Les milles et une merveilles de Kyoto

Les « machiya » de Kyoto : des maisons ingénieuses qui font appel aux cinq sens

Culture Architecture

Dans les machiya, ou maisons traditionnelles de Kyoto, tout est pensé tant sur le fond que sur la forme. Ces bâtisses traditionnelles à l’aspect élégant et raffiné ont également mis l’accent sur le confort. Elles regorgent par ailleurs de mille et une idées ingénieuses pour contrôler la température et l’humidité et même résister aux tremblements de terre. En clair, les machiya sont un concentré des nombreuses innovations que les architectes de l’ancienne capitale ont développées au cours des siècles.

Une ingénieuse utilisation de la lumière et de l’air

Qui a dit que les machiya étaient sombres et froides ? Elles font appel à mille et une astuces pour laisser entrer la bonne quantité de soleil et d’air. Les larges corniches : elle gardent le soleil à l’extérieur pendant l’été étouffant, mais lui permettent d’atteindre l’arrière de la pièce lorsque le soleil est bas en hiver. Une engawa, semblable à une véranda, adjacente à la cour offre une poche d’air, qui fonctionne comme une isolation naturelle, de la chaleur comme du froid, tout au long de l’année.

Derrière les portes coulissantes du shôji, l’engawa : une méthode d’isolation naturelle
Derrière les portes coulissantes, l’engawa, une véranda japonaise : une méthode d’isolation naturelle

Les lucarnes (tenmado) ont une double fonction : elles laissent pénétrer la lumière par le toit, mais elles peuvent également refroidir les pièces en libérant de la chaleur. Les cours intérieures permettent également une bonne ventilation ; le fait d’asperger le sol avec de l’eau dans la rue en plein été, appelé uchimizu, crée un petite poche d’air et attirera l’air dans la maison par l’intermédiaire de la cour ouverte. En versant de l’eau à l’extérieur dans la chaleur étouffante, les habitants des machiya, eux, peuvent se réjouir d’une fraîche brise.

La lucarne tenmado : à la fois une source de lumière et un moyen de faire baisser la température à l’intérieur de la maison.
La lucarne tenmado : à la fois une source de lumière et un moyen de faire baisser la température à l’intérieur de la maison.

Dissiper l’énergie sismique

Comme dans les maisons ordinaires, les machiya sont construites avec des poutres et des colonnes. Mais on y trouve également des rangées de joints nuki, similaires aux glissières horizontales perçant les piliers des portiques torii des sanctuaires shintô.

Un espace entre les piliers et la fondation en pierre permet l’isolement de la force sismique.
Un espace entre les piliers et la fondation en pierre permet l’isolement de la force sismique.

Dans les machiya de Kyoto, on retrouve également une multitude de morceaux de bois croisés verticalement et horizontalement, à partir de claire-voie, de portes coulissantes shôji et de lattes takekomai utilisées pour les murs en terre au niveau des colonnes et poutres qui forment la charpente de base de la maison. Il n’y a presque pas de matériaux de contrefort en diagonale. Le bâtiment lui-même repose simplement sur une fondation en pierre, toutefois avec un espace entre les deux.

Ces caractéristiques peuvent apparaître comme des faiblesses par rapport aux normes architecturales modernes. Mais les machiya offrant justement peu de résistance, elle tiennent étonnamment bien le choc face aux tremblements de terre. Les piliers resteront en place pendant des secousses d’une intensité pouvant aller jusqu’à 4 sur l’échelle d’intensité sismique japonaise (appelé shindo).

« Les murs en terre sont rigides mais ils peuvent absorber des séismes d’intensité moyenne », explique Matsui Kaoru. « Dans le cas de secousses plus importantes, il y a suffisamment de facilité de mouvements dans la charpente en bois et de joints pour disperser l’énergie sismique. Conséquence : la maison reste intacte. »

Comme la bâtisse ne fait que reposer sur les fondations, elle peut être dissociée de la sous-structure en cas de séisme majeur, ce qui lui permet d’isoler la plupart de la force sismique. Ainsi, la machiya est conçue pour résister aux tremblements de terre : solide en cas de séismes de taille moyenne, suffisamment souple pour résister à des secousses de grande ampleur et enfin, sa structure d’isolation de la base lui permet d’éviter un impact sismique dévastateur. Cette triple caractéristique suscite un vif intérêt dans le monde de l’architecture contemporaine.

La présence de colonnes et de poutres sans contrefort diagonal crée un espace épuré, agréable pour l’œil.
La présence de colonnes et de poutres sans contrefort diagonal crée un espace épuré, agréable pour l’œil.

Suite > Un lieu de « retraite » en pleine ville

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