Les 24 divisions de l’année solaire au Japon
« Shôsho » : petite chaleur
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Shôsho (petite chaleur) est le nom de la période solaire qui commence aux environs du 7 juillet sur le calendrier moderne. À mesure que la fin de la saison des pluies semble s’approcher, les averses soudaines et localisées ont tendance à se multiplier. On considère qu’on est au plus fort de l’été jusqu’au début officiel de l’automne, risshû, vers le 7 août, après quoi on emploie le mot zansho pour désigner la chaleur persistante de la fin de l’été. Les cigales se mettent à chanter et les lotus fleurissent.
Cet article va se pencher sur les événements et les phénomènes naturels qui jalonnent la période allant en gros du 6 au 21 juillet.
La fête du Tanabata (7 juillet)
Tanabata est l’une des cinq grandes fêtes saisonnières de l’année (7 janvier, 3 mars, 5 mai, 7 juillet et 9 septembre). On la célèbre avant tout en vue de prier pour une récole abondante, mais cette date occupe une place prépondérante dans diverses traditions. Parmi elles figurent l’ancienne légende chinoise à propos des étoiles Alpha Lyrae (Véga) et Alpha Aquilae (Altaïr), et Kikkôden, la célébration au cours de laquelle les tisserands et les couturiers prient pour progresser dans l’exercice de leur métier, ou encore Tanabatatsume, qui offre aux jeunes femmes l’occasion de tisser des étoffes pour les vêtements destinés à accueillir les divinités.
L’histoire de Tanabata, introduite de Chine à l’époque de Nara (710-794), parle de Orihime (Princesse tisserande), qui tissait tous les jours pour son père Tentei (Roi du ciel), qui lui a présenté son futur mari Hikoboshi (l'« Étoile garçon », aussi appelé Kengyû, le « bouvier »). Après leur mariage, ils se sont prélassés dans l’oisiveté, ce qui a suscité la colère de Tentei, qui les a séparés et envoyés sur les rives opposées d’Amanogawa (la Voie lactée) pour les remettre au travail. Mais les deux amants éprouvaient un tel chagrin qu’ils ne pouvaient travailler, tellement ils versaient de larmes. Tentei décida donc que, s’ils travaillaient consciencieusement, ils seraient autorisés à se rencontrer une fois par an, la nuit du 7 juillet. Ce soir-là, on peut voir les deux étoiles « traverser la Voie lactée » pour être à nouveau ensemble.
Une coutume, apparue à l’époque d’Edo (1603-1868), consistait à écrire des prières sur des bandes de papier de couleur qu’on attachait à des feuilles de bambou. Le papier en question pouvait être de cinq couleurs : vert, rouge, jaune, blanc et violet. Il s’agit là des couleurs associées aux cinq éléments de la cosmologie chinoise (le bois, le feu, la terre, le métal et l’eau), en précisant toutefois que le noir, originellement associé à l’eau, est considéré comme de mauvais augure au Japon et qu’il a donc été remplacé par le violet.
(Voir également notre article : Le 7 juillet : « Tanabata », la fête des étoiles)
Les sômen, de fines nouilles blanches, sont un plat très apprécié pour la fête du Tanabata. On les fait bouillir une minute puis on les plonge dans de l’eau glacée. On les sert avec de la sauce tsuyu et d’autres condiments tels que les échalottes, le gingembre, le shiso et le myôga (gingembre originaire du Japon). Les sômen sont un dérivé des sakubei, les nouilles tressées, constituées d’un mélange de farine de blé et de riz, que les gens mangeaient à l’époque de Nara.
Iriya, la fête de l’ipomée (6-8 juillet)
Au début de l’ère Meiji (1868-1912), une douzaine de jardiniers d’Iriya, à Tokyo, qui cultivaient différentes variétés d’ipomée (asagao) donnant de superbes fleurs, ont créé un festival dédié. Celui-ci s’est arrêté en 1913, mais ses partisans l’ont réinstauré en 1948. De nos jours, c’est un événement populaire qui attire des dizaines de milliers de visiteurs.
(Voir également notre article : Admirez les fleurs d’été japonaises à Tokyo)
Le yukata
À l’époque de Heian (794-1185), les membres de l’aristocratie portaient une robe sans doublure appelée katabira lorsqu’ils prenaient des bains de vapeur, une coutume très en vogue à l’époque. Le bain chaud a supplanté le bain de vapeur à l’époque Azuchi-Momoyama (1568-1603) et, en sortant de la baignoire, on enfilait un vêtement similaire, le yukata, destiné à absorber la sueur. Avec la multiplication des bains publics au début de l’époque d’Edo, le port du yukata, en général en tant que pyjama, s’est répandu chez les gens du commun. À partir du milieu de l’époque d’Edo, le port du yukata s’est étendu aux danses bon odori et aux festivals d’été de feux d’artifices..
