GO Journal – Interviews de para-athlètes

Iwabuchi Kôyô : phénomène du tennis de table handisport et Youtubeur

Sport Tokyo 2020

La toute première médaille d’or japonaise aux Jeux paralympiques remonte à 1964, aux Jeux de Tokyo, et a été remportée dans la catégorie double messieurs de tennis de table. Cinquante-sept ans plus tard, c’est un pongiste qui a été choisi comme porte-drapeau de la délégation japonaise à la cérémonie d’ouverture des Jeux paralympiques : Iwabuchi Kôyô. Il nous raconte les intéressantes différences entre le tennis de table classique et le para-tennis de table.

Iwabuchi Kôyô IWABUCHI Kōyō

Joueur de tennis de table handisport, il est touché depuis la naissance par deux maladies congénitales : le syndrome des brides amniotiques, causant un rétrécissement des chevilles et des pieds, et le pied bot, causant ses pieds à tourner en bas et vers l’intérieur. Dès son plus jeune âge, il s’essaie à différents sports, comme le football, le baseball, le golf ou le ski, et c’est à partir du collège qu’il commence le tennis de table. Il participe à des tournois internationaux dès le lycée et grâce à d’excellents résultats, il se qualifie pour les Jeux paralympiques de Rio de 2016.

Faire connaître son sport au monde entier

Iwabuchi a lancé sa propre chaîne YouTube en 2020. Il poste de temps à autre des vidéos sur des sujets divers : explication de son handicap, analyses de ses matchs, entraînements quotidiens, réunions avec ses coéquipiers japonais. Bien sûr, tout cela a commencé par le désir de faire connaître le tennis de table handisport au grand public.

Ses vidéos les plus vues sont des présentations des meilleurs joueurs mondiaux — ses principaux rivaux aux Jeux de Tokyo —, en montrant des matchs qu’il a joués par le passé contre eux. Il analyse les échanges avec des explications simples, tout en ajoutant une pointe d’humour propre au monde du tennis de table handisport. Il lui arrive par exemple de commenter un superbe coup d’un joueur sans bras en s’exclamant : « On dirait qu’il a une main ! »

Iwabuchi estime que la promotion de son sport est aussi importante que la compétition elle-même. À quoi pensent les joueurs pendant les matchs ? Avec quel état d’esprit vont-ils affronter un adversaire ? Sa chaîne est l’occasion pour tout le monde de découvrir l’univers d’un sport méconnu.

Mais YouTube n’est pas l’unique moyen du pongiste pour promouvoir son sport. En novembre 2020, Iwabuchi a organisé un match d’exhibition, qu’il a appelé le « Iwabuchi Open », afin de permettre aux joueurs japonais de ne pas perdre l’habitude de la compétition dans un contexte de crise sanitaire et d’annulation des tournois. Il est très rare qu’un athlète handisport aille lui-même trouver des sponsors pour organiser son propre événement.

« Nous avons organisé le tournoi en prenant des mesures sanitaires rigoureuses. Je veux créer de plus en plus d’événements où les gens peuvent passer du bon temps en regardant des matchs de tennis de table handisport. Je suis bien sûr motivé par le fait de pouvoir jouer, mais aussi par le fait d’accueillir du monde. »

Il explique aussi que les vidéos ne permettent pas de capturer tous les détails que l’on pourrait remarquer en allant à un tournoi : « Quand les gens me regardent jouer sur Youtube, ils disent qu’ils n’ont pas l’impression que je suis handicapé. En effet, ce n’est pas si apparent si l’on ne me regarde que jouer. Mais si vous vous rendez à un tournoi et que vous observez comment les joueurs se préparent avant le match, comment ils se déplacent, vous verrez qu’ils ont tous un handicap, qu’il soit léger ou lourd. Mais même avec ces limitations, dès qu’ils s’affrontent au cours d’un match, ils rivalisent de techniques spectaculaires. Lorsque je suis parti pour la première fois à l’étranger pour une compétition internationale, ce qui m’a le plus surpris, c’est que les joueurs semblaient complètement transformés une fois le match commencé. Ce que je veux, c’est transmettre mon monde, tel que je le ressens, autour de moi. Je pense que c’est ce qui conduira au développement d’une culture du handisport. »

(Extrait d’un article paru le 24 août 2021 dans l’édition numéro 5 du magazine (GO Journal)

Photos : Gottingham
Interview et texte : Zoshigaya Senichi

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handicapé handicap parasport Tokyo 2020 Paralympiques

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