Exploration de l’histoire japonaise

Le Japon de Toyotomi Hideyoshi : l’État mis sous contrôle

Histoire Culture

Après avoir mené à bien l’unification du Japon à la fin du XVIe siècle, Toyotomi Hideyoshi a pris fermement en main les rênes de l’État, en introduisant de nouveaux impôts, en instaurant un système de classes et en engageant des effectifs importants dans ses campagnes militaires contre la Corée.

Des changements culturels de grande ampleur

Le règne de Hideyoshi est resté célèbre pour l’épanouissement de la culture Momoyama. Ce nom – formé de momo « pêche » et yama « colline », pour désigner celle où le château de Fushimi, base du règne dans ses derniers instants, se dressait jadis à Kyoto – a été appliqué rétrospectivement à l’époque d’Edo (1603-1868). Sur le plan artistique, la culture Momoyama se distingue par son attachement au réalisme, remis au goût du jour après l’affaiblissement des institutions bouddhiques sous le règne de Nobunaga. Le renforcement du rôle des marchands au sein de la société, consécutif à l’unification de la nation par Hideyoshi, combiné aux influences européennes, a lui aussi contribué à l’épanouissement d’un esprit de nouveauté et de grandeur. À l’époque moderne, la notion de culture Momoyama est souvent élargie à certains aspects de l’époque d’Edo.

Les progrès accomplis dans la construction des forteresses à l’époque des provinces en guerre (1467-1568) ont été mis à contribution par les daimyô dans la construction ou la rénovation de leurs splendides châteaux, notamment ceux de Himeji, Matsumoto, Inuyama et Hikone. La cérémonie du thé est devenue très en vogue et les daimyô sont entrés en compétition pour la possession d’impressionnants services à thé, l’étude auprès de maîtres du thé et l’organisation de rencontres. C’est ainsi qu’en 1587, une cérémonie hébergée par Hideyoshi au sanctuaire Kitano Tenmangû, à Kyoto, a attiré plus de 1 000 personnes. De tous les maîtres du thé, Sen no Rikyu était le plus fameux, et la maison de thé de Taian, dont on lui attribue la conception, existe toujours au temple Myôkian de l’ancienne capitale.

Portrait de Sen no Rikyû par Hasegawa Tôhaku. (Aflo)
Portrait de Sen no Rikyû par Hasegawa Tôhaku. (Aflo)

Les goûts de Hideyoshi ont favorisé l’expression d’un sens de la splendeur dans la peinture. Pour la décoration des portes coulissantes et des murs des châteaux et des temples, les peintres utilisaient souvent la laque dorée associée au vert ou à d’autres couleurs éclatantes. Kanô Eitoku, un grand peintre de cette époque, composait des œuvres de grande dimension, en mariant les coups de pinceau hardis, la technique du lavis et le style japonais yamato-e. Au nombre de ses œuvres les plus connues figurent les peintures sur paravents (byôbu) Karajishizu  (Lions chinois) et Rakuchû rakugaizu (Vues de la capitale et de ses alentours). Ses disciples Kanô Sanraku, Hasegawa Tôhaku et Kaihô Yûshô occupent eux aussi une place importante dans la peinture de cette époque. En ce qui concerne les objets d’art, Yoshiko, l’épouse principale de Hideyoshi, qui appréciait grandement les laques de style makie du Kôdai-ji, a réuni une riche collection d’échantillons de cet art.

La forme de théâtre qui a précédé le kabuki est issue des spectacles donnés par une troupe dirigée par une miko (servante de sanctuaire) du sanctuaire d’Izumo répondant au nom d’Okuni. Ce divertissement populaire passait aux yeux de certains pour choquant et dégénéré, et, contrairement au kabuki exclusivement masculin qui s’est développé plus tard, il n’employait pratiquement que des actrices. Une forme précoce de théâtre de marionnettes bunraku a également pris son essor, à mesure qu’elle intégrait un accompagnement au shamisen – un instrument dérivé du sanshin des îles Ryûkû (actuelle préfecture d’Okinawa) – au jeu des marionnettes.

Dans le domaine de la mode, le kosode a perdu son statut de sous-vêtement pour devenir un vêtement à part entière – qui allait par la suite donner naissance au kimono –, tandis que les femmes renonçaient au port du hakama (jupe fendue). À mesure que s’estompait la coutume du port des charges sur la tête, les hommes et les femmes ont pris l’habitude de nouer leurs cheveux en chignons. La prise de trois repas quotidiens plutôt que deux s’est peu à peu répandue, mais, contrairement aux nobles et aux samuraïs, qui se nourrissaient essentiellement de riz, les céréales constituaient toujours la base de l’alimentation des gens du commun.

Tout bien considéré, ce fut une période de changements spectaculaires dans la société et la culture japonaises, largement impulsés par la vie et le règne dramatiques de Toyotomi Hideyoshi, qui ont façonné l’époque.

(Photo de titre : portrait de Toyotomi Hideyoshi par Kanô Mitsunobu. Aflo)

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