Les grandes figures historiques du Japon

Tsuda Umeko, une pionnière dans l’éducation des femmes au Japon

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Tsuda Umeko a joué un rôle majeur dans l’éducation des femmes durant l’ère Meiji (1868-1912), alors que la société nippone était encore essentiellement patriarcale. C’est notamment grâce à elle qu’une institution nationale éducative pour femmes, qui deviendra plus tard l’Université Tsuda, verra le jour.

Fonder une université pour femmes : les obstacles

Tsuda Umeko rentra au Japon en 1892, à l’âge de 28 ans. Elle reprit son poste de professeure d’anglais à la Peeresses’ School, mais cette fois-ci de plus en plus animée du fort désir de fonder une école basée sur ses idéaux. À cette époque-là, le seul établissement scolaire pour femmes au Japon était l’École normale pour femmes de Tokyo (aujourd’hui l’Université pour femmes d’Ochanomizu), une université nationale. Tsuda Umeko avait à cœur de fonder une université privée pour femmes, mais les choses n’allaient pas lui être faciles.

Son premier obstacle fut d’ordre pécuniaire : réunir les fonds nécessaires, en dépit de son maigre salaire en tant que femme. C’est également à cette époque que Naruse Jinzô créa l’Université pour femmes du Japon, grâce à des personnages politiques comme Itô Hirobumi, Ôkuma Shigenobu ou encore Shibusawa Eiichi, éminents personnages du monde politique. Cependant, pour Tsuda Umeko, trouver de l’argent ne sera pas une sinécure. Au mieux, elle pouvait recueillir de maigres dons des États-Unis, par l’intermédiaire de ses relations, à l’église.

Hélas, ce n’était pas le seul défi qui l’attendait ; peu de femmes souhaitaient étudier dans l’établissement qu’elle allait fonder, ni même d’hommes. Lors de l’ouverture, elle réussit pourtant à attirer dix diplômés d’écoles missionnaires, lesquelles étaient alors gérées par l’église.

Autre obstacle : trouver des enseignants avec un niveau suffisant en raison du manque d’établissements pour femmes. Là aussi, Tsuda Umeko fit jouer ses relations, et des professeures américaines telles qu’Alice Bacon et Anna Hartshorne l’aidèrent à réaliser son rêve.

Après avoir surmonté toutes ces difficultés, c’est en 1900 qu’une maison tout juste rénovée dans le quartier tokyoïte de Kôjimachi put enfin accueillir la Joshi Eigaku Juku (« école d’anglais pour femmes »). Cette dernière subira à plusieurs reprises d’autres travaux de rénovation avant que l’établissement en lui-même ne soit déplacé, trois ans plus tard, à Seishû Jogakkô, notamment grâce à la générosité de dons américains. L’université fondée par Tsuda Umeko ressemblait enfin à une véritable école.

Cette école se concentrait essentiellement sur l’enseignement de l’anglais, matière dans laquelle les étudiants excellaient. Tsuda Umeko faisait bien sûr elle-même partie de l’équipe pédagogique. En 1903, le ministère de l’Éducation choisit de réorganiser les écoles post-secondaires sous la forme de senmon-gakkô, ou écoles professionnelles. La Joshi Eigaku Juku était l’une d’entre elles. C’est ainsi que l’école acquit une telle réputation que les étudiants furent exempts de l’examen gouvernemental pour l’obtention du diplôme de professeur d’anglais.

L’héritage laissé par Tsuda Umeko

À l’âge de 53 ans, Tsuda Umeko tomba malade, la contraignant à démissionner de son poste de directrice de l’école, qu’elle occupait depuis plus de 20 ans. Elle luttera pendant de longues années contre la maladie. Elle meurt en 1929, à l’âge de 64 ans. Pour lui rendre hommage, son école sera renommée Tsuda Eigaku Juku.

L’Université Tsuda, telle qu’elle est connue aujourd’hui, reste une pierre angulaire de l’éducation féminine au Japon. Si cet établissement dispensait autrefois des cours d’économie domestique, comme c’était souvent le cas dans les écoles pour femmes, les choses ont bien changé. Aujourd’hui, c’est une institution particulière, qui ne ressemble à aucune autre, spécialisée dans l’enseignement et la recherche en éducation et arts libéraux, notamment l’anglais.

Tsuda Umeko est restée célibataire dans une société profondément marquée par l’importance des liens sacrés du mariage. À cette époque-là, 90 % des couples étaient mariés. Ses biographies laissent transparaître de brèves amourettes, des proches l’ont encouragée à se marier et elle a même été présentée à des partenaires potentiels. Mais rien n’y a fait. Tsuda Umeko a préféré le célibat. Peut-être pensait-elle que ce mode de vie, sans la responsabilité de s’occuper d’une famille, correspondait mieux à son rêve de créer un établissement d’enseignement supérieur féminin en langue anglaise.

Le nouveau billet de 5 000 yens, arborant le portrait de Tsuda Umeko. (Avec l’aimable autorisation du ministère des Finances). © Jiji
Le nouveau billet de 5 000 yens, arborant le portrait de Tsuda Umeko. (Avec l’aimable autorisation du ministère des Finances). © Jiji

(Photo de titre : portrait de Tsuda Umeko. Avec l’aimable autorisation du Collège Tsuda. Jiji)

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