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Le jardin Sankei-en : le don inestimable d’un bienfaiteur à la ville de Yokohama
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Le centenaire du Sankei-en
Le Sankei-en est un grand jardin traditionnel japonais situé à Yokohama, dans la préfecture de Kanagawa. D’une superficie de 175 000 mètres carrés, il met pleinement sa topographie à profit, avec ses fleurs et feuillages de saison, et ses étangs et ruisseaux multiples. Parmi les 17 édifices historiques parsemés dans ce cadre naturel, 10 sont inscrits au patrimoine culturel national. Si Yokohama est bien plus connue comme le port qui a ouvert le Japon à l’international à la fin du XIXe siècle, ainsi que sa forte influence culturelle occidentale, le jardin Sankei-en reste un haut lieu de l’esthétique traditionnelle nippone.
Pour fêter le centenaire du jardin en 2022, Rinshukaku, qui a été la villa d’été de la branche Kishu du clan Tokugawa, a ouvert ses portes au public pendant une période limitée suite à la fin de long travaux de restauration de la structure qui est inscrite au patrimoine culturel national. Cela a été l’occasion de profiter pleinement de ce magnifique jardin que certains comparent à celui de la villa impériale de Katsura, à Kyoto.
La vue sur l’étang de la pagode à trois étages de l’ancien temple Tômyô-ji, perchée sur une colline. Ce symbole du Sankei-en est un monument culturel important et le bâtiment le plus ancien du jardin.
Le jardin intérieur qui, à une époque, a été le jardin privé du fondateur, Hara Sankei. La villa Rinshunkaku se trouve en son sein.
Suminoe-no-ma, la pièce principale de la villa Rinshunkaku, vue de l’antichambre, Naniwa-no-ma. Les pièces regorgent de magnifiques œuvres d’art, notamment des fusuma peints et impostes sculptées de l’illustre école Kanô.
À qui doit-on ce jardin exceptionnel ?
Sankei était le pseudonyme de Hara Tomitarô (1868-1939), le fondateur du Sankei-en qui était un riche industrialiste et commerçant en soie. Né à Gifu en 1868 sous le nom de Aoki Tomitarô au sein d’une famille de chef de village, il s’est montré très intelligent dès son enfance et s’est plongé dans l’étude de la peinture, la culture chinoise, la prose et la poésie. Il a quitté Gifu pour poursuivre son éducation à Tokyo, à ce qui deviendrait l’université de Waseda, et enseigné à l’école d’Atomi. C’est là où il a rencontré sa future femme, Hara Yasu, et suite à leur mariage, a été adopté par sa famille, des commerçants prospères, et pris leur nom.
Des objets et documents relatifs à la vie du fondateur, ainsi que des peintures sur fusuma de l’école Kanô venant de la villa Rinshunkaku, sont exposés au musée commémoratif Sankei.
Lorsqu’il a repris l’affaire familiale, Hara l’a transformée en entreprise, a modernisé la production de soie et commencé à exporter de la soie brute, ce qui l’a rendu très riche. Il est connu pour avoir racheté la filature de soie de Tomioka qu’il a géré pendant un moment. Son père adoptif, Hara Zenzaburô, avait acheté le terrain du Sankei-en au début de l’ère Meiji (1868-1912)). Hara en a fait sa résidence principale en 1902 et a commencé à aménager le jardin en y intégrant des bâtiments historiques. C’est à cette période que le nom de « Sankei-en » lui a été attribué.
Fait assez remarquable, Hara a eu, dès le départ, la notion d’ouvrir le jardin au public de son vivant. À l’époque, il était assez courant que les résidences d’hommes d’affaires éminents deviennent des parcs ou jardins après leur décès, mais Hara a ouvert gratuitement une grande partie du jardin extérieur au public en 1906, à peine quelques années après avoir commencé à créer ce jardin. Ses pruniers et cerisiers, et nombreuses fleurs de saison, en ont rapidement fait un lieu privilégié de sortie pour les habitants. Hara a continué à agrandir le jardin et a rajouté des bâtiments au site qui a finalement été achevé en 1922.
De l’autre côté de l’étang aux lotus se trouve Kakushôkaku, l’ancienne résidence privée de la famille Hara. L’édifice actuel, complètement reconstruit, est classé bien culturel de la ville de Yokohama.
Le Chôshûkaku est le dernier édifice à être déplacé vers le Sankei-en, en 1922. C’était la résidence de Kasuga no Tsubone, la nourrice de Iemitsu, troisième shogun Tokugawa. Il se trouvait à l’origine sur le domaine du palais de Nijô, à Tokyo. Son architecture dans le style rôkaku est d’influence chinoise. L’édifice à deux étages est de construction carrée, et est inscrit au patrimoine culturel national.
Une lieu dédié à l’art architectural et pictural
Il est dit que la pagode à trois étages qui surplombe le jardin extérieur a été construite en 1457 et faisait partie de Tômyô-ji, un temple de Kyoto aujourd’hui disparu. C’est la plus vieille structure du jardin. Une fois la pagode en place en 1914, le jardin privé de Hara a été conçu de façon à optimiser cette vue.
Par ailleurs, certaines modifications ont été apportées au Rinshunkaku pour mieux l’harmoniser avec le cadre du Sankei-en. La forme et le placement de la toiture ont été ajustés, et l’agencement des pièces modifié pour profiter au maximum des magnifiques vues de la pagode et du pont couvert.
La vue d’une des pièces du troisième pavillon du Rinshunkaku. La pagode au loin sa marie harmonieusement avec l’étang et la verdure.
On peut apercevoir le pavillon Jutô Ôidô à partir de la salle Naniwa-no-ma. Le pont couvert est dans le style du pont Kangetsudai au temple Kôdai-ji, à Kyoto
Au sud-est du pont couvert, le pavillon Jutô Ôidô, qui faisait partie du temple disparu de Tenzui-ji, est inscrit au patrimoine national culturel. Il a été construit par Toyotomi Hideyoshi en 1597 sur le site du temple Daitoku-ji, à Kyoto.
Kakushôkaku, la résidence privée de la famille Hara et le premier édifice construit à Sankei-en, n’était pas seulement un domicile familial. C’était aussi un lieu où Hara pouvait exposer sa collection de nombreuses œuvres d’art et tenait salon pour les artistes d’avant-garde de l’époque. Les grands peintres de nihonga (peinture japonaise classique), Yokoyama Taikan (1868-1958) et Maeda Seison (1885-1977) y ont tous les deux été artistes en résidence. Pendant cette période, Yokoyama Taikan y a créé l’œuvre Ryûin (à l’ombre des saules), et Maeda Seison Mikoshiburi (cortège de mikoshi). C’est aussi depuis le Sankei-en que le philosophe moral Watsuji Tetsurô (1889-1960) a entamé son périple pour le voyage qui a inspiré son œuvre autobiographique Koji Junrei (un pèlerinage vers d’anciens temples).
C’est à Shôfûkaku, un pavillon proche de la pagode, que le grand poète, écrivain et réformateur social indien, Rabindranath Tagore (1861-1941), premier lauréat Nobel asiatique, a passé deux mois et demi en 1916 et y a écrit son recueil de poèmes, Les oiseaux de passage. Ce jardin qu’a créé le perspicace Hara est devenu non seulement un lieu de loisir pour le public mais aussi un lieu qui a stimulé la créativité des nombreux artistes qu’il côtoyait.
Il faut monter en haut de la colline pour bien admirer la pagode du Tômyô-ji.
Près de la pagode, il ne reste qu’une plaque commémorative du Shôfûkaku, détruit par le grand séisme du Kantô de 1923.