[Galerie photos] Un manoir troglodytique creusé à la main par un père et son fils japonais

Architecture

Le Gankutsu Hotel est une grotte artificielle creusée à la main par un agriculteur japonais. Il a creusé à raison de 30 cm par jour dans une falaise verticale, au burin et au pic, jusqu’à sa mort. La caverne est tellement soignée dans les moindres détails qu’il est sans doute plus approprié de la qualifier de sculpture que d’architecture. Les effondrements venant avec le temps, la structure n’est visible aujourd’hui dans son intégralité que sur des photographies prises il y a une quarantaine d’années.

La clef du mystère du manoir troglodytique

On dit que l’architecture se distingue des autres formes d’art par « la beauté de l’utile », mais dans ce cas comment comprendre cette paillasse à expériences, ce vase, ces étagères et cette table d’études creusées dans la masse et donc sans aucune utilité pratique, ainsi que les colonnes et les poutres qui ne jouent aucun rôle de soutien de l’étage supérieur ? J’ai le sentiment que c’est autour de cette question que se trouve la clef du mystère du manoir troglodytique. Il ressort également de plusieurs documents que Minekichi avait conçu le Kôsôkan dès le départ comme un « monument artificiel », en tout cas comme un lieu à montrer et à visiter.

L’imagination est ici notre seule alliée, mais il est possible que le but de Minekichi ait été d’exprimer et de représenter l’esprit et le style de vie de la nouvelle ère à laquelle il aspirait. L’Occident en tant qu’utopie, la science, la rationalité, la beauté et la justice, une nouvelle ère s’exprime dans les espaces intérieurs parsemé d’élément du langage architectural qu’il connaissait, la façade à trois étages de style occidental, la composition symétrique, le nombre d’or, l’échelle stricte, le hall central au plafond voûté, le laboratoire scientifique et la pièce du téléphone, pour leur donner vie sous les yeux des gens de l’époque. Pour Minekichi, c’était sans doute le rêve de toute une vie.

Rez-de-chaussée, le corridor transverse
Rez-de-chaussée, le corridor transverse

L’escalier vers le rez-de chaussée
L’escalier vers le rez-de chaussée

L’escalier vers le premier étage
L’escalier vers le premier étage

Une fenêtre depuis le corridor du premier étage
Une fenêtre depuis le corridor du premier étage

Le couloir vers l’escalier du rez-de-chaussée
Le couloir vers l’escalier du rez-de-chaussée

Vue du balcon depuis le corridor du premier étage
Vue du balcon depuis le corridor du premier étage

L’architecture d’un rêve qui s’effondre

Il est certain que de nombreux bâtiments comme le Gankutsu Hotel, conçus et construits de leurs propres mains par des individus qui n’étaient pas des architectes et qui les a créés de ses propres mains, existent encore de par le monde, certains sans doute encore inconnus. Le « Palais idéal du facteur Cheval », de Ferdinand Cheval à Hauterive, un petit village près de Lyon dans le sud de la France, a fait l’objet d’un film en 2018 qui a été présenté au Japon. La Watts Tower, réalisée par Simon Rodia, est aujourd’hui l’une des attractions touristiques du quartier de Watts à Los Angeles. Ces deux exemples sont aujourd’hui classés monuments historiques de leur pays respectif, et sont très connus. Au Japon, le célèbre « Miyake Sakae hatsumei kenkyûjo » (Laboratoire d’inventions Miyake Sakae), construit par Miyake Sakae à Miyoshimura, dans la préfecture de Chiba, a malheureusement été démoli en septembre 1987.

Le Gankutsu Hotel est sur le point de s’effondrer avant même d’être achevé : un typhon en 1982 a provoqué l’effondrement d’une partie de la falaise, et en juin 1985, la majeure partie de la façade a été emportée par le détachement du rocher. Depuis lors, l’érosion des murs intérieurs et extérieurs atteint un point tel qu’aujourd’hui, l’architecture prévue par Minekichi ne peut plus être vue dans son intégralité que sur des photographies prises par Arai Hidenori en 1978. L’accès des lieux est interdit par un portail en fer, le rêve de Minekichi est sur le point de disparaître, scellé dans la roche.

Le Kôsôkan dans son état actuel, couvert d’herbe et d’arbres, photographié en 2022.
Le Kôsôkan dans son état actuel, couvert d’herbe et d’arbres, photographié en 2022.

(Photo de titre : l’entrée centrale du Kôsokan)

Tags

patrimoine photographie architecture Meiji Saitama

Autres articles de ce dossier