(Voir également notre article : Kimono et « yukata » : les vêtements traditionnels japonais)
Le marché de Hôzuki, au temple Sensô-ji (9-10 juillet)
Marché où sont vendus des hôzuki. Ces plantes en forme de lanternes sont associées à la chance — leur couleur rouge a la réputation de protéger contre la malfaisance de la chaleur estivale, et également de contribuer à attirer la chance. Sur le marché, qui a lieu au temple Sensô-ji, dans le quartier d’Asakusa, on vend des hôzuki, des carillons éoliens et autres colifichets d’été. Des divertissements comme la pêche au poisson rouge sont proposés aux enfants et aux adultes restés jeunes de cœur. Et les prières adressées au bodhisattva Kannon sont censées être plus efficaces le 10 juillet que les autres jours.
Les fleurs de lotus
Le mot japonais pour lotus, hosu (ou parfois hachisu), dérive, dit-on, de hachinosu, qui veut dire nid d’abeilles, du fait de la ressemblance observée entre la gousse du lotus et un nid d’abeilles. Le lotus passe pour la fleur la plus proche du Bouddha. La quasi-totalité de la plante se mange ou est utilisée dans la médecine traditionnelle — les graines, les feuilles, la tige, le cœur et les racines. Des séances de contemplation sont organisées tôt le matin dans les temples, sanctuaires et parc où le lotus est cultivé.
Festival de Gion, Kyoto (1er-31 juillet)
Le festival de Gion, qui se déroule au sanctuaire Yasaka de Gion, est l’un des événements estivaux emblématiques de Kyoto. Il fait partie des trois grands festivals du Japon (aux côtés du Tenjin d’Osaka et du Kanda de Tokyo). Il a été instauré à l’époque de Heian, en 869, pour prévenir les catastrophes et prier pour une bonne santé. L’événement dure un mois, à partir du 1e juillet, mais ses points forts sont le saki matsuri, le 17 juillet, et l’ato matsuri, le 24 juillet. Ces jours-là, 33 chars décorés, reliés uniquement par des cordes, sans qu’un seul clou soit utilisé, défilent en procession dans le quartier, chargés de leurs divinités respectives. Cet événement figure sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité dressée par l’Unesco.
(Voir également notre article : Le sanctuaire Yasaka de Kyoto, emblème d’un des plus grands festivals du Japon)
La culture du cadeau en été, Chûgen (fin juin à mi-juillet)
Le mot chûgen fait référence à une coutume saisonnière consistant à offrir des cadeaux pour exprimer sa reconnaissance. (Voir notre article : La culture du cadeau au Japon)
Zhongyuan (écrit avec les mêmes caractères), qui se tient le 15 juillet, est l’une des trois dates-clés du taoïsme chinois, où la coutume voulait qu’on rende hommage à ses ancêtres. Cette tradition a été transmise au Japon, où les gens font des cadeaux aux alentours de cette date. Dans la région de Tokyo, ceci a lieu entre la fin juin et la mi-juillet, mais cette période diffère selon les régions. Les grands magasins et les supermarchés dédient des espaces aux cadeaux pour le chûgen.
Le jour de la mer (3e lundi de juillet)
Le troisième lundi de juillet est le jour de la mer, et un congé national pour l’occasion. Sur tout le littoral japonais, les plages dédiées à la natation entrent en activité à partir du début du mois de juillet. Les cabanons de plage vendant de la nourriture et des boissons sont eux aussi ouverts pendant cette période.
La période Doyô
Doyô désigne les quelque 18 jours précédant le début de chacune des quatre saisons du calendrier traditionnel. En été, Doyô commence approximativement le 20 juillet, et s’achève avec Risshû (le début de l’automne) aux environs du 7 août. Comme c’est la période la plus chaude de l’année, les gens mangent des aliments auxquels ils attribuent des vertues énergisantes, susceptibles de vaincre la fatigue — tels que l’anguille, les palourdes shijimi et les œufs.
Pendant le Doyô estival, l’anguille est particulièrement prisée le Jour du bœuf. Cette coutume est ancienne, comme en témoigne le Manyôshû, un recueil de poèmes compilé à l’époque de Nara, dans lequel l’anguille est recommandée pour prévenir l'« émaciation estivale ». Elle est couramment consommée en kabayaki — grillée nappée de sauce soja, laquelle a la réputation d’accroître l’endurance —, une pratique qui remonte à l’époque d’Edo.
(Voir également notre article : « Doyô no ushi no hi » : comment les Japonais ont coutume de déguster de l’anguille en plein été)
Le maïs doux
Le maïs doux fraichement bouilli disposé sur la table à manger évoque l’arrivée de l’été. Il est de saison de juin à septembre. Le maïs doux rôti, avec son arôme parfumé, sa texture croquante et sa saveur douce, est un plat que les stands de restauration des festivals de temple proposent fréquemment pendant l’été. Lorsque vous en achetez, choisissez des épis ayant beaucoup de soie et, si possible une extrémité jaune.
Karei (le flet)
Le Karei (flet) est de saison en été. Ce poisson populaire à chair blanche a un goût délicieux servi en nitsuke (bouilli dans de la sauce soja), en kara-age (frit) ou meunière (revenu au beurre).
(Article supervisé par Inoue Shôei, chercheuse sur le calendrier et auteure, prêtresse shintô, professeure invitée à l’université Tôhoku Fukushi. Photo de titre : un lotus en fleur au temple Hôkongôin de Kyoto. Toutes les photos sont de Pixta, sauf mentions contraires.)