
Le temple Tsukiji Hongan-ji de Tokyo : une architecture aux multiples inspirations culturelles et religieuses
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Un temple qui renaît de ses cendres
L’histoire du Tsukiji Hongan-ji est au moins aussi vieille que celle de Tokyo. Le temple a été établi en 1617 dans la capitale japonaise, alors connue sous le nom d’Edo, en tant que branche du très influent Nishi Hongan-ji de Kyoto, le temple principal de l’école bouddhique de la Véritable Terre Pure (Jôdo Shinshû), fondée par le moine Shinran (1173-1263).
S’il s’est d’abord tenu dans le voisinage du quartier de Nihonbashi, en 1657, le Tsukiji Hongan-ji s’est effondré avec de larges portions de la ville lors du Grand Incendie de Meireki. Il a été reconstruit à sa présente location sur un ancien terrain marécageux (le terme Tsukiji signifiant approximativement « terres récupérées »). Puis en 1923, le temple a de nouveau été réduit en cendres, cette fois-ci par le Grand Tremblement de Terre du Kantô qui a balayé Tokyo et ses environs notamment en provoquant d’innombrables incendies.
Le supérieur du temple Nishi Hongan-ji de l’époque, Ôtani Kôzui, s’est tourné vers Itô Chûta (1867-1954), architecte et savant acclamé, pour concevoir le hondô, ou pavillon principal de l’édifice de Tokyo. Itô partageait l’intérêt d’Ôtani pour le bouddhisme ancien et avait beaucoup voyagé en Asie, étudiant les influences architecturales de la religion. Quand le temple a été achevé en 1934, il présentait une apparence jamais vue jusqu’alors, avec des éléments empruntés de cultures lointaines (Inde, Turquie, Chine) et des religions occidentales.
Comment rendre plus attractif
Pourtant, le Tsukiji Hongan-ji est resté une sorte de coin perdu de Tokyo, éloigné de tout jusque dans les années 1980, quand le tentaculaire marché de vente en gros de poissons de Tsukiji a commencé à attirer les foules. Son attrait touristique a progressivement augmenté par sa proximité avec les centres commerciaux et les boutiques chics du quartier de Ginza, ainsi que du célèbre théâtre Kabukiza.
La plupart des visiteurs, cependant, ne prêtaient que peu d’attention au Tsukiji Hongan-ji, qui en général n’avait même pas de mention dans les guides de voyage, et ce malgré son statut de Bien culturel important du Japon. Un manque de popularité s’expliquant en parti par son atmosphère silencieuse, qui contrastait fortement avec l’animation du marché.
Le Tsukiji Hongan-ji. La porte principale du temple se tenait à l’origine du côté du marché, mais elle a été reconstruite vers l’ouest, en direction du Nishi Hongan-ji de Kyoto et de l’Inde lointaine.
Le prêtre Higashimori Shônin, qui supervise également les affaires du temple, admet que le Tsukiji Hongan-ji s’est laissé aller à l’arrogance et à l’isolement.
« Les habitants eux-même le trouvaient trop renfermé et n’y allaient pas », déclare-t-il. « Un temple devrait être un endroit ouvert et accueillant, mais quelque part nous avons oublié cela ». Il dit que des efforts sont en cours pour remédier à cette situation, en travaillant notamment avec le marché extérieur de Tsukiji et d’autres entreprises et organisations locales. « Nous souhaitons que des gens de tous milieux et de tous horizons se sentent les bienvenus ici. »
En 2015, Yasunaga Yûgen est devenu le nouveau supérieur du Tsukiji Hongan-ji. En tant qu’ancien banquier et conseiller en affaires devenu prêtre bouddhiste, il s’est donné pour mission de rénover le temple. L’une de ses premières missions a été de désencombrer la périphérie du lieu. Les arbres et les plantes envahissants du mur extérieur ont été enlevés, ce qui a permis de faire passer plus de lumière. Le parking en face du pavillon principal a été déplacé et l’endroit a été converti en esplanade. Un café avec des sièges en terrasse a également été aménagé, ainsi qu’une nouvelle librairie.
Le nouveau style du temple a été un franc succès auprès des habitants comme des visiteurs. Aujourd’hui, les employés de bureau et les écoliers passent par le pourtour du temple pour se rendre à leur destination et pour rentrer chez eux, et les acheteurs et les touristes font la queue au Tsumugi, le café du temple, pour prendre leur petit-déjeuner.
Higashimori Shônin prend la pose en face du hondô, le pavillon principal. Il a travaillé au bureau des affaires du temple Nishi Hongan-ji de Kyoto avant de migrer à Tokyo en 2018.
L’eau s’écoule doucement du pavillon des ablutions (chôzuya), près de l’entrée principale.
Le café Tsumugi sert un succulent petit-déjeuner marié à une vue intime sur le pavillon principal du temple.
Un pavillon principal éclectique
Le Tsukiji Hongan-ji se démarque de ses environs, et son architecture exotique le fait davantage ressembler à un édifice d’Asie du Sud qu’à un temple japonais. En dessinant ses plans, l’architecte Itô Chûta s’est largement inspiré des motifs qu’il avait découverts en étudiant les architectures bouddhiques en Chine, en Inde et en Turquie. Il a également inclu des éléments nationaux et occidentaux afin de créer une structure hybride, dont l’influence indienne est la plus évidente.
Le dôme au sommet du hondô est l’une des caractéristiques distinctives du temple.
La porte Sud du Tsukiji Hongan-ji
Higashimori note que cette apparence intrigue autant les gens aujourd’hui que lors de l’érection du temple. « L’architecture en bois a toujours été la norme depuis la construction des premiers temples du pays », explique-t-il. « Le Tsukiji Hongan-ji a toutefois brisé cette tradition en utilisant le béton comme principal matériau. Il est également inhabituel que le hondô propose des chaises au lieu de simples tapis de paille. On trouve aussi des vitraux ainsi qu’un chandelier avec une lampe à mercure. De telles éléments pourraient ne pas sembler à leurs places dans un temple, mais pas si l’on voit le pavillon comme un bâtiment moderne. »
La forme du béton rappelle les temples de pierre d’Inde qui ont inspiré cette structure, et l’usage de ce matériau a pour bénéfice de fortifier le bâtiment contre les tremblements de terre et les feux qui ont détruit les anciennes versions du pavillon. À l’intérieur, le hondô est bien éclairé et confortable, ce qui le rend accessible à tous les visiteurs, même les plus âgés. Durant les mois les plus frais, un système de chauffage central à vapeur, l’une des idées les plus innovantes du temple, garde l’intérieur à une température agréable.
L’entrée du hondô révèle des images de fleurs de lotus sur un vitrail.
Les supports au plafond ont été fabriqués à la manière traditionnelle japonaise, et l’utilisation de chaises dans un temple était inhabituelle avant l’ouverture du Tsukiji Hongan-ji.
Dans le pavillon principal se trouve une statue d’Amida Nyorai, le Bouddha tutélaire de l’école bouddhique de la Véritable Terre Pure.