Les mots de l’année 2024
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Après délibération d’un comité d’écrivains, de poètes et autres juges, la maison d’édition Jiyû Kokumin-sha publie tous les ans un recueil de néologismes très attendu, intitulé « Notions de base sur la terminologie contemporaine » (Gendai yôgo no kiso chishiki), où figurent les mots (ou expressions) qui ont le plus marqué l’année dans tous les domaines.
Ce classement offre par la même occasion un panorama de l’esprit du temps qui prévaut au sein de la population japonaise.
Un prix 2024 entaché de fragmentation ?
En 2024, c’est Fute-hodo, le nom raccourci d’une série populaire, qui est le grand gagnant des mots de l’année.
Les sports et le spectacle occupaient une large place dans la liste, sans doute car les Jeux olympiques et paralympiques de Paris ont eu lieu cet été. En outre, les exploits accomplis par Ohtani Shôhei en tant que frappeur des Los Angeles Dodgers désigné pour cette saison, et notamment ses 50 buts volés et 50 coups de circuit, un record de tous les temps, lui ont valu de figurer sur la liste, via l’expression 50-50. En parallèle, l’équipe équestre médaille de bronze olympique et Kitaguchi Haruka, médaille d’or du javelot féminin, ont fourni respectivement shorô Japan, un terme (parfois péjoratif) évoquant leur âge relativement avancé, et meigen ga nokose nakatta, une formule exprimant le regret de l’athlète de n’avoir rien eu de mémorable à dire lors de sa victoire.
L’année 2024 s’est avérée difficile pour ceux qui cherchaient des réponses un tant soit peu réjouissantes, ont remarqué nombre de juges. Le linguiste Kindaichi Hideho a observé qu’il s’agit d’une année où il suffisait de regarder les informations tous les jours pour avoir le moral en berne, tandis que la dessinatrice de manga et chroniqueuse Shinsan Nameko (Ikematsu Emi) ainsi que le comédien Patrick Harlan ont choisi d’autres expressions provenant de la longue liste des lauréats, telles que les tokuryû et les « emplois illégaux » white anken confiés par des criminels à des gens en attente désespérée d’un jour de paye dans une économie en crise.
Ôtsuka Yôko, rédactrice en chef de « Notions de base sur la terminologie contemporaine », a remarqué que, de nos jours, la société semble de plus en plus fragmentée (comme l’indique le mot kaiwai, l’un des finalistes répertoriés ci-dessous). Dans ce contexte, peut-être est-il tout simplement prévisible qu’une poignée de mots populaires ayant un impact universel cessent de figurer en tête du palmarès, qui couvre désormais tout l’éventail de la société et du langage, et soient issus d’une vaste gamme de sous-cultures plutôt que de la culture linguistique japonaise dans sa globalité.
Le mot gagnant de 2024
ふてほど — Fute-hodo La série télévisée Futekisetsu nimo hodo ga aru (Extrêmement inapproprié !), programmée au Japon par TBS, a été l’un des grands succès de l’année. Avec un scénario de Kudô Kankurô, Abe Sadao dans le rôle du personnage principal et Kawai Yuumi dans celui de sa fille, la série raconte l’histoire d’un professeur d’éducation physique dont le déroulement va de 1986 à 2024. Plutôt que de se contenter de présenter les scènes du passé comme périmées, ou l’ère « woke » moderne comme erronée, la série s’efforce de montrer qu’à toutes les époques la clef de la compréhension mutuelle réside dans l’ouverture des uns aux autres.
Les neuf autres finalistes
裏金問題 — Uragane mondai Les dissimulations d’argent ont constitué un problème politique tout au long de l’année, avec un grand nombre de législateurs du Parti libéral-démocrate impliqués dans un scandale de déclarations frauduleuses de dons provenant de collectes de fonds, scandale qui a fait perdre à la coalition au pouvoir sa majorité lors des élections générales du 27 octobre.
