Le sport, l’argent et le risque de dépendance malsaine au géant de la publicité Dentsû

Sport Économie Tokyo 2020

Takiguchi Takashi [Profil]

L’arrestation de Takahashi Haruyuki, ancien dirigeant du comité d’organisation des Jeux olympiques de Tokyo 2020 et membre prééminent en son temps de l’agence de publicité Dentsû, accusé d’avoir reçu des pots-de-vin, a suscité des remous dans le monde des sports. L’auteur de cet article, le journaliste Takiguchi Takashi, soutient que, pour restaurer la réputation de la marque olympique, il faut que la transparence s’améliore.

De nouveaux jeux au Japon ?

En pleine montée en puissance du scandale actuel de corruption, Akimoto Katsuhiro, le maire de Sapporo, qui souhaite attirer les Jeux olympiques d’hiver dans sa ville en 2030, a annulé une rencontre avec Thomas Bach, le président du CIO, au siège du comité à Lausanne. Il avait prévu de combiner cette rencontre avec un voyage à Munich, effectué dans le cadre de la célébration du cinquantième anniversaire des relations de jumelage entre les deux villes. Mais il s’est désisté, sous prétexte de conflis d’horaire.

Dans la course pour l’hébergement des jeux de 2030, Sapporo est en concurrence avec Salt Lake City et Vancouver. Après l’échec d’une candidature conjointe des provinces espagnoles de Catalogne et d’Aragon, le bruit court que la Catalogne va maintenant faire une offre en solo. Toutes les villes ont des problèmes qui leur sont propres, mais ceux de Sapporo sont particulièrement visibles.

La ville de Hokkaidô projette de financer le fonctionnement des jeux avec de l’argent provenant exclusivement du secteur privé. L’arrestation des anciens dirigeants de Dentsû va inévitablement entraver les efforts de Sapporo en vue de trouver des sponsors et influencer l’attitude du CIO face à l’offre japonaise.

À l’origine, le CIO espérait mettre un point final à la liste des sites candidats en décembre 2022 et prendre une décision formelle via les membres de son conseil lors de la session du CIO prévue à Bombay en mai ou juin 2023. Il se trouve toutefois que la session a été reportée au mois de septembre ou d’octobre, de toute évidence en raison d’un conflit au sein de l’Association olympique indienne, mais peut-être le CIO a-t-il prévu qu’il faudrait davantage de temps pour décider de la ville qui hébergerait les jeux en 2030.

Rétablir la confiance

La marque olympique telle que la décrit Payne a été sérieusement endommagée, et la restauration de sa réputation passe en premier lieu par la garantie de transparence. Au lieu de tout laisser aux mains des agences de publicité et des entreprises de marketing, nous avons besoin d’un dispositif de suivi de l’argent olympique, via l’introduction, par exemple, d’un système équitable d’appel d’offre et la mise en place d’un organisme de contrôle géré par une tierce partie.

Les activités commerciales sportives auxquelles se livraient Dentsû et ses semblables s’appuyaient sur des agences faisant office d’intermédiaires pour trouver des sponsors pour la publicité télévisée. Mais les organisations ont désormais la possibilité de faire de la publicité en ligne sans passer par une agence. Le monde des sports doit élaborer un nouveau modèle commercial en phase avec les changements survenus dans le monde des affaires.

Les fédérations sportives devraient envisager de se doter de leurs propres départements de marketing ou de confier à des employés spécialisés la charge de trouver eux-mêmes des sponsors. Cette démarche est déjà à l'œuvre au sein de diverses instances internationales. Le développement des ressources humaines joue également un rôle essentiel.

Le récent scandale ne doit pas être vu comme une affaire impliquant seulement un individu ou une entreprise. Nous devons effectuer un retour en arrière sur la commercialisation des sports au cours du demi-siècle passé et identifier les leçons et les enjeux. Faute d’une réflexion de ce genre dans le monde des sports, il ne sera pas possible de restaurer la réputation des jeux olympiques et la confiance du public dans les sports.

(Voir également notre article : La vérité sur la firme Dentsû : un succès à quel prix ?)

(Photo de titre : le 7 septembre 2013 à Buenos Aires, en Argentine. La joie des représentants japonais est à son comble en apprenant que Tokyo est choisie comme ville hôte des Jeux olympiques et paralympiques 2020. Jiji)

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Takiguchi TakashiArticles de l'auteur

Journaliste sportif né à Osaka en 1967. Il rejoint le journal Mainichi Shimbun en 1990 et couvre quatre éditions des Jeux olympiques. Aujourd'hui éditorialiste sportif pour le même journal, il écrit aussi plusieurs livres sur le thème du sport.

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