Les grandes figures historiques du Japon

Fukuzawa Yukichi, le plus grand intellectuel japonais

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Pourquoi le visage de Fukuzawa Yukichi figure-t-il sur les billets de banque japonais à la plus haute valeur (10 000 yens) ? Tout simplement parce que ce personnage est considéré comme le plus important intellectuel du Japon, alors que rien ne l’y prédestinait. Penseur, entrepeneur, essayiste, journaliste, grand connaisseur de l’Occident, mais surtout contributeur précieux au développement de son pays, ses initiatives l’amenèrent à créer la célèbre université Keiô, pionnière d’une éducation nouvelle qui forgea les esprits japonais de demain, et ses écrits n’ont eu de cesse de pousser le Japon à acquérir une indépendance face aux puissances occidentales.

Une relation complexe avec le gouvernement de Meiji

La Restauration de Meiji est réalisée par une nouvelle alliance de daimyô (seigneurs féodaux) lorsque qu’une puissante force rassemblée autour des fiefs de Chôshû et de Satsuma fait tomber le shogunat Tokugawa. Fukuzawa s’est à l’origine méfié du fief de Chôshū car ce dernier avait été partisan d’une doctrine conservatrice guidée par la pharse « Révérer l’empereur, expulser les barbares » (Sonnô Jôi). Mais lorsque  l’intellectuel comprend que le nouveau gouvernement poursuit la politique d’ouverture et d’occidentalisation du shogunat, il ne ménage pas ses efforts pour le soutenir. Fukuzawa est d’ailleurs particulièrement proche de grands politiciens comme Ôkuma Shigenobu et d’Inoue Kaoru qui souhaitent pour le Japon une modernisation sur le modèle britannique, ainsi que d’Iwakura Tomomi qui œuvre à la construction des chemins de fer au Japon.

Fukuzawa, qui avait le rang de hatamoto (guerrier directement affilié au shogun) à l’époque du shogunat, fait partie des vaincus après la Restauration. Néanmoins, ses fameuses six conditions pour un régime éclairé sont graduellement réalisées par les membres du gouvernement favorables au modèle américain ou britannique. Mais cela, jusqu’à ce qu’Ôkubo Toshimichi prenne de fait le pouvoir après le rejet du projet d’invasion de la Corée en 1873. Ce dernier étant partisan du modèle prussien de modernisation, les idées de Fukuzawa perdent alors de leur influence. Si celui-ci accorde une grande importance au libéralisme économique, Ôkubo est plutôt partisan d’une modernisation gérée par l’État. Jusqu’à l’assassinat d’Ôkubo en 1878 par des anciens samuraïs du fief de Satsuma dont il avait écrasé la rébellion en tant que ministre de l’Intérieur, Fukuzawa essaie dans la mesure de ses forces de s’opposer à lui, à travers des ouvrages comme « Pour la division des pouvoirs » (Bunkenron) paru en 1877, et ce, bien qu’il craigne la répression.

Après la mort d’Ôkubo, le gouvernement repasse aux mains d’Ôkuma Shigenobu, un homme dont Fukuzawa était proche. C’est la raison pour laquelle de 1878 à 1881, il publie plusieurs ouvrages importants qui ont pour but de soutenir son ami, et il entreprend aussi la rédaction d’un projet de constitution. Mais ces efforts pour promouvoir une modernisation sur le modèle britannique sont anéantis lorsqu’Ôkuma et les hauts fonctionnaires issus de l’université Keiô sont contraints de démissionner après le changement de gouvernement de 1881. Le nouveau gouvernement formé autour d’Itô Hirobumi (originaire du fief de Chôshū), qui poursuivit la ligne d’Ôkubo, s’attache à renforcer la centralisation de la politique, de l’économie et de l’éducation.

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