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界隈 — Kaiwai Ce mot, auquel les jeunes attribuaient jadis le sens de « zone locale » ou de « voisinage », en est venu à désigner les gens constituant l’entourage de quelqu’un, tels que ses amis ou d’autres proches.
初老ジャパン — Shorô Japan Lors des Jeux olympiques de Paris, le Japon a remporté la médaille de bronze du concours complet par équipes, sa première médaille équestre depuis 1932. L’âge moyen des quatre membres de l’équipe était de 41 ans et demi et, par autodérision, ils se sont qualifiés de Shorô Japan. Le mot shorô, « début de la vieillesse », qui était jadis une autre façon de dire que quelqu’un était entré dans la quarantaine, désigne aujourd’hui une personne âgée d’environ 60 ans.
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新紙幣 — Shin shihei En juillet, le Japon a émis de nouveaux (shin) billets de banque (shihei) pour la première fois depuis 20 ans, avec une protection renforcée contre la contrefaçon. Toutefois, alors que l’argent liquide est de moins en moins en usage, ces nouveaux billets circuleront moins que ceux qui les ont précédés.
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50-50 — Ohtani Shôhei, la vedette du baseball membre des Los Angeles Dodgers, a marqué à la fois son cinquantième but volé et son cinquantième coup de circuit le 19 septembre, lors de la saison régulière 2024, ce qui a fait de lui le seul membre du « club des 50-50 » dans l’histoire de la Major League. Il était devenu le sixième membre du « club des 40-40 » le 23 août. Il a fini la saison avec 54 coups de circuit et 59 buts volés avant d’aller avec les Dodgers remporter les World Series le 31 octobre contre les New York Yankees.
Bling-bang-bang born — Le groupe de musique hip-hop japonais Creepy Nuts a connu un grand succès avec cette chanson pop, qui a servi de titre principal pour la série animée Mashle : Magic and Muscles. Le dédoublement du titre de la chanson, conçu pour le chœur, accompagne un mouvement de danse qui a également connu un immense succès sous forme de vidéo en ligne, et acquis, sous le nom de « danse BBBB », une immense popularité auprès des enfants, dont les plus jeunes ont l’âge de fréquenter l’école primaire.
ホワイト案件 — White anken Ces tâches, présentées flatteusement comme des « emplois blancs » sur les médias sociaux, dans l’idée d’attirer les gens qui ont un besoin urgent de gagner de l’argent mais souhaitent éviter les « emplois illégaux » proposés par des employeurs sans scrupules, sont en réalité tout aussi repréhensibles. Cette année a été le théâtre d’une recrudescence des crimes commis par des demandeurs d’emploi qui ont postulé et se sont vu demander par d’obscurs meneurs de cambrioler des domiciles ou de commettre d’autres délits.
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名言が残せなかった — Meigen ga nokosenakatta Après avoir remporté la médaille d’or du javelot féminin aux Jeux olympiques de Paris, Kitaguchi Haruka a déclaré que, toute ébahie qu’elle fût de sa victoire — qui a valu au Japon sa première médaille d’or olympique d’athlétisme en 20 ans — et de son record personnel de la saison avec un jet de 65,80 mètres, elle restait déçue au fond d’elle-même « d’être incapable de produire une phrase inspirante appropriée » à l’occasion de la célébration de sa victoire.
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もうええでしょう — Mô eedeshô La pièce Jimenshi tachi (Les escrocs de Tokyo), est diffusée sur Netflix à partir du mois de juillet. Le héros, Gotô, joué par Taki Pierre, débite souvent cette phrase dans des contextes divers, où elle peut signifier aussi bien « Ça va, j’en ai entendu assez », pour mettre fin à une négociation difficile, que « D’accord, ça marche », pour alimenter la conversation.
(Photo de titre : l’emballage de l’édition blu-ray/DVD du programme de TBS Extrêmement inapproprié ! vendu par TBS en collaboration avec TBS Glowdia ; distribué par TC Entertainment. © TBS Sparkle/TBS)