Les milles et une merveilles de Kyoto

Les « machiya » de Kyoto : des maisons ingénieuses qui font appel aux cinq sens

Culture Architecture

Dans les machiya, ou maisons traditionnelles de Kyoto, tout est pensé tant sur le fond que sur la forme. Ces bâtisses traditionnelles à l’aspect élégant et raffiné ont également mis l’accent sur le confort. Elles regorgent par ailleurs de mille et une idées ingénieuses pour contrôler la température et l’humidité et même résister aux tremblements de terre. En clair, les machiya sont un concentré des nombreuses innovations que les architectes de l’ancienne capitale ont développées au cours des siècles.

Un lieu de « retraite » en pleine ville

Leur façade étroite et leurs intérieurs eux aussi étroits et tout en profondeur valent souvent aux machiya de Kyoto le surnom de unagi no nedoko (littéralement, « nid d’anguille »). Ce style a évolué pendant l’époque d’Edo, les taxes foncières étaient alors prélevées en fonction de la largeur de la façade du bâtiment.

À Kyoto, une machiya reconnaissable à sa façade étroite et ses couloirs profonds et minces.
À Kyoto, une machiya reconnaissable à sa façade étroite et ses couloirs profonds et minces.

Le côté de la façade donnant sur la rue était le point d’entrée en contact avec la société ; l’arrière du bâtiment, avec sa cour intérieure, permettait une communion avec la nature. « Le temps s’écoule différemment selon que l’on se trouve côté rue ou à l’arrière de la maison », explique Matsui Kaoru. Dans la boutique, il y a des règles et des délais à respecter, mais tout autour de la cour, rien de tout cela ; vous devenez maître du temps. « Allez et venez entre les deux zones et vous verrez à quel point l’environnement naturel est fondamental pour le fonctionnement de la société humaine ».

La cour sépare lieu de travail lieu de résidence.
La cour sépare lieu de travail lieu de résidence.

L’utilisation de matériaux naturels a la particularité de rendre notre oreille plus attentive au moindre bruit et aux différents jeux d’ombre et de lumière, nous aidant à nous acclimater à la lumière douce, qui n’agresse pas l’œil, et qui filtre à travers le shôji, à la chaleur qui émane des murs de terre et les piliers apparents, au sol en bois rutilant et à la sensation de fraîcheur procurée par le tatami en plein été.

Harmonie entre la douce lumière du soleil filtrant à travers le papier d'un shôji et une pièce tatami
Harmonie entre la douce lumière du soleil filtrant à travers le papier d’un shôji et d’une pièce en tatami

« Dans une machiya, il est quelque chose d’intemporel, capable d’éveiller nos cinq sens à la fois », nous confie Matsui Kaoru. « Cette simple bâtisse a le pouvoir de nous aider, nous simples humains, à garder les pieds sur terre en dépit des changements sociaux toujours plus rapides. Vu sous cet angle, je pense qu’une machiya est au final ce que la société moderne recherche ».

S’asseoir tranquillement seul près de la cour ; c’est peut-être cela l’expérience la plus aboutie pour apprécier les mille et un bienfaits d’une machiya. À l’extérieur, la rue animée, oppressante, qui grouille ; à quelque pas un monde où tout n’est plus que paix et quiétude – pour ainsi dire une « retraite en montagne » en pleine ville. Prendre son temps et explorer les multiples expressions de la cour sous différents angles, de différentes positions et sous la lumière changeante du soleil : à n’en pas douter, qui visitera une machiya verra ses sens en émoi.

La cour intérieure permet à l’air de circuler dans toute la maison.
La cour intérieure permet à l’air de circuler dans toute la maison.

Voir également notre article précédent sur les machiya : L’architecture des maisons traditionnelles de Kyoto, les « machiya »

(Reportage et texte de Sugimoto Kyôko. Photos : Hamada Tomonori)

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