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Les shīsā : derrière le mystère des divinités gardiennes d’Okinawa

Culture Tourisme

Les shīsā de l’île d’Okinawa ont une apparence semblable à celle d’un lion. Ces statues à l’aspect féroce se retrouvent çà et là dans la région, et les visiteurs ne manquent jamais de ramener avec eux en souvenir des figurines à leur effigie. D’où viennent donc ces créatures ? Jetons un regard sur leur histoire et leur signification.

Les shīsā à la maison : un phénomène moderne

Dans la préfecture d’Okinawa, les shīsā sont partout. Semblables à des lions exotiques, ils décorent les entrées des bâtiments et montent la garde sur les avant-toits. Bien que ces figures fassent depuis longtemps partie de la culture unique de l’île, leur statut d’élément folklorique est relativement nouveau. Les shīsā ne sont utilisés comme décorations que depuis la fin du XIXe siècle.

Un shîsâ en céramique éloigne le mal depuis un toit.
Un shīsā en céramique éloigne le mal depuis un toit.

Les maisons traditionnelles d’Okinawa ont des toits aux tuiles rouges distinctives. Selon Sakai Wakaba, conservateur au Centre de la culture d’Okinawa, les dirigeants du royaume de Ryûkyû (une longue dynastie établie sur l’île entre 1429 et 1879, qui a donné naissance à la culture d’Okinawa) avaient pourtant banni ce genre de toiture pendant des années. L’architecture en question n’a commencé à gagner en popularité qu’après l’annulation de cette législation en 1889. Les bâtisseurs utilisaient alors les surplus de tuiles et de plâtre pour la fabrication des shīsā au sommet des habitations, et petit à petit, cette décoration s’est étendue aux maisons ordinaires.

Le Centre de la culture d’Okinawa fait partie du « village des châteaux du royaume de Ryûkyû » au sein du parc à thème pour touriste « Okinawa World », dans la ville de Nanjô. Le centre exhibe des shīsā fabriqués par des artisans locaux de renom, mais également des statues de lions venues d’ailleurs, ancêtres de ces figures populaires. Le centre, logé dans une maison au toit rouge construite il y a plus d’un siècle, est le cadre idéal pour en apprendre davantage sur ces créatures.

Le Centre de la culture d’Okinawa, au sein du parc à thème Okinawa World. Trois shîsâ accueillent les visiteurs.
Le Centre de la culture d’Okinawa, au sein du parc à thème Okinawa World. Trois shīsā accueillent les visiteurs.

Le village des châteaux du royaume de Ryûkyû comprend des maisons traditionnelles, enregistrées au patrimoine culturel tangible du Japon, qui ont été déplacées au sein du parc à thème.
Le village des châteaux du royaume de Ryûkyû comprend des maisons traditionnelles, enregistrées au patrimoine culturel tangible du Japon, qui ont été déplacées au sein du parc à thème.

Un shîsâ en céramique. Chacune de ces créatures possède sa propre personnalité et son propre charme.
Un shīsā en céramique. Chacune de ces créatures possède sa propre personnalité et son propre charme.

Les origines lointaines des shīsā

On pense que les shīsā ont pour ancêtres les statues de lion de la Chine ancienne. Il y a longtemps, en Égypte et au Moyen-Orient, les lions étaient considérés comme des créatures saintes, et leur force ainsi que leur férocité symbolisaient le pouvoir de la classe gouvernante. Les félidés décoraient alors les palais et les temples. Le plus célèbre d’entre eux est le Grand Sphinx de Gizeh, au visage humain et au corps de lion.

Ces statues se sont graduellement transformées au fur et à mesure de la diffusion de ces représentations de bêtes vers l’Est, le long de la Route de la Soie. Quand ces figures se sont fait connaître dans des endroits inhabités par les lions, elles sont devenues des créatures mythiques et sacrées, ou des divinités chargées de repousser le mal. D’après Sakai, certains Okinawaïens ne savent toujours pas bien si les shīsā sont des chats ou, comme leurs « cousins » les komainu, des sortes de lion-chiens gardant les sanctuaires shintô du Japon continental. Bien que les deux soient originaires de Chine, les komainu ont été introduits au Japon via la péninsule coréenne.

Au nord d’Okinawa et dans les îles Yaeyama, les shīsā sont connus sous le nom de shīshī. Ce mot est souvent décrit comme une déformation de l’ancienne appellation japonaise du lion, shishi. Le nom de ces animaux a toutefois été introduit à Okinawa directement par la Chine, où il est prononcé « shizi », et il est très probable que cette prononciation ait évolué en « shīsā », ou que les caractères chinois aient été tout simplement lus de cette façon.

Sakai explique également que, bien que de nombreuses personnes appuient la prononciation de la première syllabe, shīsā est prononcé sans accent par les Okinawaïens. Les touristes anglophones le prononcent souvent « Caesar », comme le nom du général romain, ce qui a tendance à chagriner les locaux…

De nombreuses figurines de shîsâ sont exposées au Centre de la culture d’Okinawa.
De nombreuses figurines de shīsā sont exposées au Centre de la culture d’Okinawa.

Certains shîsâ ont des expressions faciales proches des humains, non ?
Certains shīsā ont des expressions faciales proches des humains, non ?

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