Les châteaux de montagne au Japon et leurs systèmes de défense

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Nakai Hitoshi [Profil]

Les châteaux de montagne du Japon du XVe et XVIe siècle sont dotés d’un grand nombre de caractéristiques innovantes conçues pour les adapter au mieux à la morphologie locale du terrain. Un spécialiste des châteaux nous parle ici de leur construction et de la façon dont ils étaient défendus.

Améliorer la défense

Dans la seconde moitié de la période des Provinces Combattantes, les améliorations apportées aux châteaux de montagne ont contribué à leur renforcement. Grâce au tracé incurvé plutôt que droit donné aux ouvrages en terre entourant l’enceinte kuruwa, il est devenu possible de contrer les percées de l’ennemi en l’attaquant sur ses flancs aussi bien que de face. Les attaques de flanc se pratiquaient également contre les soldats en train de franchir le koguchi, ou entrée du château.

Murs en terre incurvés des ruines du château de Katsuga, dans la préfecture de Kagawa
Les ruines des murs en terre incurvés du château de Katsuga, dans la préfecture de Kagawa

Le koguchi lui aussi a été modifié à de nombreuses reprises. Au début, ce n’était qu’une simple ouverture dans les murs en terre, mais le kuichigai no koguchi, apparu plus tard, mit fin à l’alignement des murs, avec pour résultat qu’il fallait effectuer un tournant pour pénétrer dans l’enceinte kuruwa, ce qui interdisait aux attaquants de foncer droit devant.

L’entrée kuichigai no koguchi des ruines du château de Matsuoyama, dans la préfecture de Gifu
L’entrée kuichigai no koguchi des ruines du château de Matsuoyama, dans la préfecture de Gifu

L’étape suivante a consisté à créer une enceinte carrée dans l’entrée même du château, où les défenseurs pouvaient arroser les assaillants de flèches tirées dans trois directions. Ce nouveau modèle, le masugata koguchi, fut intégré dans la génération suivante de châteaux, et on peut le voir aujourd’hui dans un grand nombre de ruines.

L’umadashi constitue lui aussi une innovation. Cette esplanade, reliée à l’enceinte kuruwa centrale par des ponts en terre franchissant la douve principale, offrait une protection supplémentaire en cas d’attaque directe contre l’entrée. Les clans Takeda et Tokugawa ont eu recours à des modèles en demi-cercle. Toutes les entrées du château de Suwahara, dans la préfecture de Shizuoka, étaient dotées d’un umadashi de ce genre disposé sur leur devant. Le modèle en vigueur dans les châteaux du clan Hôjô et nombre de places fortes de la région du Kantô était quant à lui à angles droits.

L’umadashi en demi-cercle des ruines du château de Suwahara, dans la préfecture de Shizuoka
L’umadashi en demi-cercle des ruines du château de Suwahara, dans la préfecture de Shizuoka

Les douves sèches ont été améliorées grâce à l’adjonction de tranchées parallèles appelées unejô tatebori. Elles sont creusées à la verticale au flanc des contreforts kirigishi. On pense qu’elles empêchaient les soldats ennemis d’escalader les contreforts en diagonale. Le château de Nagano, dans la préfecture de Fukuoka, était ceint de près de 200 de ces tranchées.

Les tranchées parallèles unejô tatebori des ruines du château de Nagano, dans la préfecture de Fukuoka
Les tranchées parallèles unejô tatebori des ruines du château de Nagano, dans la préfecture de Fukuoka

Les talus disposés à l’intérieur des douves contribuaient eux aussi à entraver les mouvements de l’ennemi. Certains d’entre eux dessinaient un motif entrecroisé, appelé horishôji, difficile à franchir. Au château de Yamanaka, dans la préfecture de Shizuoka, le clan Hôjô s’est lancé dans la construction extensive de tranchées dans les douves et de horishôji vers 1587, en prévision d’une attaque du seigneur de guerre Toyotomi Hideyoshi.

Les talus horishôji des ruines du château de Yamanaka, dans la préfecture de Shizuoka
Les talus horishôji des ruines du château de Yamanaka, dans la préfecture de Shizuoka

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Nakai HitoshiArticles de l'auteur

Professeur à l’Université préfectorale de Shiga. Spécialiste de l’archéologie, il s’intéresse tout particulièrement aux châteaux médiévaux et prémodernes, ainsi qu’aux tombes des seigneurs féodaux. Né en 1955 dans la préfecture d’Osaka. Titulaire d’un diplôme d’histoire de l’Université de Ryûkoku. Il a occupé différents postes, dont celui de directeur du Musée d’histoire du château de Nagahama, avant de devenir professeur associé à l’Université préfectorale de Shiga en 2011. Il a pris ses fonctions actuelles en 2013.

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