Le Japon et Taïwan : une histoire d’amour compliquée

Comprendre les liens entre le Japon et Taïwan à travers le phénomène des « hari »

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À la fin des années 1990, un groupe de fans inconditionnels du Japon a fait son apparition à Taïwan, et il a surpris autant les adultes taïwanais et les Japonais. Hari Kyôko, la figure marquante de cette « tribu » des jeunes, que l’on désigne sous le nom de « hari », nous raconte comment les choses se sont passées.

Hari, un phénomène longtemps mal compris

Il faudrait beaucoup de temps pour faire une analyse complète du phénomène hari. Pour me limiter à un aperçu rapide, je dirais simplement qu’il y a une différence importante entre ce que l’on voit de l’extérieur et la réalité sous-jacente. Certains expriment leur amour pour le Japon à travers leur look et leur comportement. D’autres admirent ce pays pour des raisons moins voyantes telles que l’idéal de ses entreprises et l’esprit de ses artisans. Pour ma part, je fais partie de cette seconde catégorie. Un jour, un journaliste m’a demandé combien de gens comptait le groupe hari. Je lui ai dit : « Je dois avouer que je suis incapable de vous donner une réponse précise. En ce qui me concerne, je suis comme tout le monde, même si je revendique mon appartenance au groupe hari. On ne peut pas juger les gens uniquement sur leur apparence. » Ce n’est pas exactement la réponse que les medias attendaient de moi. Ils ont voulu me photographier et m’ont demandé de poser en kimono et geta, avec un bandeau sur le front et un éventail à la main, devant des objets typiquement japonais. Je me suis sentie vraiment mal à l’aise quand j’ai vu cette photo dans un grand journal, parce qu’elle ne correspond vraiment pas à l’idée que je me fais du mouvement hari.

Les medias japonais ont tendance à critiquer le phénomène hari. Ils lui reprochent de porter aux nues tout ce qui est japonais, de trouver que tout est kawaii (mignon) et de ne s’intéresser qu’à des côtés superficiels du Japon. Ils considèrent que les membres de hari perdent leur temps à singer le Japon, qu’ils n’ont pas de cervelle et qu’ils donnent le mauvais exemple. En tant que vétéran du groupe hari, je pense que sa façon d’agir repose sur des principes parfaitement cohérents. Il n’y a rien de mal en soi dans le fait d’aimer les habitants ou les produits de l’Archipel. Pas plus que dans le fait d’apprécier la mode, la façon de penser ou la cuisine du Japon. Nous n’admirons pas non plus ce pays aveuglément. Nous sommes passionnés uniquement par des choses qui sont dignes de notre amour et de notre respect et nous ne nous sommes jamais intéressés aux mauvais côtés du Japon. L’amour immense que nous portons à ce pays est une raison de plus pour essayer de mieux le connaître.

Quand les feuilletons télévisés japonais ont connu une grande vogue à Taïwan, les medias locaux ont commencé à en faire à leur tour, en particulier à l’attention des jeunes générations. Lorsque les Taïwanais se sont pris de passion pour les grandes marques japonaises, on a vu apparaître des produits « made in Taïwan ». L’accueil remarquable réservé aux clients dans les grands magasins japonais de Taïwan a incité leurs concurrents locaux à revoir la formation de leurs employés et de leurs cadres. Autant d’exemples de l’influence positive que le Japon a eu sur Taïwan. C’est pourquoi on ne peut pas dire qu’il n’y a rien de bon dans le phénomène hari. Ce mouvement a été pendant longtemps victime de terribles préjugés. J’espère que les medias de Taïwan liront ce texte et qu’il leur fera prendre conscience de leur erreur.

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