50 ans depuis le retour d'Okinawa sous la souverainté japonaise

Le cénotaphe et le musée Himeyuri : transmettre les affres de la bataille d’Okinawa et la valeur de la paix

Visiter le Japon Histoire

Tout le sud de l’île principale d’Okinawa a été le théâtre de la bataille terrestre la plus intense sur le sol japonais de toute la Seconde Guerre mondiale. Le cénotaphe et le musée Himeyuri continuent de transmettre les valeurs de paix et de vie par une abondante documentation sur l’expérience tragique des étudiantes qui furent mobilisées sur le front en tant que personnel infirmier.

Beaucoup de vies perdues dans la bataille féroce du sud d’Okinawa

Les forces américaines ont occupé la partie centrale de l’île principale d’Okinawa qui s’étend dans la direction nord-sud, afin de la diviser. Lorsqu’elles se sont approchées du château de Shuri (Naha), où se trouvait le quartier général des forces japonaises, à la fin du mois de mai, l’hôpital militaire a reçu l’ordre de se retirer dans la partie sud de l’île. Les étudiantes de Himeyuri, ainsi que les patients qui pouvaient marcher, se sont dirigés à pied vers la ville d’Itoman, à la pointe sud d’Okinawa. Le secteur d’Ihara présente de nombreuses grottes. Et l’hôpital a été divisé sur six grottes. De toute façon, plus aucun soin digne de ce nom n’était dispensé, par absence de toute fourniture médicale.

Puis, le 18 juin, alors que l’étau des forces américaines se referme, les étudiantes de Himeyuri reçoivent l’ordre de se disperser. Ces jeunes filles, toutes mineures, sont alors jetées dans la nature, en plein champ de bataille et on leur dit : « Agissez selon votre propre jugement ». Depuis le début de la guerre, on leur avait inculqué l’image que « les Américains et les Britanniques sont des démons », elles avaient surtout peur d’être faites prisonnières. Elles n’avaient nulle part où aller, elles se sont dirigées vers la côte, se cachant derrière les buissons et les rochers. Plusieurs d’entre elles sont tombées sous les tirs en chemins. On dit que sur la plage d’Arasaki, un enseignant pris de panique, blessé par un tir américain, a fait exploser une grenade à main et s’est suicidé avec ses étudiantes. Une stèle se trouve aujourd’hui sur les lieux de l’événement.

Un total de 136 élèves et enseignants de Himeyuri sont décédés pendant la bataille d’Okinawa. 117 d’entre elles, soit près de 90 %, sont mortes après l’ordre de dispersion, ce qui illustre l’intensité des combats dans le sud.

La tragédie qui a suivi l’ordre de dissolution est racontée par les témoignages des survivantes ainsi que par des films militaires américains, dans la troisième salle d’exposition.
La tragédie qui a suivi l’ordre de dissolution est racontée par les témoignages des survivantes ainsi que par des films militaires américains, dans la troisième salle d’exposition.

La 4e salle d’exposition présente des témoignages de survivants ainsi que des photographies des élèves et des enseignants qui ont perdu la vie.
La 4e salle d’exposition présente des témoignages de survivants ainsi que des photographies des élèves et des enseignants qui ont perdu la vie.

Les angoisses et la détermination des anciennes élèves de Himeyuri

Après la guerre, les habitants de Mawashi, le village où s’étaient trouvées les enseignantes et les élèves de Himeyuri, furent contraints de déménager et de se reloger dans le secteur de Komesu, à l’est d’Ihara. Sur l’initiative de Kinjô Kazunobu, maire du village à l’époque, et ayant lui-même perdu un membre de sa famille élève de Himeyuri, les restes des corps furent rassemblés à partir de 1946 et déposés dans plusieurs ossuaires érigés sur place : « Le cénotaphe des âmes » (Komesu, commune d’Itoman) et « Le cénotaphe de Himeyuri ».

C’est dans les camps militaires américains que la tragédie des étudiantes de Himeyuri s’est d’abord transmise. C’est là qu’un écrivain okinawaïen, Ishino Keiichirô, l’a entendu, et s’en est servi pour écrire son livre Himeyuri no tô (Le cénotaphe Himeyuri), qui fut porté à l’écran en 1953. Le film connut un immense succès, connut de nombreuses versions, grâce à quoi le nom de Himeyuri est aujourd’hui connu dans tout le Japon.

En 1948, les anciennes élèves des deux écoles ont créé « l’Association des anciennes élèves de Himeyuri ». Mais il a fallu attendre 40 ans pour que le musée Himeyuri de la Paix ouvre ses portes, en 1989. Les survivantes ont continué à souffrir et à regretter. En particulier, il était difficile de vivre en se disant : « Mes amies sont mortes, et je suis la seule à avoir survécu ». Beaucoup d’entre elles hésitaient à parler publiquement de leur expérience de la guerre. Ce n’est qu’après avoir atteint un âge de plus de 60 ans que le besoin de transmettre l’horreur de la guerre et la valeur de la paix aux générations futures leur est apparu comme un devoir envers leurs camarades décédées.

Une phrase est écrite en gros sur un mur de la 5e salle d’exposition : « Nous continuerons à parler de ce que nous savons de la guerre à travers chacune de nos expériences individuelles. »

Exposition sur les actions des survivantes de Himeyuri et leur détermination depuis la fin de la guerre.
Exposition sur les actions des survivantes de Himeyuri et leur détermination depuis la fin de la guerre.

Le cénotaphe Himeyuri est entouré d'un espace où les visiteurs peuvent se recueillir pour les victimes.
Le cénotaphe Himeyuri est entouré d’un espace où les visiteurs peuvent se recueillir pour les victimes.

Cénotaphe Himeyuri et Musée Himeyuri de la Paix

  • Adresse : 671-1 Ihara, Itoman, Okinawa
  • Heures d’ouverture : 9 h à 17 h 25 (dernière entrée 17h)
  • Fermeture : ouvert toute l’année
  • Tarif : Adultes 450 yens, lycéens 250 yens, élèves de l’école primaire et du collège 150 yens.

(Reportage, texte et photos de Nippon.com)

Tags

Okinawa mémoire guerre mort Seconde Guerre mondiale

Autres articles de ce dossier