Le Japon et Taïwan : une histoire d’amour compliquée

Le Japon, deuxième patrie des enfants-ouvriers taïwanais de jadis

Société Vie quotidienne

Hitoto Tae, née d’un père taïwanais et d’une mère japonaise, a découvert, grâce à un ami, qu’autrefois de très jeunes hommes taïwanais étaient venus travailler dans les usines militaires japonaises.

Taïwan et le Japon : une relation fraternelle qui dure depuis plus d’un siècle

Aujourd’hui, la plupart des Japonais associent probablement deux choses au nom de Taïwan, les massages et des raviolis à la vapeur xiǎolóngbāo. Ils ne perçoivent pas Taïwan comme un pays particulièrement proche du Japon, d’où la surprise ressentie par beaucoup d’entre eux, comme moi au demeurant, en apprenant que Taïwan avait été le pays qui avait fourni le plus important soutien financier au Japon après le grand tremblement de terre du 11 mars 2011.

Je ne voudrais pas que les Japonais se satisfassent de penser que c’est parce que les Taïwanais sont pro-japonais. Non, il faut comprendre qu’ils l’ont fait parce qu’il y a là-bas des associations comme le Club Taïwan Kôza, et aussi parce que les deux pays ont une histoire commune qui n’a pas été sans leur apporter des souffrances. Je me suis rendu compte que sans ces souvenirs digérées lentement avec le passage du temps, les relations nippo-taïwanaises ne seraient pas ce qu'elles sont aujourd'hui.

Peut-être est-ce parce que je n’ai qu’une sœur, mais à mes yeux, les relations entre nos deux pays ressemblent à celles qui unissent deux sœurs.  

Après le 11 mars, Taïwan a agi comme une grande sœur en offrant au Japon plus de soutien que n’importe quel pays au monde. L’inverse s’était produit en 1999, lorsque Taïwan a subi un grave tremblement de terre, et que le Japon avait été le premier pays à envoyer des équipes de secours.

Oui, les deux pays sont comme deux sœurs qui s’entraident, et qui parfois se disputent sans que cela ne détruisent leurs liens. Elles retrouvent ensuite leur bonne entente.

L’héritage des enfants-ouvriers

« Ô, combien loin de la patrie sommes-nous... » ; c’est un passage de la chanson du club chantée par les participants pendant le banquet.  Parmi près d’un millier de personnes présentes dans la salle, des Taïwanais et des Japonais, ceux qui chantaient le plus fort, c’était évidemment les anciens enfants-ouvriers. J’ai vu des larmes dans les yeux de mon ami Ran à ce moment-là. Il devait se souvenir du passé.

1 400 anciens enfants-ouvriers avaient fait le déplacement en 1993 pour fêter le cinquantième anniversaire de leur arrivée au Japon. Ils étaient 740 pour le soixantième, et seulement 250 pour le soixante-dixième. En 2023, leur âge moyen sera de 95 ans. Personne ne peut dire combien seront encore capables de faire le voyage. La crainte que cet anniversaire soit le dernier auquel ils pourraient participer a été exprimée par de nombreuses voix en mai dernier.

Je ne voudrais pas que ce soit le cas. Même s’il ne devait en rester qu’un seul, je voudrais qu’il fasse le déplacement, et même s’ils disparaissent tous, je voudrais que le club continue à exister pour que nous fassions vivre l’héritage qu’ils nous laissent, pour que nous nous souvenions longtemps de leurs vies qui symbolisent le lien entre les deux pays. J’ai l’intention de faire ce que je pourrai pour que cela arrive.

(D’après un original en japonais écrit le 17 mai 2013. Photo de titre : Hitoto Tae en visite à Jiufen, une ville du nord de Taïwan, prise par Kumagai Toshiyuki.)

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