Le futur de la conduite autonome : le Japon donne le feu vert aux véhicules de niveau 4

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Ôtani Tatsuya [Profil]

En mai dernier, un service de transport autonome a été pour la première fois lancé au Japon. Si beaucoup de constructeurs automobiles investissent dans ces technologies, de nombreux obstacles subsistent toutefois avant de voir ce type de véhicules envahir les routes de l’Archipel.

Un tout premier transport autonome de niveau 4 au Japon

En mai dernier, la ville d’Eiheiji, dans la préfecture de Fukui (côte centre-ouest), a attiré l’attention sur elle en lançant le tout premier service de transport sans conducteur au Japon. Un observateur moyen pourrait penser que l’avenir longtemps imaginé de routes fourmillant de voitures autonomes est désormais à portée de main, mais si la technologie a récemment fait de considérables progrès, une commercialisation à grande échelle de véhicules autonomes dans un avenir proche ne semble que peu probable. Divers facteurs semblent se mettre sur la route des véhicules automatisées.

La ville d’Eiheiji a lancé son service de transport de passagers après que le gouvernement a modifié la loi japonaise sur la circulation routière en mars de cette année. Elle permet désormais aux véhicules fonctionnant entièrement sans conducteur de circuler sur les routes. Certaines conditions doivent cependant être réunies ; c’est ce qu’on appelle la conduite autonome de niveau 4. Plus simplement, la nouvelle réglementation gouvernementale permet aux véhicules équipés d’un système de conduite informatisé, prenant la place de réels conducteurs, de circuler sur les routes publiques, toutefois à des heures et dans des zones bien définies. Une vitesse maximale pour les véhicules est également prévue par la loi.

Les véhicules utilisés pour le service d’Eiheiji sont de petits véhicules couverts, comparables à ceux qu’on pourrait trouver sur un terrain de golf par exemple, développés par un consortium composé de grands noms du secteur : Yamaha Motor, l’Institut national des sciences et technologies industrielles avancées, Mitsubishi Electric et Soliton Systems. Ces voiturettes peuvent accueillir jusqu’à sept passagers et sont équipés de caméras et d’autres capteurs sensoriels qui collectent des données permettant aux véhicules d’adapter leur conduite en fonction de l’état de la route.

Le Premier ministre Kishida Fumio descend d’une voiture autonome après avoir testé le service de transport de la ville d’Eiheiji, le 4 février 2023. (Jiji)
Le Premier ministre Kishida Fumio descend d’une voiture autonome après avoir testé le service de transport de la ville d’Eiheiji, le 4 février 2023. (Jiji)

Des réglementations similaires aux États-Unis

Notons qu’un service de transport de véhicules à conduite autonome de niveau 4 a déjà été lancé aux États-Unis notamment. Là-bas, Cruise, une filiale du constructeur automobile américain General Motors, a déployé ses robotaxis dans les villes d’Austin, Phoenix et San Francisco en 2022. Proposant une version entièrement électrique de la Chevrolet Bolt, déjà disponible dans le commerce, le service s’apparente davantage à du covoiturage qu’aux véhicules mis à disposition par la ville d’Eiheiji. Ce qui ne change pas cependant, ce sont les règles. Comme au Japon, les voitures sont soumises à des réglementations strictes, en tant que véhicules autonomes de niveau 4. Ces réglementations définissent notamment la vitesse maximale des véhicules, 48 kilomètres par heure, et les horaires prévus, hors heures de pointe, lorsque la circulation des piétons et des voitures est faible.

Un robotaxi de l’entreprise Cruise dans la ville de San Francisco (© Cruise).
Un robotaxi de l’entreprise Cruise dans la ville de San Francisco (© Cruise).

Waymo, une filiale d’Alphabet, la société mère de Google, s’intéresse elle aussi au secteur des voitures autonomes, et propose un service de covoiturage autonome sur le continent américain. Disponible dans les villes de Los Angeles, Phoenix et San Francisco, il fonctionne 24 heures sur 24. Tout comme Cruise, les véhicules de l’entreprise Waymo doivent obéir à des réglementations strictes. Ils peuvent par exemple circuler seulement en ville dans des zones spécifiques et préalablement désignées.

La Jaguar I-Pace, le véhicule à conduite autonome de Waymo (© Waymo)
La Jaguar I-Pace, le véhicule à conduite autonome de Waymo (© Waymo)

Les entreprises qui cherchent à se faire une place dans le secteur de la conduite autonome de niveau 4 se sont jusqu’à présent concentrées sur les robotaxis. Elles mettent notamment en avant les mérites de cette technologie en tant que moyen de réduire les coûts de main-d'œuvre et de trouver une solution à la pénurie de conducteurs dont souffrent différents secteurs de transport.

Toutefois, la technologie de véhicules entièrement autonomes ne concernera pas l’usage privé avant de nombreuses années.

Les six niveaux d’autonomie

La Société des ingénieurs automobiles a défini une échelle de niveaux de conduite autonome. Elle constitue la principale ligne directrice de l’industrie pour l’évaluation des fonctions de conduite autonome. Elle comprend six niveaux :.

- Niveau 0 : systèmes d’assistance à la conduite tels que les avertissements en cas de collision et le freinage en situation d’urgence, mais pas de technologie d’automatisation de la conduite.

- Niveau 1 : assistance à la conduite pour la direction du véhicule, le freinage ou l’accélération.

- Niveau 2 : automatisation partielle de la conduite pour la direction, le freinage ou l’accélération.

- Niveau 3 : fonctions de conduite automatisée limitées à certaines conditions en présence d’un conducteur humain.

- Niveau 4 : automatisation avancée, avec une conduite limitée à certaines conditions sans conducteur humain.

- Niveau 5 : automatisation totale de la conduite sans conditions préalablement définies.

Dans les trois premiers niveaux, seuls les véhicules équipés de différentes fonctions d’assistance à la conduite sont autorisés. Dans les trois derniers, il s’agit de voitures capables d’une conduite automatisée. Les véhicules sans conducteur, tels que les robotaxis et les navettes, relèvent des niveaux 4 et 5.

Suite > L’avenir de la conduite autonome

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Ôtani TatsuyaArticles de l'auteur

Journaliste indépendant. À l’issue de ses études universitaires, il a travaillé comme ingénieur-chercheur chez un fabricant de produits électroniques jusqu’en 1990, année où il a intégré l’équipe de rédaction de Car Graphic, une revue consacrée à l’automobile, dont il est par la suite devenu rédacteur en chef adjoint. En 2010, il a quitté Car Graphic pour entamer une carrière de journaliste indépendant, et depuis lors, il écrit sur toutes sortes de sujets, depuis les véhicules de luxe jusqu’aux voitures ultra-légères keisha, tout en publiant d’innombrables reportages sur le sport automobile et les plus récentes avancées de la technologie. Outre qu’il figure parmi les juges de Car of the Year Japan (voiture de l’année Japon) 2021-2022, Ôtani Tatsuya est membre de l’Association japonaise des journalistes automobiles et de la Société des journalistes automobiles du Japon.

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