historique que restituent ces aspects visibles de la morphologie du terrain et des édifices nés de la main de l’homme donne la raison de l’emplacement des châteaux.

(Photo de titre : réseau de douves et de talus dans les ruines du château de Yamanaka, préfecture de Shizuoka. PIixta. Toutes les autres photos sont de l’auteur)

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Nakai HitoshiArticles de l'auteur

Professeur à l’Université préfectorale de Shiga. Spécialiste de l’archéologie, il s’intéresse tout particulièrement aux châteaux médiévaux et prémodernes, ainsi qu’aux tombes des seigneurs féodaux. Né en 1955 dans la préfecture d’Osaka. Titulaire d’un diplôme d’histoire de l’Université de Ryûkoku. Il a occupé différents postes, dont celui de directeur du Musée d’histoire du château de Nagahama, avant de devenir professeur associé à l’Université préfectorale de Shiga en 2011. Il a pris ses fonctions actuelles en 2013.

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